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Nicolas Sarkozy Lance Son Journal d’un Prisonnier à Paris

Ce mercredi à Paris, Nicolas Sarkozy a été acclamé par des centaines de supporters lors du lancement de son livre "Journal d'un prisonnier". L'ex-président y raconte ses 20 jours en cellule, mais certaines familles de victimes du DC-10 dénoncent une réécriture de l'histoire. Qu'a-t-il vraiment dit sur l'extrême droite ?

Imaginez un ancien président de la République française, condamné à une peine de prison ferme, qui se retrouve derrière les barreaux pour la première fois de l’histoire de la Ve République. Ce scénario, qui semblait inimaginable il y a encore peu, est devenu réalité pour Nicolas Sarkozy. Mercredi, il a choisi Paris pour présenter son ouvrage qui relate ces jours inédits passés en détention.

Un lancement sous haute tension

La scène se déroule dans une grande librairie du quartier chic de la capitale. Des centaines de personnes font la queue, certaines depuis l’aube, pour obtenir une dédicace. Les cris de « Nicolas ! Nicolas ! » fusent de toutes parts. Pour beaucoup de ses partisans, cet événement dépasse largement le simple lancement d’un livre : il s’agit d’un moment de soutien à un homme qu’ils estiment victime d’une justice trop sévère.

Parmi la foule, un jeune étudiant de 20 ans confie son admiration sans retenue. Il voit en l’ancien chef de l’État le « dernier grand président » et refuse de croire à l’injustice dont il a été victime. Ce soutien populaire contraste avec d’autres réactions bien plus hostiles.

Une interruption marquante par les Femen

Soudain, deux militantes du groupe Femen surgissent et scandent des slogans virulents : « Nicolas, casse-toi pauv’ con ! Ta place est en prison ! ». L’allusion à la célèbre phrase prononcée par Sarkozy en 2008 est claire. La police intervient rapidement et les manifestantes sont interpellées. Cet incident rappelle à quel point le nom de l’ancien président continue de susciter des passions extrêmes, qu’elles soient positives ou négatives.

Ce bain de foule, entre acclamations et provocations, illustre parfaitement la polarisation qui entoure encore Nicolas Sarkozy plusieurs années après la fin de son mandat.

Le livre : un récit intime et politique

Intitulé Journal d’un prisonnier, l’ouvrage de 216 pages est paru exactement un mois après sa remise en liberté sous contrôle judiciaire, le 10 novembre. Il s’agit d’un témoignage personnel sur les trois semaines passées à la prison de la Santé, du 21 octobre au 10 novembre.

Le premier jour de son incarcération, l’ancien président raconte s’être agenouillé pour prier. Un geste qui marque le ton du livre : celui d’un homme confronté à une expérience qu’il n’aurait jamais imaginée. Le récit alterne entre moments d’introspection, descriptions de la vie carcérale et réflexions politiques.

Édité par une maison d’édition appartenant à un milliardaire conservateur, le livre bénéficie d’une visibilité importante dès sa sortie. Il s’est rapidement retrouvé en tête des ventes et a suscité de nombreux débats.

Un virage assumé vis-à-vis de l’extrême droite

L’un des passages les plus commentés concerne la relation avec le Rassemblement national. Interrogé par Marine Le Pen sur la possibilité d’un nouveau « front républicain » contre l’extrême droite, Nicolas Sarkozy répond sans ambiguïté : « Non, et de surcroît je l’assumerai en prenant le moment venu une position publique sur le sujet ».

Cette déclaration marque un tournant. Elle rompt avec la ligne traditionnelle de la droite républicaine qui refusait toute alliance avec le RN. Elle ouvre la voie à des rapprochements futurs, même si aucun accord formel n’est annoncé pour l’instant.

Ce positionnement suscite immédiatement des réactions contrastées. Certains y voient une stratégie pour rester influent dans un paysage politique fragmenté, d’autres une trahison des valeurs républicaines.

Les familles des victimes du DC-10 se disent « affligées »

Le livre consacre également plusieurs pages à l’audition des proches des victimes de l’attentat du DC-10 d’UTA. Cet attentat, survenu le 19 septembre 1989, avait fait 170 morts. Le tribunal correctionnel de Paris a reconnu Nicolas Sarkozy coupable d’avoir laissé ses collaborateurs négocier un financement libyen en échange d’un possible assouplissement de la situation judiciaire d’un responsable libyen condamné pour cet attentat.

L’ancien président qualifie ces auditions de « moments les plus émouvants » tout en se disant « affecté par la violence de certains propos » à son égard. Il se présente presque comme une victime de cette confrontation.

« Une fois encore, Nicolas Sarkozy inverse les rôles, faisant croire qu’il serait la véritable victime, celle de la douleur des familles du DC-10. C’est un choix assumé : déformer les faits et escamoter la vérité. »

Collectif « Les Filles du DC-10 »

Le collectif des filles, mères et sœurs des victimes a réagi très vivement à ce passage. Elles estiment que l’ancien président cherche à détourner l’attention de sa propre responsabilité dans l’affaire.

Le contexte judiciaire de l’affaire libyenne

Le 19 septembre 2025, Nicolas Sarkozy a été condamné à cinq ans de prison pour association de malfaiteurs dans le financement libyen de sa campagne de 2007. Il a purgé 20 jours avant d’être libéré sous contrôle judiciaire en attendant l’appel.

Il sera rejugé du 16 mars au 3 juin 2026 devant la cour d’appel de Paris. Tous les prévenus comparaîtront libres, y compris Alexandre Djouhri, dernier incarcéré dans ce dossier, remis en liberté mercredi.

Par ailleurs, l’ancien chef de l’État est définitivement condamné dans deux autres affaires : un an de prison ferme pour corruption et trafic d’influence dans l’affaire des écoutes, et un an dont six mois ferme dans l’affaire Bygmalion pour financement illégal de sa campagne de 2012.

Une détention historique et ses conséquences

La détention de Nicolas Sarkozy marque un précédent dans l’histoire de la République. Jamais un ancien président n’avait été incarcéré, même pour une courte période. Cet événement a suscité de vifs débats sur l’égalité devant la justice et le traitement réservé aux hautes personnalités politiques.

Pour ses partisans, cette incarcération symbolise une justice « instrumentalisée » contre un opposant. Pour ses détracteurs, elle représente enfin l’application de la loi à tous, sans exception.

L’impact sur la scène politique française

Le lancement du livre intervient à un moment où la droite française cherche à se repositionner. La déclaration de Nicolas Sarkozy sur le refus du front républicain pourrait influencer les stratégies des Républicains et ouvrir la voie à des alliances impensables il y a encore quelques années.

Le livre devient ainsi bien plus qu’un simple témoignage personnel : il est perçu comme une prise de position politique majeure, susceptible de redessiner les contours de l’opposition à Emmanuel Macron et au Rassemblement national.

Un livre qui divise et qui marque

En quelques jours, Journal d’un prisonnier est devenu l’un des livres politiques les plus commentés de l’année. Il suscite autant d’admiration que de colère. Les uns saluent le courage de l’ancien président, les autres dénoncent une tentative de réhabilitation.

Ce qui est certain, c’est que Nicolas Sarkozy reste au centre de l’actualité politique française. Son livre ne fait pas que raconter trois semaines de détention : il pose des questions sur la justice, la politique et l’avenir de la droite.

Qu’il soit perçu comme un martyr ou comme un condamné, l’ancien président continue de polariser l’opinion. Et ce lancement à Paris n’est sans doute que le début d’une longue série de débats autour de son parcours et de son héritage.

À l’heure où la France traverse une période d’incertitude politique, ce livre pourrait bien devenir un élément clé pour comprendre les évolutions à venir.

Le parcours de Nicolas Sarkozy, entre triomphes électoraux et revers judiciaires, continue d’écrire l’histoire politique contemporaine. Et ce Journal d’un prisonnier en est sans doute l’un des chapitres les plus inattendus.

La publication de cet ouvrage et son lancement mouvementé montrent que, même après avoir quitté le pouvoir, l’ancien président reste capable de mobiliser les passions et de faire parler de lui comme au premier jour.

Le débat est lancé. Et il ne fait que commencer.

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