C’est dans une atmosphère lourde et endeuillée que des milliers de Mozambicains se sont rassemblés mercredi près de Maputo pour rendre un dernier hommage à Elvino Dias. Cet avocat, qui représentait le principal opposant du pays, a été froidement assassiné alors qu’il s’apprêtait à déposer un recours pour dénoncer des fraudes massives lors des élections générales d’octobre.
Un cortège funéraire impressionnant a accompagné la dépouille d’Elvino Dias jusqu’à sa dernière demeure. Ce déferlement de solidarité n’est que le prélude à deux journées de mobilisation nationale appelées par Venancio Mondlane, le candidat malheureux à la présidentielle. Cet ancien animateur, désormais à la tête du petit parti Podemos, entend « paralyser » le pays pour protester contre ce qu’il estime être un « hold-up électoral » du pouvoir en place.
Des élections entachées d’irrégularités et de violences
Le scrutin du 9 octobre, qui devait permettre de renouveler les institutions, s’est en effet déroulé dans des conditions pour le moins troubles. Les observateurs dépêchés par l’Union européenne ont relevé de nombreuses « altérations injustifiées des résultats » au niveau des bureaux de vote et des circonscriptions.
Mais plus grave encore, cette consultation démocratique a été marquée par une flambée de violences, dont l’assassinat d’Elvino Dias apparaît comme le tragique point d’orgue. Selon Venancio Mondlane, qui a dû se résoudre à ne pas assister aux funérailles pour des raisons de sécurité, ce meurtre porte indéniablement la marque du pouvoir :
« Cela ne fait aucun doute, ce sont les forces spéciales qui ont tué Elvino de 25 coups de feu »
a-t-il accusé dans une vidéo diffusée mardi, rejetant la thèse policière d’un crime passionnel.
Une mise en cause reprise par l’Union panafricaine des avocats, qui dit n’avoir « aucun doute » sur le fait qu’Elvino Dias a été ciblé en raison de son rôle d’avocat du parti Podemos.
Le spectre de nouvelles tensions politiques
Alors que la commission électorale doit proclamer les résultats définitifs jeudi, le Mozambique retient son souffle. Si la victoire du Front de libération du Mozambique (Frelimo), qui dirige sans partage le pays depuis son indépendance il y a près de 50 ans, ne fait guère de doute, l’opposition compte bien utiliser la rue pour contester sa légitimité.
Face à ces vents contraires, le gouvernement a appelé la population au calme. Mais dans ce contexte de suspicion exacerbée et de tensions politiques, nul ne peut dire avec certitude quelle tournure prendront les événements des prochains jours.
Une chose est sûre cependant : avec l’assassinat d’Elvino Dias, c’est une figure emblématique de la lutte pour la transparence et contre l’arbitraire qui disparaît. Un nouveau coup dur pour une démocratie mozambicaine déjà bien malmenée.
