Au cœur du Sahel, un nouveau coup dur frappe les populations civiles déjà durement éprouvées par des années de conflit. L’organisation humanitaire Médecins Sans Frontières (MSF) vient d’annoncer la suspension temporaire de ses activités médicales dans la zone de Nampala, au centre du Mali. Une décision qui prive les habitants de soins de santé essentiels dans une région en proie à une insécurité grandissante.
Exactions contre le personnel humanitaire
Selon un communiqué de MSF, cette suspension fait suite à de récentes brutalités commises à l’encontre de ses équipes et d’agents de santé communautaires dans la périphérie de Nampala. L’ONG impute ces exactions à des hommes armés menant régulièrement des opérations militaires dans la zone, sans toutefois préciser davantage.
D’après des sources proches du dossier, plusieurs personnes auraient été blessées lors de ces incidents, survenus le 14 octobre dernier. Les équipes de MSF et les agents de santé apportant des soins à la population ainsi que des membres de la communauté auraient été violemment pris à partie et dévalisés.
MSF, dernier rempart sanitaire
La présence de MSF revêt une importance capitale pour les populations de la région. L’ONG affirme être la seule organisation internationale encore active dans ce secteur, où elle dispense des soins médicaux gratuits et vitaux aux habitants ainsi qu’aux personnes déplacées par le conflit.
MSF a dû prendre la difficile décision de suspendre temporairement ses activités médicales dans la zone de Nampala, privant la population de soins essentiels.
extrait du communiqué de MSF
Or, la crise sécuritaire qui secoue la région provoque des besoins sanitaires élevés, alerte l’ONG. Les cas de paludisme, maladie potentiellement mortelle, seraient notamment en augmentation.
Exactions multiples contre les civils
Les populations civiles du centre du Mali sont les victimes d’exactions attribuées à une multitude d’acteurs armés. Si les groupes jihadistes sont pointés du doigt comme les principaux responsables, l’armée malienne et le groupe paramilitaire Wagner, qui mènent des opérations anti-terroristes dans la zone, sont également mis en cause. Des accusations démenties par les autorités maliennes.
Depuis plusieurs mois, l’armée régulière et ses alliés russes concentrent leurs efforts contre la Katiba Macina, un groupe armé affilié à Al-Qaïda qui sévit dans la région. Mais leurs opérations s’accompagneraient de nombreux abus à l’encontre des populations.
Appel au respect du droit humanitaire
MSF indique être en discussion avec les autorités maliennes et les différentes parties au conflit afin que de tels actes de violence ne se reproduisent plus. L’objectif : permettre à l’ONG de reprendre dès que possible son offre de soins essentiels à la population, et ce en toute sécurité.
Cet énième incident soulève une nouvelle fois la question du respect du droit international humanitaire dans les zones de conflit. Le personnel médical et humanitaire, de même que les structures de santé, bénéficient en effet d’une protection spécifique en vertu des Conventions de Genève. Des règles trop souvent bafouées sur le terrain, au détriment des populations civiles qui en paient le prix fort.
Suspension des activités humanitaires : un phénomène inquiétant
Le cas de Nampala est loin d’être isolé. Il y a une dizaine de jours, MSF annonçait également la suspension de ses activités à Djibo, ville du nord du Burkina Faso, pays voisin du Mali également touché par la propagation jihadiste. Là aussi, des incidents sécuritaires visant les centres de santé et les locaux de l’ONG sont à l’origine de cette décision.
Ces suspensions à répétition des activités humanitaires, dans un contexte où les besoins des populations n’ont jamais été aussi criants, sont particulièrement préoccupantes. Elles privent les civils pris entre les feux d’un accès vital aux services de base comme les soins de santé.
Il est impératif que toutes les parties au conflit malien permettent un accès humanitaire sûr et sans entrave aux populations dans le besoin.
Déclaration de MSF
Alors que le Sahel reste enlisé dans une spirale de violences, la protection des civils et le respect de l’action humanitaire doivent être une priorité absolue. C’est une question de vie ou de mort pour des milliers de personnes vulnérables prises au piège de conflits qui les dépassent. L’urgence est d’autant plus grande que la crise sécuritaire se double d’une crise humanitaire majeure, aggravée par la pandémie de Covid-19 et les effets du changement climatique dans cette région aride.
Les récents événements de Nampala sonnent une nouvelle fois comme un signal d’alarme. Il est plus que temps que la communauté internationale se saisisse réellement de la question sahélienne et mette tout en œuvre pour restaurer la sécurité et assurer le respect des droits humains fondamentaux. La survie de populations entières en dépend.