Imaginez-vous forcé de quitter votre maison en pleine nuit, laissant derrière vous tout ce que vous avez construit, avec pour seule certitude la peur de ne pas survivre au lendemain. C’est la réalité brutale que vivent près de 60 000 personnes au Mozambique, chassées de leurs foyers en seulement deux semaines par une vague d’attaques jihadistes dans la province du Cabo Delgado. Cette région, riche en ressources gazières, est devenue le théâtre d’une insurrection violente menée par un groupe affilié à l’État islamique, plongeant des milliers de familles dans une crise humanitaire sans précédent.
Une Crise Humanitaire en Ébullition
Depuis fin juillet 2025, les districts de Muidumbe, Ancuabe et Chiure, dans le nord du Mozambique, sont devenus des zones de chaos. Les attaques, revendiquées par un groupe lié à l’État islamique, ont semé la terreur, poussant environ 57 034 personnes à fuir leurs villages. Ce chiffre, rapporté par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), illustre l’ampleur d’un drame qui n’avait pas atteint un tel niveau depuis février 2024, lorsque 98 000 individus avaient déjà abandonné Chiure sous la menace.
Chaque jour, de nouvelles familles arrivent dans des zones plus sûres, portant sur leurs épaules le peu qu’elles ont pu emporter. Mais les ressources pour les accueillir s’épuisent rapidement, et les organisations humanitaires peinent à répondre à une demande croissante.
« Des gens continuent d’arriver chaque jour des zones touchées par le conflit, et les acteurs humanitaires se préparent à venir en aide à près de 60 000 personnes dans les prochains jours. »
Paola Emerson, responsable du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU
Un Conflit aux Racines Profondes
Le Cabo Delgado, bien que riche en ressources naturelles, est une région où la pauvreté et les inégalités alimentent les tensions. Depuis le début de l’insurrection en 2017, les violences ont causé la mort de plus de 6 100 personnes, selon les données compilées par une organisation spécialisée dans les conflits. L’année dernière, 364 personnes ont perdu la vie dans ces affrontements, un chiffre qui, bien qu’inférieur aux années précédentes, reste alarmant.
L’attaque la plus marquante, survenue en mars 2021 à Palma, a laissé une cicatrice indélébile. Plus de 800 personnes y ont péri, et l’événement a conduit à la suspension d’un méga-projet gazier porté par une grande entreprise énergétique. Ce projet, d’un investissement de 20 milliards de dollars, est censé reprendre d’ici fin septembre 2025, mais la recrudescence des violences soulève des doutes sur sa viabilité.
Le saviez-vous ? Le Cabo Delgado abrite l’un des plus grands gisements de gaz naturel d’Afrique, mais les richesses potentielles contrastent avec l’extrême précarité de la population locale.
Une Réponse Humanitaire sous Tension
Face à l’afflux massif de déplacés, les efforts humanitaires sont à la croisée des chemins. Environ 30 000 personnes ont reçu une aide de première nécessité : nourriture, eau, abris temporaires et produits essentiels. Cependant, les besoins dépassent largement les capacités actuelles. Les organisations sur le terrain alertent sur un manque criant de moyens pour faire face à cette crise.
Le plan d’intervention humanitaire pour le Mozambique en 2025 n’est financé qu’à 19 %, une situation aggravée par la réduction des aides internationales, notamment après des coupes budgétaires de certains pays donateurs. Ce déficit financier limite la capacité des agences à fournir une assistance adéquate, laissant des milliers de personnes dans une situation de grande vulnérabilité.
« L’aide disponible n’est pas encore suffisante pour répondre aux besoins grandissants. »
Représentante du Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU
Les Défis d’un Retour à la Stabilité
Le Cabo Delgado est à un tournant. D’un côté, les richesses gazières attirent les investissements internationaux, avec la promesse de retombées économiques majeures. De l’autre, l’insécurité persistante menace non seulement la population, mais aussi les projets économiques qui pourraient transformer la région. La relance du terminal de gaz naturel liquéfié, prévue pour cet été, est un pari audacieux dans un contexte où la sécurité reste précaire.
Pour les habitants, la priorité est ailleurs : retrouver un semblant de normalité. Les déplacés, souvent des agriculteurs ou des pêcheurs, ont perdu leurs moyens de subsistance. Sans un soutien accru, leur situation risque de s’aggraver, avec des conséquences sociales et économiques à long terme.
Statistiques Clés | Chiffres |
---|---|
Déplacés depuis juillet 2025 | 57 034 |
Morts depuis le début du conflit | 6 100+ |
Financement du plan humanitaire 2025 | 19 % |
Un Appel à l’Action Internationale
La communauté internationale se trouve face à un dilemme : comment soutenir une région en crise tout en faisant face à des contraintes financières globales ? Les organisations humanitaires appellent à une mobilisation accrue pour combler le déficit de financement. Sans une réponse rapide, la situation risque de dégénérer, avec des répercussions sur la stabilité régionale.
Les habitants du Cabo Delgado, quant à eux, continuent de vivre dans l’incertitude. Leurs histoires, bien que souvent éclipsées par les enjeux économiques, rappellent l’urgence d’une action concertée pour protéger les plus vulnérables.
- Urgence humanitaire : Besoin immédiat de nourriture, eau et abris pour 60 000 déplacés.
- Financement insuffisant : Seulement 19 % des fonds nécessaires pour 2025 sont disponibles.
- Enjeux économiques : La relance du projet gazier pourrait être compromise par l’insécurité.
Vers un Avenir Incertain
Le Mozambique se trouve à la croisée des chemins. La richesse potentielle de ses ressources gazières contraste avec la détresse de sa population. Les violences jihadistes, loin de s’apaiser, continuent de déchirer le tissu social du Cabo Delgado, forçant des milliers de personnes à vivre dans la peur et l’instabilité.
Alors que les organisations humanitaires luttent pour répondre aux besoins immédiats, la question demeure : comment concilier développement économique et sécurité humaine dans une région aussi fragile ? La réponse, si elle existe, nécessitera un effort collectif, où l’aide internationale jouera un rôle clé.
Pour chaque personne déplacée, c’est une vie bouleversée, un avenir incertain. La crise du Cabo Delgado nous rappelle que derrière les chiffres, il y a des histoires humaines qui méritent d’être entendues.
En attendant, les 60 000 déplacés du Cabo Delgado continuent de chercher refuge, espérant un jour retrouver la paix. Leur résilience, face à une telle adversité, est un puissant rappel de l’urgence d’agir.