Depuis les rives de la bande de Gaza, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a lancé une offre fracassante ce mardi : 5 millions de dollars pour toute personne ramenant un otage détenu dans l’enclave palestinienne. Une proposition choc qui intervient après plus d’un an d’affrontements meurtriers entre Israël et le Hamas.
Une prime à double tranchant
Dans une vidéo diffusée par son bureau, M. Netanyahu apparaît en tenue militaire, casque et gilet pare-balles, le dos tourné à la Méditerranée. Filmé dans ce que les Israéliens nomment le corridor de Netzarim, une zone tampon qui coupe le nord de Gaza, il lance son appel :
“Toute personne qui nous ramènera un otage trouvera chez nous un moyen sûr, pour lui et sa famille, de sortir de Gaza. Nous donnerons également une récompense de cinq millions de dollars pour chaque otage.”
Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien
Une offre alléchante, doublée d’une menace à peine voilée envers ceux qui s’en prendraient aux captifs : “Quiconque ose faire du mal à nos otages est considéré comme mort. Nous vous poursuivrons et nous vous attraperons.” Le message est clair, mais soulève de nombreuses questions.
Un an après l’attaque du Hamas
Cette proposition intervient plus d’un an après l’attaque sans précédent menée par les commandos du Hamas le 7 octobre 2023. Lors de ce raid, 251 personnes avaient été enlevées en territoire israélien, le plus important kidnapping de masse de l’Histoire du conflit.
Selon l’armée israélienne, 97 otages seraient encore aux mains du mouvement islamiste, dont 34 considérés comme morts. Des chiffres invérifiables de source indépendante, le Hamas gardant le silence sur le sort des captifs.
Controverses et risques
Si l’annonce a suscité un immense espoir chez les proches des disparus, elle fait aussi l’objet de vives critiques. Certains y voient un encouragement à la délation et à la trahison au sein de la population gazaouie, déjà minée par les divisions.
D’autres s’inquiètent des risques pour la sécurité des otages, craignant des représailles du Hamas ou des tentatives désespérées pour toucher la prime. La faction armée pourrait aussi être tentée de procéder à de nouvelles captures pour faire monter les enchères.
Le pari risqué de Netanyahu
En se rendant à Gaza pour la quatrième fois depuis le début du conflit, et en s’enfonçant plus que jamais dans ce territoire dévasté, le « Bibi » joue une partition risquée. Il mise sur un coup d’éclat médiatique pour faire oublier les revers militaires et l’enlisement des négociations.
Mais cette stratégie pourrait aussi être perçue comme un aveu de faiblesse, et renforcer la position du Hamas qui réclame la levée du blocus en échange des captifs. Un donnant-donnant que refuse Netanyahu, déterminé à obtenir une « victoire claire » contre le groupe islamiste.
Les dessous d’une annonce tonitruante
Au delà de l’effet d’annonce, cette offre soulève de nombreuses zones d’ombre. Comment les intermédiaires pourraient-ils exfiltrer les otages sous haute surveillance ? Quelles garanties pour leur sécurité et celle de leur famille ? Et que penser de cette « porte de sortie » promise, alors que Gaza est soumise à un strict blocus israélien ?
Autant de questions qui restent en suspens et font douter de la faisabilité de ce plan. Certains y voient surtout une manœuvre politique de Netanyahu, en difficulté dans les sondages et contesté jusqu’au sein de son camp pour sa gestion du conflit.
Le Hamas à l’affût
Du côté du Hamas, pas de réaction officielle dans l’immédiat. Mais en coulisses, le mouvement islamiste suit de près la surenchère israélienne, prêt à en tirer avantage dans ce bras de fer politico-militaire qui semble parti pour durer.
Car malgré ses déclarations martiales, Netanyahu sait qu’une opération militaire d’envergure pour libérer les otages serait extrêmement périlleuse, aussi bien pour les captifs que pour les soldats. Une option qu’il ne peut envisager qu’en dernier recours, sous peine d’un camouflet politique fatal.
En attendant, comme un aveu d’impuissance, il mise donc sur la carotte financière et l’appel à la délation, conscient des failles de son ennemi mais aussi de sa détermination. Une partie d’échecs complexe dont l’issue reste plus que jamais incertaine, et dont les otages pourraient bien être les premières victimes collatérales.