Quand les lumières du court Simonne-Mathieu se sont tamisées, une silhouette familière s’est avancée, raquette en main, le cœur lourd. Nicolas Mahut, à 43 ans, a livré son dernier match à Roland-Garros, un tournoi qui a marqué sa carrière autant que ses émotions. Ce n’était pas une simple défaite en double face à la paire italienne Bolelli-Vavassori, mais un adieu vibrant, ponctué de larmes contenues et d’un hommage poignant. Comment un joueur, blessé et diminué, a-t-il transformé ce moment en une célébration de son héritage ?
Un Dernier Tour d’Honneur à Roland-Garros
Le 30 mai 2025, Nicolas Mahut a foulé une dernière fois la terre battue parisienne. Accompagné de son fidèle partenaire Pierre-Hugues Herbert, il a affronté un défi de taille : la paire italienne Simone Bolelli et Andrea Vavassori. Malgré une préparation limitée par une blessure qui l’a tenu éloigné des courts pendant près de dix mois, Mahut a tenu à être présent. « J’ai repris l’entraînement il y a seulement un mois », a-t-il confié, la voix empreinte de fierté et de nostalgie.
Le score final, 7-6 (7/2), 6-2, n’a pas reflété l’intensité émotionnelle du moment. Sur le court, entouré de figures emblématiques du tennis français, Mahut a vu sa carrière défiler sur l’écran géant : ses titres juniors à Wimbledon, ses quatre titres en simple ATP, ses 37 sacres en double, dont les quatre en Grand Chelem. Un moment fort a été la mention de son match épique contre John Isner à Wimbledon en 2010, perdu 70-68 au cinquième set après trois jours de combat.
Une Carrière Forgée dans la Résilience
La carrière de Nicolas Mahut est un témoignage de persévérance. Né à Angers, il s’est d’abord illustré en simple, remportant quatre titres ATP, mais c’est en double qu’il a écrit les plus belles pages de son histoire. Avec Pierre-Hugues Herbert, il a formé l’une des paires les plus redoutables du circuit, décrochant des titres dans chacun des tournois du Grand Chelem. Leur complicité, mêlée de talent brut et de stratégie affûtée, a redéfini le double moderne.
« Très honnêtement, je ne pouvais pas espérer mieux. C’était magnifique d’être sur le court avec Pierre-Hugues. »
Nicolas Mahut, après son dernier match à Roland-Garros
Son parcours ne se limite pas aux trophées. Mahut a incarné l’esprit d’équipe à travers ses 18 sélections en Coupe Davis, où il a porté haut les couleurs françaises. Son engagement, même face à des adversaires plus jeunes et mieux classés, a inspiré des générations de joueurs. Mais c’est peut-être son duel historique contre John Isner qui reste gravé dans les mémoires, un marathon de 11 heures et 5 minutes qui a redéfini les limites de l’endurance au tennis.
Le Match qui a Marqué l’Histoire
En 2010, à Wimbledon, Nicolas Mahut et John Isner ont livré le match le plus long de l’histoire du tennis. Étiré sur trois jours, ce premier tour a vu les deux joueurs s’affronter dans un cinquième set dantesque, conclu sur le score de 70-68 en faveur de l’Américain. Ce moment, bien que synonyme de défaite, a fait de Mahut une légende. « Avec John, nous avons décidé d’en rire », a-t-il déclaré des années plus tard, transformant cette épreuve en une anecdote devenue culte.
Fait marquant : Le match Mahut-Isner a nécessité la création d’une nouvelle règle à Wimbledon, introduisant un tie-break au cinquième set pour éviter de tels marathons à l’avenir.
Ce duel, suivi par des millions de spectateurs, a transcendé le sport. Il a montré que perdre peut parfois être aussi glorieux que gagner. Mahut, avec son fair-play et son humour, a su tirer de cette expérience une force qui l’a porté tout au long de sa carrière.
Un Adieu Chargé d’Émotion
Sur le court Simonne-Mathieu, l’hommage rendu à Mahut a été à la hauteur de son parcours. Entouré de Gilles Moretton, président de la Fédération française de tennis, et d’Amélie Mauresmo, directrice du tournoi, il a été ovationné par un public conquis. « J’ai eu quelques larmes, mais j’étais très heureux », a-t-il partagé, soulignant l’importance de ce moment partagé avec son partenaire de longue date, Pierre-Hugues Herbert.
La programmation sur un court prestigieux, loin des terrains annexes, a ajouté une touche de magie à cet adieu. Mahut a apprécié l’effort des organisateurs : « Ils ont fait en sorte d’avoir un beau terrain. C’était soit le court 14, soit le Simonne-Mathieu. » Ce choix reflète le respect qu’inspire ce joueur, dont la carrière est un modèle de détermination.
Les Projets d’Avenir de Mahut
Malgré cet adieu à Roland-Garros, Nicolas Mahut n’en a pas fini avec le tennis. Il envisage de poursuivre sa carrière jusqu’à la fin de l’année 2025, avec plusieurs tournois en ligne de mire. Parmi ses projets :
- Wimbledon : Associé à Quentin Halys, Mahut espère briller sur le gazon londonien, où il a déjà écrit l’histoire.
- Gstaad : Une possible participation avec un joueur suisse, pour un dernier tour en Europe.
- US Open : Une éventuelle dernière danse à New York, bien que rien ne soit encore confirmé.
- Paris : Un retour potentiel pour clore sa carrière, peut-être aux côtés de Herbert, en fonction des sélections en Coupe Davis.
« J’espère que l’on rejouera ensemble, mais on ne sait pas du tout », a-t-il ajouté, laissant planer un suspense sur une possible réunion avec Herbert. Cette incertitude ajoute une touche de mélancolie à son départ de Roland-Garros, mais aussi une promesse d’autres moments forts à venir.
L’Héritage d’un Champion
Le parcours de Nicolas Mahut dépasse les simples statistiques. Avec 37 titres en double, il se place parmi les meilleurs spécialistes de la discipline. Son partenariat avec Pierre-Hugues Herbert a redonné ses lettres de noblesse au double français, souvent éclipsé par le simple. Ensemble, ils ont remporté l’Open d’Australie, Roland-Garros, Wimbledon et l’US Open, une prouesse rare.
| Tournoi | Année | Partenaire |
|---|---|---|
| Roland-Garros | 2016 | Pierre-Hugues Herbert |
| Wimbledon | 2016 | Pierre-Hugues Herbert |
| US Open | 2015 | Pierre-Hugues Herbert |
| Open d’Australie | 2019 | Pierre-Hugues Herbert |
Cet héritage ne se limite pas aux trophées. Mahut a inspiré par son humilité et sa capacité à transformer les défaites en leçons. Son match contre Isner, ses batailles en Coupe Davis, et même ses apparitions décalées, comme dans une publicité en tutu rose pour promouvoir la compétition, ont fait de lui un personnage aimé du public.
Un Impact au-delà des Courts
Nicolas Mahut n’est pas seulement un champion, c’est aussi une figure qui a su toucher les cœurs. Sa capacité à rester authentique, même dans les moments les plus difficiles, a fait de lui un modèle pour les jeunes joueurs. Lors de son dernier match à Roland-Garros, les spectateurs n’ont pas seulement applaudi un joueur, mais un homme qui a incarné des valeurs de persévérance, de camaraderie et de passion pour le tennis.
« C’était très important d’être sur le court, d’être avec Pierre-Hugues. C’était magnifique. »
Nicolas Mahut, sur son dernier match à Roland-Garros
Son influence s’étend également à la nouvelle génération. En participant à des initiatives caritatives, comme la vente aux enchères pour l’association Premiers de Cordée, où une de ses raquettes a contribué à récolter des fonds pour les enfants malades, Mahut a montré que le sport peut être un vecteur de solidarité.
Pourquoi Mahut Restera dans les Mémoires
Ce qui rend Nicolas Mahut unique, c’est sa capacité à transformer chaque moment, même les plus douloureux, en une célébration du tennis. Sa défaite à Wimbledon en 2010 n’a pas été une fin, mais un début. Elle a révélé un joueur capable de repousser les limites physiques et mentales. Ses titres en double, remportés avec une complicité rare avec Herbert, ont montré que le tennis est aussi un sport d’équipe.
Son adieu à Roland-Garros n’est pas une fin, mais une transition. À 43 ans, Mahut envisage encore de jouer, de transmettre, et peut-être de coacher. Son histoire est celle d’un joueur qui a su perdre avec panache, gagner avec humilité, et inspirer avec authenticité.
Un champion se mesure non pas à ses victoires, mais à la trace qu’il laisse dans le cœur des fans.
Alors que Nicolas Mahut s’éloigne de la terre battue parisienne, il laisse derrière lui un héritage qui continuera d’inspirer. Son dernier regard vers les gradins, empreint de gratitude, restera gravé dans les mémoires des amateurs de tennis. Et si ce n’était qu’un au revoir ?
