Un vent d’apaisement souffle sur la Nouvelle-Calédonie après six mois de violentes tensions. Pourtant, alors que les plaies sont encore vives, l’incertitude plane sur l’avenir institutionnel de ce territoire français du Pacifique. Les responsables politiques, indépendantistes comme loyalistes, devront faire preuve de courage et d’humilité pour renouer le dialogue et trouver un compromis acceptable par tous.
Une crise dévastatrice aux origines politiques
Tout a commencé le 14 mai 2024 avec l’adoption par l’Assemblée nationale d’un projet de réforme constitutionnelle visant à ouvrir le corps électoral pour les élections provinciales, gelé depuis 2007. Une décision à laquelle les indépendantistes se sont farouchement opposés, craignant une dilution de leur poids électoral. Les semaines précédant le vote, d’importantes manifestations, loyalistes comme indépendantistes, ont agité les rues de Nouméa.
La nuit du 13 au 14 mai a marqué le paroxysme de cette crise avec des scènes de violences et de pillages impliquant près de 9000 personnes selon les autorités locales. Un épisode dramatique qui a coûté la vie à 13 personnes et provoqué plus de 2,2 milliards d’euros de dégâts.
L’État tente de reprendre la main
Face à l’incapacité des autorités locales à ramener l’ordre, l’État a dû prendre des mesures drastiques. Dès le 14 mai, l’état d’urgence était décrété et des renforts déployés, portant jusqu’à 6000 le nombre de membres des forces de l’ordre présents sur le territoire. Le président Emmanuel Macron s’est même rendu sur place le 22 mai pour tenter, en vain, de relancer le dialogue.
L’arrestation mi-juin des principaux responsables de la CCAT (cellule de coordination des actions de terrain), outil de mobilisation de l’Union calédonienne accusé d’avoir commandité les exactions, a permis une désescalade. Mais les tensions sont restées vives pendant la campagne des élections législatives en juillet qui ont vu la victoire d’un loyaliste et l’élection historique d’un député indépendantiste.
Le défi de la reprise du dialogue
La décision du FLNKS début septembre de lever la mobilisation pour permettre la reprise des négociations a constitué un premier pas vers l’apaisement. Mais les divisions persistent au sein du camp indépendantiste, illustrées par la désignation controversée de Christian Tein, leader emprisonné de la CCAT, à la tête du mouvement.
Tant que l’on ne trouvera pas de solutions à la situation financière, il sera difficile de reprendre les discussions.
– Pierre-Christophe Pantz, docteur en géopolitique
L’urgence économique et financière à laquelle fait face le “Caillou”, avec des milliers d’emplois détruits et des services publics au bord de l’effondrement, devra aussi être traitée en priorité. Mais pour Gérald Cortot, ancien directeur de cabinet de Jean-Marie Tjibaou, la reprise d’un vrai dialogue implique surtout de “restaurer la confiance” entre les partenaires.
Un défi immense qui demandera à l’État “d’écouter les gens, de faire preuve d’une grande honnêteté et de dire ce qui l’intéresse vraiment dans cette partie du monde”. Indépendantistes et loyalistes devront aussi accepter de faire des compromis douloureux. À ce prix seulement, la Nouvelle-Calédonie pourra espérer construire un avenir apaisé et partagé.