En plein cœur de la capitale mozambicaine Maputo, une spectaculaire évasion de masse s’est produite ce mercredi après-midi à la faveur des troubles qui secouent le pays depuis trois jours. Pas moins de 1534 détenus de la prison de haute sécurité, située à une quinzaine de kilomètres du centre-ville, ont réussi à s’échapper, semant la panique dans la cité.
Selon les informations communiquées par Bernardino Rafael, le chef de la police nationale, lors d’une conférence de presse en soirée, de violents affrontements ont éclaté entre les fugitifs et le personnel pénitentiaire. Le bilan provisoire fait état de 33 évadés tués et 15 blessés. Face à l’ampleur de la catastrophe sécuritaire, l’armée a été appelée en renfort pour traquer les centaines de prisonniers en cavale.
Des jihadistes parmi les fugitifs
Mais ce qui inquiète particulièrement les autorités, c’est qu’une trentaine de détenus liés aux groupes armés jihadistes qui sévissent depuis 7 ans dans la province du Cabo Delgado, dans le nord du pays, figurent parmi les évadés. «Nous sommes particulièrement préoccupés par cette situation», a commenté le chef de la police, conscient du danger que représentent ces individus.
D’après les premiers éléments de l’enquête, des manifestants se sont approchés de la prison et ont créé un climat de confusion propice à l’évasion. Profitant de l’agitation ambiante, des détenus ont réussi à faire tomber un mur d’enceinte et à s’enfuir en masse. Un véritable scénario catastrophe pour les forces de l’ordre débordées.
Maputo sous haute tension
Cette évasion intervient dans un contexte de vives tensions au Mozambique, trois jours après la confirmation de la victoire du parti au pouvoir, le Frelimo, aux élections générales du 9 octobre dernier. Malgré les irrégularités soulevées par de nombreux observateurs, le Conseil constitutionnel a validé lundi la réélection du président sortant Daniel Chapo avec 65,17% des voix.
Depuis, l’opposition conteste avec virulence ce qu’elle considère comme une «élection volée» et appelle à manifester. Barricades, actes de vandalisme, incendies de véhicules… La capitale Maputo est en proie au chaos. En plus des bâtiments publics et commerces déjà saccagés depuis lundi, plusieurs ambulances et un dépôt de médicaments ont été la cible des casseurs ce mercredi.
Un pays sous pression
Le Mozambique traverse une période particulièrement troublée. Outre la contestation post-électorale qui s’étend, le pays doit faire face à une insurrection jihadiste dans sa région nord depuis 2017. Attaques contre les villages, décapitations, enlèvements… Les violences ont déjà fait plus de 3500 morts selon l’ONG ACLED et provoqué le déplacement de 820.000 personnes.
Les troubles actuels viennent s’ajouter à un tableau déjà bien sombre. Selon plusieurs ONG, la répression des manifestations antigouvernementales aurait coûté la vie à au moins 150 personnes au cours des deux derniers mois. Des bilans impossibles à vérifier de source indépendante.
Course contre la montre pour les autorités
Face au chaos ambiant, les autorités tentent de reprendre la main. La police et l’armée ont lancé une vaste chasse à l’homme pour tenter de rattraper un maximum de fugitifs. Pour l’heure, environ 150 prisonniers auraient été repris selon un bilan provisoire.
Mais avec encore plus d’un millier d’évadés, dont des jihadistes, en liberté, la partie est loin d’être gagnée. D’autant que certains pourraient chercher à rejoindre leurs bases dans le nord du pays ou à se fondre dans la nature de la capitale.
La crainte d’une recrudescence des violences et des actions terroristes est dans tous les esprits. Les prochains jours s’annoncent décisifs pour le Mozambique, suspendu entre colère, peur et incertitude.