La fiscalité des grandes fortunes est plus que jamais au cœur des débats en France. Vendredi dernier, les députés ont créé la surprise en votant un amendement instaurant un nouvel impôt sur le patrimoine des milliardaires, et ce malgré l’opposition affichée du gouvernement. Cette décision inattendue a immédiatement suscité de vives réactions dans la classe politique française.
Un taux de 2% au-delà du milliard d’euros
Concrètement, ce nouvel impôt ciblerait spécifiquement les patrimoines dépassant le seuil symbolique du milliard d’euros. Au-delà de cette somme, les ménages concernés se verraient appliquer un taux de taxation supplémentaire de 2%. Une mesure qui, si elle venait à être définitivement adoptée, toucherait directement les plus grandes fortunes du pays.
Cependant, le sort de cet amendement est encore loin d’être scellé. Pour entrer en vigueur, il devra d’abord survivre au reste de l’examen budgétaire au Parlement. Un parcours qui s’annonce semé d’embûches tant le sujet déchaîne les passions dans l’hémicycle.
Le gouvernement monte au créneau
Sans surprise, l’exécutif n’a pas tardé à faire part de son opposition à cette initiative parlementaire. Le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, a vivement critiqué cet impôt qu’il juge unique au monde et susceptible de faire fuir les grands investisseurs :
C’est tout simplement un impôt qui, je pense, n’existe dans aucun autre pays. C’est le meilleur moyen de faire fuir ceux qui peuvent investir.
Un argument balayé par le président de la commission des Finances, Eric Coquerel (LFI), qui a rappelé l’ampleur de l’enrichissement des plus fortunés ces dernières années :
Les personnes dont nous parlons, en 20 ans, ont accumulé mille milliards de plus de patrimoine.
La politique fiscale de Macron remise en cause
Plus largement, ce vote ravive le débat sur les choix fiscaux effectués sous la présidence d’Emmanuel Macron depuis 2017. La suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) cette année-là, remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), avait déjà fait couler beaucoup d’encre.
Aujourd’hui, alors que les comptes publics dérivent, cette politique de baisses d’impôts est ouvertement remise en question. Le budget 2025, présenté par le nouveau gouvernement de Michel Barnier et actuellement examiné à l’Assemblée, prévoit ainsi 60 milliards d’euros d’économies.
La gauche propose un “impôt sur la fortune climatique”
Dans ce contexte, les députés de gauche, réunis au sein du Nouveau Front populaire, militent pour un retour de l’impôt sur la fortune. Mais pas n’importe lequel. Ils défendent l’idée d’un “impôt sur la fortune climatique” qui prendrait en compte l’empreinte carbone des patrimoines.
Une proposition chiffrée à 15 milliards d’euros de recettes par l’écologiste Eva Sas, mais qui n’a pas trouvé grâce aux yeux de la coalition gouvernementale de droite et du centre. Le Rassemblement national, partisan d’un impôt sur la fortune financière épargnant la résidence principale, n’a pas non plus été suivi.
Un débat loin d’être clos
Au final, le vote surprise de vendredi dernier apparaît comme un coup d’éclat politique, une manière pour les députés d’opposition de mettre la pression sur le gouvernement. Mais il témoigne surtout de la sensibilité extrême du sujet de la taxation des hauts patrimoines en France.
Entre les partisans d’un retour pur et simple de l’ISF, les défenseurs d’une contribution exceptionnelle face à l’urgence budgétaire, et les tenants d’une refonte “verte” de la fiscalité du capital, le débat est loin d’être tranché. Et nul doute qu’il sera l’un des fils rouges de l’examen budgétaire qui s’ouvre.