Fini les logements vacants squattés à Nice ? C’est en tout cas l’ambition affichée par la municipalité avec son nouveau dispositif anti-intrusion pour le moins radical. Près de 40 appartements inoccupés de la ville seront bientôt équipés d’un système déclenchant d’épaisses fumées en cas d’effraction, rendant l’air irrespirable pour les éventuels squatteurs. Une mesure coup de poing, à l’image de la politique sécuritaire assumée par le maire, mais qui soulève aussi son lot d’interrogations.
Un dispositif inédit pour sécuriser les logements vacants
Face à la problématique récurrente des squats dans les logements vides, la ville de Nice a donc décidé d’expérimenter une approche novatrice. Objectif : rendre l’occupation illégale impossible grâce à un système déclenchant des fumées très denses dès qu’une effraction est détectée. Les squatteurs potentiels se retrouveraient ainsi rapidement dans l’incapacité de rester dans les lieux, l’air devenant irrespirable.
Concrètement, une quarantaine d’appartements actuellement inoccupés, répartis dans différents quartiers de la ville, seront équipés de ce dispositif expérimental dans les prochaines semaines. Il s’agira de logements particulièrement exposés aux intrusions, de par leur emplacement ou leurs caractéristiques.
Un partenariat public-privé pour muscler la lutte anti-squats
Pour mener à bien ce projet pilote, la municipalité niçoise s’est associée à une entreprise spécialisée dans les solutions de sécurité innovantes. Le système anti-squats par fumées irrespirables est une exclusivité de cette société, qui mise sur cette approche dissuasive pour proposer une alternative aux méthodes classiques jugées insuffisantes.
Notre technologie permet une protection efficace des locaux vacants contre les occupations illégales, en rendant leur accès et leur maintien impossibles, tout en respectant l’intégrité des lieux.
Explique le dirigeant de l’entreprise partenaire
Les services de la ville ont travaillé en lien étroit avec la société pour définir les modalités de cette expérimentation grandeur nature. Les logements concernés ont été sélectionnés selon des critères précis et les installations seront suivies de près pour évaluer l’efficacité du dispositif sur le terrain.
Le procédé soulève des inquiétudes
Si la municipalité met en avant sa volonté de lutter avec fermeté contre les squats qui gangrènent certains quartiers, cette approche musclée ne fait pas l’unanimité. Des voix s’élèvent pour pointer du doigt les risques liés à l’utilisation de fumées potentiellement toxiques dans des lieux d’habitation.
Les opposants au projet s’inquiètent des conséquences sanitaires pour les éventuels intrus, mais aussi pour le voisinage en cas de déclenchement accidentel ou de mauvaise maîtrise des fumées. Certains redoutent également que ce type de dispositif ne se généralise et finisse par se retrouver installé dans des logements occupés, posant alors de sérieuses questions de sécurité et de légalité.
Sous couvert de lutte anti-squats, on assiste à une dérive sécuritaire dangereuse qui fait primer la protection des biens sur celle des personnes. Cela ouvre la porte à de potentielles dérives liberticides.
Dénonce un élu local d’opposition
Un dispositif encadré mais qui pose question
Face aux critiques, la mairie se veut rassurante et assure que toutes les précautions sont prises. Le dispositif anti-squats par fumées serait inoffensif pour la santé selon les dires de l’entreprise conceptrice. Les quantités libérées et la composition des fumées seraient étudiées pour garantir un effet dissuasif sans danger.
De plus, la municipalité annonce que l’expérimentation sera strictement encadrée et fera l’objet d’une évaluation rigoureuse. Un comité de suivi associant élus, techniciens, représentants des forces de l’ordre et associations de riverains supervisera le déploiement et l’utilisation du système.
Les enjeux de la lutte anti-squats
Au-delà du cas niçois, cette expérimentation révèle les tensions autour des squats de logements vacants. Si la loi ASAP de décembre 2020 a durci les sanctions contre les squatteurs, le phénomène persiste, notamment dans les grandes villes marquées par la crise du logement comme Nice.
Pour les propriétaires et les pouvoirs publics, il s’agit de protéger un parc immobilier parfois fragilisé et d’éviter la constitution de zones de non-droit. Mais les associations pointent aussi l’insuffisance de solutions pérennes de relogement pour les personnes précaires contraintes d’occuper des locaux vides.
À l’heure du mal-logement persistant, la question des squats cristallise de multiples enjeux : droit de propriété, besoins des habitants les plus fragiles, gestion de la vacance immobilière, maintien de l’ordre public… Autant de défis complexes pour lesquels le recours à la technologie semble insuffisant.
Les mois à venir permettront de voir si l’expérimentation niçoise tient ses promesses ou confirme les craintes de ses détracteurs. Une chose est sûre : la problématique des squats est loin d’être réglée et continuera de susciter le débat, à Nice comme ailleurs.