Le chancelier allemand Olaf Scholz s’envole ce jeudi pour l’Inde, entamant une visite de deux jours qui s’annonce cruciale pour l’avenir des relations entre Berlin et New Delhi. Au cœur des discussions : le renforcement de la coopération économique et militaire, malgré les divergences persistantes sur le dossier ukrainien.
Un partenariat stratégique à consolider
Pour ce déplacement, Olaf Scholz sera accompagné de plusieurs ministres clés de son gouvernement, témoignant de l’importance accordée à ce dialogue intergouvernemental germano-indien. La première économie européenne voit en effet dans ce pays le plus peuplé de la planète un partenaire économique de plus en plus incontournable.
Outre les échanges commerciaux, l’Allemagne espère aussi trouver en Inde un vivier prometteur de travailleurs qualifiés pour combler ses pénuries de main-d’œuvre croissantes. Le ministre du Travail Hubertus Heil, présent lors de la visite, poursuivra ainsi son offensive de charme visant à recruter des talents indiens.
Faciliter la mobilité professionnelle et étudiante
Il y a deux ans déjà, les deux pays avaient signé un accord migratoire destiné à fluidifier la mobilité des professionnels et des étudiants entre l’Inde et l’Allemagne. Une dynamique que Berlin souhaite aujourd’hui accélérer face au vieillissement de sa population et aux besoins criants de certains secteurs.
L’hydrogène vert, un autre axe de coopération
Parmi les autres dossiers économiques au menu des discussions, figure également l’ambitieux programme indien visant à accroître la production d’« hydrogène vert » comme source d’énergie propre. Un domaine dans lequel l’expertise allemande pourrait s’avérer précieuse pour New Delhi.
Le délicat dossier ukrainien en toile de fond
Mais au-delà de la coopération économique, les sujets plus sensibles ne pourront être occultés lors de cette visite, à commencer par les divergences concernant le soutien à l’Ukraine. Contrairement à l’Allemagne qui livre des équipements militaires à Kiev, l’Inde n’a en effet jamais explicitement condamné l’invasion russe.
New Delhi a profité des sanctions occidentales visant le pétrole russe pour s’approvisionner à prix cassé
Traditionnellement très dépendante de Moscou pour ses armements, l’Inde soigne ses relations avec la Russie. Une position qui ne l’empêche pas pour autant de chercher à tisser des partenariats de sécurité plus étroits avec les Occidentaux, dans une stratégie assumée de « multi-alignement ».
Réduire la dépendance aux armes russes
C’est dans ce contexte qu’intervient le voyage d’Olaf Scholz, qui s’inscrit selon les experts dans une volonté d’« aider l’Inde à réduire sa dépendance à l’égard des armes russes ». L’Allemagne voit New Delhi comme un partenaire fiable dans la région indo-pacifique, qu’elle souhaite soutenir face aux ambitions croissantes de la Chine dans l’océan Indien.
Des exercices militaires conjoints prévus
Signe de ce rapprochement sécuritaire, la visite du chancelier prévoit un déplacement samedi dans l’État de Goa, dans le sud du pays, où deux navires de la marine allemande effectuent actuellement une mission de sept mois dans la région. Des exercices conjoints doivent être menés avec la marine indienne.
Ces manœuvres interviennent quelques semaines seulement après la participation de la Luftwaffe, l’armée de l’air allemande, au premier exercice aérien multinational organisé par l’Inde, le Tarang Shakti. Autant de signaux qui illustrent la volonté des deux pays de renforcer leur coopération militaire face aux défis sécuritaires régionaux.
Une relation à géométrie variable
Pour autant, les experts mettent en garde contre des attentes trop élevées côté occidental. Si l’Allemagne et ses alliés peuvent aider l’Inde à améliorer ses capacités militaires face à la Chine, ils ne doivent pas s’attendre à un alignement total de New Delhi sur leurs positions.
Une Russie complètement affaiblie ne s’accorderait pas avec la vision indienne d’une Asie multipolaire
– Selon un analyste allemand
Dans sa quête d’autonomie stratégique et son attachement au multilatéralisme, l’Inde entend en effet préserver une relation à géométrie variable avec les grandes puissances. Un équilibre subtil que la visite d’Olaf Scholz, entre coopération et divergences assumées, viendra une nouvelle fois mettre en lumière.