ActualitésPolitique

Nomination de François Bayrou à Matignon : une revanche pour le centriste

François Bayrou, figure incontournable du centrisme, vient d'être nommé Premier ministre par Emmanuel Macron. Retour sur le parcours de cette personnalité qui obtient enfin sa revanche politique à Matignon. Quels défis l'attendent à la tête du gouvernement ?

Une semaine après le renversement surprise du gouvernement de Michel Barnier, le président Emmanuel Macron vient de nommer François Bayrou au poste de Premier ministre ce vendredi 13 décembre. Le maire de Pau et président du MoDem, âgé de 73 ans, fait ainsi son grand retour à Matignon, 30 ans après avoir occupé brièvement le poste sous la présidence de François Mitterrand. Une véritable revanche pour cet inlassable défenseur du centrisme.

Un parcours politique fait de hauts et de bas

Agrégé de lettres classiques et figure familière du paysage politique français depuis les années 1980, François Bayrou n’a jamais réussi à accéder aux plus hautes fonctions malgré plusieurs tentatives. Candidat malheureux à trois reprises à l’élection présidentielle (2002, 2007, 2012), il a toujours buté sur un « plafond de verre », peinant à rassembler au-delà de son socle électoral centriste.

Son ralliement à Emmanuel Macron dès 2017 lui a permis de renouer avec les ors de la République, en devenant ministre de la Justice au début du quinquennat. Mais son passage rue Vendôme a tourné court, contraint à la démission après seulement un mois en poste suite à une affaire d’emplois fictifs au MoDem.

Haut-commissaire au Plan depuis 2020

Écarté du gouvernement, François Bayrou a cependant continué à jouer un rôle majeur en coulisses en tant que président du MoDem, un allié clé de la majorité présidentielle. Une fidélité récompensée en 2020 par sa nomination comme Haut-commissaire au Plan, un poste créé spécialement pour lui à Matignon.

« Tout le monde mesure la difficulté de la tâche. Et je pense aussi que tout le monde se dit qu’il y a un chemin à trouver, réunissant au lieu de diviser […] Je pense que la réconciliation est nécessaire. »

François Bayrou, 13 décembre 2024.

La « réconciliation » comme maître-mot

Pour François Bayrou, sa nomination à Matignon est placée sous le signe du «rassemblement» et de la «réconciliation», dans un contexte de crise politique et de défiance des Français envers leurs dirigeants. Face à une Assemblée nationale morcelée, le nouveau Premier ministre devra réussir là où son prédécesseur Michel Barnier a échoué : bâtir des compromis avec les oppositions pour adopter des réformes.

Un défi de taille pour celui qui n’a jamais caché ses convictions pro-européennes et son attachement à une certaine orthodoxie budgétaire, souvent critiqué pour son centrisme « mou ». Mais à en croire son entourage, François Bayrou compte bien imprimer sa marque avec un style direct et sans détour, quitte à bousculer les habitudes de la Macronie.

Des défis économiques et sociaux immenses

Parmi les dossiers brûlants qui attendent « Monsieur Loyal » à Matignon, la question de la dette et des déficits publics s’annonce centrale. Un sujet qu’il maîtrise sur le bout des doigts, lui qui n’a eu de cesse d’alerter sur les dangers du « mur de la dette » depuis des décennies. François Bayrou a d’ailleurs averti qu’il ne cacherait « rien » de la situation «grave» des finances publiques.

Autres chantiers cruciaux : la défense du pouvoir d’achat face à l’inflation galopante et la réforme tant attendue des retraites, deux thèmes sur lesquels le gouvernement Barnier s’est cassé les dents. Engagé de longue date en faveur d’un système plus juste, le nouveau Premier ministre pourrait tenter de remettre à plat le dossier, au risque de se heurter à la fronde des syndicats.

La tentation d’un gouvernement d’union nationale ?

Pour réussir son pari, François Bayrou pourrait être tenté de constituer un gouvernement d’union nationale, rassemblant des personnalités de gauche comme de droite. Une hypothèse qui circule avec insistance, même si elle se heurte pour l’instant au refus des principaux partis d’opposition.

Selon des sources proches de Matignon, des tractations seraient déjà en cours avec certains ténors comme le maire PS du Mans Stéphane Le Foll ou encore l’ancien ministre de l’Économie LR Bruno Le Maire, séduit par le profil « modéré » de Bayrou. Mais l’exercice s’annonce périlleux, tant les fractures politiques paraissent béantes à deux ans de la présidentielle.

Une chose est sûre : en choisissant de miser sur un vieux routier de la politique, Emmanuel Macron prend un risque calculé pour tenter de reprendre la main. Reste à savoir si l’attelage inédit « Macron-Bayrou » résistera aux tempêtes à venir ou si, comme en 2017, la lune de miel tournera vite court. Les prochaines semaines s’annoncent en tout cas décisives pour l’avenir du quinquennat.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.