Les mines antipersonnel et les restes explosifs de guerre continuent de faire des ravages dans le monde, avec une hausse alarmante du nombre de victimes en 2023. Selon le rapport annuel de l’Observatoire des mines, au moins 5 757 personnes ont été tuées ou blessées l’an dernier, soit une augmentation de 20% par rapport à 2022. Derrière ces chiffres se cachent principalement des drames humains, puisque 84% des victimes sont des civils.
La Birmanie, épicentre de la crise des mines antipersonnel
Avec 1 003 victimes recensées, la Birmanie est devenue le pays le plus touché par les mines terrestres et les munitions non explosées en 2023, devant la Syrie (933 victimes), l’Afghanistan (651), l’Ukraine (580) et le Yémen (499). La situation s’est aggravée depuis le coup d’État militaire de février 2021, qui a déclenché de violents affrontements entre l’armée et de nombreux groupes rebelles à travers le pays.
D’après des sources proches du dossier, l’armée birmane utilise massivement les mines antipersonnel, notamment pour protéger des infrastructures stratégiques comme les tours de téléphonie mobile et les pipelines, régulièrement prises pour cible. Des preuves ont aussi été rassemblées sur l’usage de civils comme «guides» dans les champs de mines par les forces armées, en violation du droit humanitaire international.
Des groupes rebelles également impliqués
Mais la junte militaire n’est pas la seule responsable. Selon le rapport, les différents groupes qui s’opposent à elle ont saisi des mines «tous les mois entre janvier 2022 et septembre 2024, dans pratiquement toutes les régions du pays». Certains ont même reconnu directement poser des engins explosifs. L’Unicef a souligné en avril que «toutes les parties prenantes» avaient recours aux mines terrestres «sans discrimination».
Un lourd tribut pour les civils
Piégés au milieu des combats, les civils paient le plus lourd tribut. Ils représentent la grande majorité des victimes, soit:
- 1 983 morts
- 3 663 blessés
- 111 victimes dont le sort est inconnu
Et ces chiffres sont sans doute très en-dessous de la réalité. La collecte de données fiables est rendue extrêmement difficile par l’intensité des affrontements et les restrictions d’accès. Un expert de l’Observatoire des mines estime que le nombre réel pourrait être «le double ou le triple», décrivant un phénomène «massif».
La Birmanie, grand absent de la Convention d’Ottawa
164 États et territoires ont signé la Convention d’Ottawa sur l’interdiction et l’élimination des mines antipersonnel. Mais la Birmanie n’en fait pas partie. Cette absence de cadre légal facilite grandement la prolifération et l’usage de ces armes sur son sol, avec les terribles conséquences que l’on connaît pour les populations.
La communauté internationale doit intensifier la pression sur la Birmanie pour qu’elle renonce définitivement aux mines antipersonnel et rejoigne enfin la Convention d’Ottawa. C’est une question de vie ou de mort pour d’innombrables civils innocents.
Un diplomate occidental
Un fléau mondial persistant
Même si la Birmanie concentre à elle seule près d’un quart des victimes dans le monde, les mines antipersonnel restent une menace dans de nombreux autres pays ravagés par les conflits armés. On peut citer :
- La Syrie avec 933 victimes en 2023
- L’Afghanistan avec 651 victimes
- L’Ukraine avec 580 victimes, en lien avec l’invasion russe
- Le Yémen avec 499 victimes, théâtre d’une interminable guerre civile
Au total, une cinquantaine d’États sont concernés. Si le nombre de victimes directes des mines antipersonnel a légèrement augmenté (833 contre 628 en 2022), c’est surtout la hausse de 20% pour l’ensemble des engins explosifs terrestres qui inquiète.
Vers un monde sans mines antipersonnel ?
Pour l’Observatoire des mines et la Campagne internationale pour leur interdiction (ICBL), le chemin est encore long. Malgré des progrès réels, avec une baisse continue du nombre de victimes depuis le pic des années 1990, ces armes continuent de tuer et de mutiler bien après la fin des conflits.
Un nouveau sujet de préoccupation est apparu avec la décision des États-Unis de fournir des mines «non persistantes» à l’Ukraine pour renforcer ses défenses face à la Russie. Même équipées d’un dispositif d’autodestruction, elles restent une menace pour les civils aux yeux de l’ICBL, qui appelle Kiev à les refuser.
Dans ce contexte complexe, l’objectif d’un monde enfin débarrassé des mines antipersonnel semble encore lointain. Mais chaque vie épargnée, chaque tragédie évitée, est une victoire pour l’humanité. La mobilisation doit se poursuivre, sans relâche.