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Mozambique : La reprise du projet gazier géant toujours en suspens

Le sort du méga-projet gazier Mozambique LNG reste en suspens. Malgré des progrès sur le terrain, Total attend le feu vert pour relancer ce chantier à 20 milliards de dollars, vital pour le pays. Mais l'insécurité persiste dans la région...

Dans le nord du Mozambique, le sort du plus grand projet gazier d’Afrique reste en suspens. Lancé en 2019, le méga-chantier Mozambique LNG porté par le groupe français TotalEnergies a été stoppé net en mars 2021, suite à une violente attaque jihadiste à proximité du site. Deux ans plus tard, malgré des progrès sécuritaires, les conditions ne sont toujours pas réunies pour relancer les opérations, a indiqué mercredi la compagnie pétrolière.

Un projet vital pour le Mozambique

Avant sa suspension, Mozambique LNG s’annonçait comme un projet transformateur pour ce pays d’Afrique australe, l’un des plus pauvres au monde. Avec un investissement colossal de 20 milliards de dollars, il prévoit d’exploiter les immenses réserves gazières découvertes au large des côtes de la province du Cabo Delgado et d’exporter du gaz naturel liquéfié (GNL), principalement vers les marchés asiatiques.

Pour le Mozambique, les retombées attendues sont énormes : des dizaines de milliers d’emplois, des milliards de dollars de recettes fiscales, un bond du PIB… De quoi changer la donne pour ce pays encore largement dépendant de l’aide internationale. Mais tout a été remis en question par la montée de l’insécurité.

L’ombre du jihadisme

Depuis 2017, la province du Cabo Delgado est en proie à une insurrection jihadiste sanglante. Affiliés à l’État islamique, les groupes armés multiplient les attaques contre les civils et les forces de sécurité. L’attaque contre la ville de Palma en mars 2021, proche du site gazier, a précipité la mise en pause du projet, Total évoquant un cas de « force majeure ».

Depuis, les forces mozambicaines, épaulées par des troupes rwandaises et de la SADC, ont regagné du terrain. Mais la situation reste précaire selon les experts. Et de nouveaux incidents sécuritaires ne sont pas à exclure.

Lourdes accusations contre les militaires

Pour corser le tout, de graves accusations ont été portées contre les soldats déployés pour sécuriser le site gazier. Selon une enquête du média Politico relayée en septembre, certains se seraient rendus coupables d’exactions contre les populations locales en 2021, après l’attaque de Palma.

Des ONG ont appelé à une enquête indépendante sur ces allégations de « massacre de civils ». De son côté, la filiale de Total a déclaré n’avoir trouvé aucune preuve pour les corroborer à ce stade. Mais l’affaire jette une ombre sur le projet.

Incertitudes politiques

Sur le plan politique aussi, la situation du Mozambique suscite des inquiétudes. La réélection en octobre du président Filipe Nyusi, au pouvoir depuis 2015, a été vivement contestée par l’opposition. Des manifestations meurtrières ont ensanglanté le pays pendant des semaines.

D’après une source proche du dossier, le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné devait rencontrer le chef de l’État mozambicain après le scrutin. Mais cette entrevue n’a pas encore eu lieu, alimentant les spéculations sur l’avenir du projet gazier.

Feu vert des banques attendu

Si Total se montre prudent, officiellement il n’est pas question d’abandonner Mozambique LNG. Patrick Pouyanné a récemment estimé qu’une relance dès 2024 était envisageable, en vue d’un démarrage de la production à l’horizon 2029.

Mais le géant français ne pourra pas redémarrer sans l’accord de ses partenaires financiers. Il attend notamment le feu vert de trois agences de crédit publiques pour boucler le financement.

La Paix et la sécurité, conditions essentielles

Au final, la reprise de ce chantier hors norme dépendra surtout de l’évolution de la situation sécuritaire et politique au Mozambique. Malgré des « progrès sur le terrain », Total juge qu’il est encore trop tôt pour retourner dans le Cabo Delgado.

La priorité est de rétablir la paix et la sécurité dans le Cabo Delgado et de lever la force majeure

a martelé le groupe dans un communiqué.

Sans un retour durable de la stabilité, difficile d’imaginer les majors pétrolières se réengager dans cette région reculée et volatile. L’espoir d’une manne gazière transformatrice pour le Mozambique reste donc suspendu à une amélioration pérenne de la situation. Un défi de taille pour les autorités de Maputo.

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