Le Mozambique traverse une période de troubles sans précédent suite aux élections générales du 9 octobre dernier. Alors que les résultats officiels accordent une large victoire au parti au pouvoir, le Frelimo, l’opposition crie au scandale et dénonce un scrutin entaché de fraudes massives. Depuis l’annonce des résultats, le pays est le théâtre de violents affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, plongeant plusieurs villes dans le chaos.
Un scrutin sous haute tension
Dès la proclamation des résultats le 24 octobre, accordant près de 71% des voix au candidat du Frelimo Daniel Chapo, l’opposition a immédiatement contesté le scrutin, dénonçant de multiples irrégularités et un processus « volé ». Venancio Mondlane, principal opposant arrivé officiellement deuxième avec 20% des suffrages, revendique la victoire et appelle à la mobilisation.
Très vite, la contestation s’est muée en affrontements violents. Selon des sources concordantes, au moins onze personnes auraient perdu la vie lors de manifestations réprimées par la police dans plusieurs villes du pays. Malgré cela, l’opposition maintient la pression, Venancio Mondlane appelant à une grève nationale et à des manifestations jusqu’au 7 novembre.
Maputo et Nampula, épicentres de la contestation
Ce samedi, la capitale Maputo a été le théâtre de nouveaux heurts entre policiers et manifestants rassemblés pour dénoncer les résultats. Gaz lacrymogènes et balles en caoutchouc ont été utilisés pour disperser la foule, selon des témoins. Des scènes similaires se sont déroulées à Nampula, grande ville du nord du pays et bastion de l’opposition.
D’après un chauffeur de taxi sur place, près de 500 personnes seraient descendues dans les rues de Nampula pour protester, bloquant des axes routiers. La réponse policière aurait été brutale, avec usage de gaz et de balles réelles pour disperser les contestataires. Des blessés seraient à déplorer, touchés par des tirs dont la nature exacte reste à confirmer.
La province de Nampula est en plein chaos.
Plataforma Decide, mouvement local de la société civile
Une situation explosive
Ailleurs dans la province, la tension est à son comble. Dans la ville de Namialo, à 95 km de Nampula, plus d’une centaine de manifestants ont érigé des barricades de pneus enflammés. Un important dispositif policier aurait été déployé, faisant craindre de nouveaux affrontements.
Face à cette situation, l’opposition ne désarme pas et maintient la pression. Un recours a été déposé devant le Conseil constitutionnel pour exiger un nouveau comptage des voix. La plus haute juridiction du pays a demandé à la commission électorale de lui transmettre les résultats de bureaux de vote de 7 provinces, signe de possibles irrégularités à grande échelle.
Inquiétudes de la communauté internationale
Les observateurs internationaux ne cachent pas leurs préoccupations. La mission de l’Union européenne a fait état d’« altérations injustifiées de résultats », constatant des incohérences dans un tiers des bureaux de vote observés. L’ONG anticorruption Public Integrity Center estime qu’il s’agit des élections « les plus frauduleuses depuis 1999 ».
Alors que la crise post-électorale s’aggrave de jour en jour, la communauté internationale appelle toutes les parties à la retenue. L’Union africaine et les Nations Unies ont exprimé leur profonde inquiétude, exhortant au dialogue pour sortir de l’impasse. Mais sur le terrain, la situation semble pour l’heure totalement bloquée, laissant craindre une escalade incontrôlable de la violence.
Face à un pouvoir qui s’arc-boute sur des résultats plus que douteux, et une opposition déterminée à en découdre, difficile de voir une issue rapide à cette crise post-électorale. Le Mozambique, déjà l’un des pays les plus pauvres de la planète, pourrait rapidement basculer dans le chaos si un compromis n’est pas trouvé. Un nouveau test pour la fragile démocratie de ce pays d’Afrique australe.