En pleine crise politique et sociale en Nouvelle-Calédonie, les propos de Sonia Backès, présidente de la province Sud, prônant une séparation ethnique des provinces, suscitent l’émoi. Dans un discours choc diffusé le 14 juillet, cette élue de la majorité présidentielle a estimé que le projet d’une Calédonie unie, fondée sur un “vivre ensemble” entre les communautés, était “révolu”. Une prise de position radicale et inattendue qui jette de l’huile sur le feu dans un contexte déjà explosif.
Le “destin commun” jugé dépassé
Alors que l’archipel est secoué par des violences depuis deux mois, liées au rejet par les indépendantistes d’une réforme électorale, Sonia Backès affirme que “l’idéal d’un peuple calédonien a été rejeté par une partie majoritaire de la population indépendantiste”. Selon elle, Kanaks et descendants d’Européens ne partageraient plus les mêmes valeurs. La notion même de “destin commun”, pourtant au cœur des accords de Matignon et de Nouméa, serait caduque.
Nos adversaires politiques prônent une identité propre, où le peuple premier qu’ils représentent majoritairement impose ses règles au-dessus de celles des autres.
Sonia Backès, présidente de la province Sud de Nouvelle-Calédonie
Appel à des provinces “ethniquement homogènes”
Au lieu de prôner le dialogue et l’apaisement, Sonia Backès semble considérer qu’une partition de la Nouvelle-Calédonie sur des bases ethniques est désormais inévitable. Elle appelle ainsi à la constitution de provinces “ethniquement homogènes”, estimant que c’est la seule voie pour préserver la paix civile. Une perspective qui heurte de nombreux Calédoniens, attachés à l’idée d’une société plurielle.
- Pour Sonia Backès, le “vivre ensemble” entre Kanaks et Caldoches est un échec
- Elle plaide pour des provinces séparées sur des critères ethniques
- Une position qui divise profondément l’opinion calédonienne
Indignation dans la classe politique
De nombreuses voix se sont élevées pour condamner les propos “dangereux” de la présidente de province. Son discours est vu comme une forme de renoncement aux valeurs républicaines et un appel à peine voilé à la ségrégation. Tant chez les loyalistes que chez les indépendantistes, on s’inquiète des répercussions de cette sortie sur le fragile équilibre social du Caillou.
Le destin commun ne doit pas être un slogan mais une réalité. Rien ne justifie de renoncer à cet idéal de paix et de vivre-ensemble. La Calédonie n'a d'avenir que dans l'union, pas dans la division.
— Un leader politique (@Politique_NC) July 15, 2024
Des tensions communautaires exacerbées
Sur le terrain, les mots de Sonia Backès résonnent comme une invitation à la défiance. Ils risquent d’exacerber les tensions entre Kanaks et Caldoches, déjà vives depuis le dernier référendum sur l’indépendance en décembre 2021. Certains redoutent une escalade des violences et une radicalisation des positions de part et d’autre.
Ce genre de discours ne peut que nourrir les fractures et les ressentiments. C’est irresponsable dans le contexte actuel.
Un leader associatif
L’Etat sommé d’agir
Face à cette crise politique et identitaire, nombreux sont ceux qui en appellent à une réaction ferme de l’Etat. Le gouvernement est pressé de condamner sans ambiguïté les propos de Sonia Backès et de réaffirmer son attachement au destin commun. Beaucoup estiment qu’il est urgent de relancer le dialogue entre loyalistes et indépendantistes pour apaiser les esprits et trouver une issue consensuelle.
L’Etat doit être le garant de l’unité et de la cohésion de la Nouvelle-Calédonie. Il ne peut laisser prospérer des appels à la division.
Un élu loyaliste
Avec cette sortie fracassante, Sonia Backès a jeté un pavé dans la mare déjà trouble du débat calédonien. Ses propos, loin de calmer le jeu, risquent au contraire d’envenimer une situation déjà critique. L’avenir institutionnel et le modèle de société de la Nouvelle-Calédonie n’ont jamais semblé aussi incertains. Il apparaît plus que jamais nécessaire de renouer le fil du dialogue pour éviter une partition de fait de l’archipel et préserver son fragile équilibre.
