Le ciel s’assombrit pour Meta en Corée du Sud. Le géant américain de la tech, propriétaire de Facebook et Instagram, vient d’être lourdement sanctionné par les autorités sud-coréennes pour une affaire de collecte illégale de données sensibles concernant près d’un million d’utilisateurs. Une amende salée de 14 millions d’euros qui jette une lumière crue sur les pratiques discutables de l’entreprise en matière de respect de la vie privée.
Des données ultra sensibles exploitées sans accord
Selon la Commission de protection des données personnelles de Corée du Sud, Meta a enfreint les lois interdisant l’usage, sans consentement exprès, d’informations très personnelles telles que les opinions politiques, les croyances religieuses ou encore l’orientation sexuelle. L’entreprise aurait analysé en détail le comportement en ligne de ses utilisateurs, traquant les pages likées, les publicités cliquées, pour créer des profils publicitaires hyper ciblés.
Ces données sensibles, récoltées auprès d’environ 980 000 utilisateurs sud-coréens, auraient ensuite été revendues à quelque 4000 annonceurs, sans que les principaux intéressés n’en soient informés ou n’aient donné leur feu vert. Un véritable scandale d’exploitation illégale de données privées à l’échelle industrielle.
Meta joue la montre
Face à ces accusations accablantes, Meta fait profil bas et annonce qu’il “examinera attentivement cette décision une fois qu’il aura reçu le document”. Une manière de gagner du temps en attendant de mettre en place une stratégie de défense adaptée ?
Outre l’amende, le régulateur sud-coréen a ordonné à Meta de revoir de fond en comble ses pratiques en matière de traitement des informations sensibles, de renforcer la sécurité et de répondre avec diligence aux demandes d’accès des utilisateurs à leurs données personnelles. Une mise en demeure qui sonne comme un avertissement pour tous les géants du web opérant en Corée du Sud.
Le marché LGBTQ dans le viseur ?
Derrière ce vaste détournement de données personnelles se cache peut-être une volonté de mieux cibler et exploiter commercialement le marché LGBTQ en pleine croissance en Corée du Sud. Comme le souligne Vladimir Tikhonov, professeur d’études coréennes, malgré une législation encore discriminatoire, “les partenariats LGBT sont de plus en plus courants et acceptés” dans le pays. Un marché de niche en expansion rapide qui attise visiblement les convoitises.
La communauté LGBTQ coréenne a remporté une victoire juridique en juillet lorsqu’un tribunal a jugé discriminatoire le traitement différencié des couples de même sexe par les assureurs maladie de l’État.
AFP
Mais les mentalités évoluent doucement. Environ un quart de la population s’identifie comme chrétienne, et nombre de ces groupes religieux s’opposent farouchement, pour des raisons prétendument morales, à toute reconnaissance du mariage homosexuel. Un contexte sociétal complexe dont Meta a visiblement voulu tirer profit en exploitant sans vergogne les données personnelles de cette communauté.
Un électrochoc salutaire
Cette sanction record infligée à Meta aura au moins le mérite de remettre sur le devant de la scène la lancinante question de la protection des données personnelles sur internet. À l’heure où nos vies se déroulent de plus en plus en ligne, il est crucial que les géants de la tech assument leurs responsabilités et respectent scrupuleusement le droit fondamental de chacun au respect de sa vie privée.
Les autorités sud-coréennes envoient un signal fort à Meta, Facebook et consorts : les données personnelles des internautes ne sont pas une marchandise comme une autre que l’on peut monnayer à sa guise. Encore moins quand il s’agit d’informations aussi intimes que l’orientation sexuelle, les convictions politiques ou religieuses.
Espérons que cette sanction fasse office d’électrochoc et pousse l’ensemble de l’industrie du web à revoir en profondeur ses pratiques en matière de collecte et d’exploitation des données. Car c’est à ce prix que nous pourrons retrouver un peu de confiance et de sérénité dans notre vie numérique. Les internautes du monde entier, et pas seulement ceux de Corée du Sud, attendent des actes forts. Meta est prévenu.