Cent jours après avoir pris les rênes de l’Allemagne, Friedrich Merz marche sur une corde raide. Promettant un renouveau avec son slogan Germany is back, le chancelier conservateur devait redonner espoir à une nation confrontée à des défis économiques et migratoires. Mais son bilan, bien que marqué par des réformes audacieuses, divise profondément. Avec seulement 29 % d’opinions favorables selon un récent sondage, Merz est-il en train de redessiner l’avenir de l’Allemagne ou de creuser son propre sillon d’impopularité ?
Un Chancelier Sous Pression
En succédant à Olaf Scholz, Friedrich Merz a hérité d’une Allemagne en quête de stabilité. Son arrivée au pouvoir, portée par une vague conservatrice, a suscité des attentes immenses. Pourtant, le mécontentement grandit. Les défis économiques, les tensions migratoires et les attentes internationales pèsent lourd sur ses épaules. Mais derrière les critiques, des avancées se dessinent. Explorons les grands axes de ces cent premiers jours.
Immigration : Un Virage Sécuritaire
La question migratoire a dominé la campagne électorale de Merz. Fidèle à ses promesses, il a durci les politiques d’asile, rompant avec l’approche ouverte d’Angela Merkel en 2015. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les expulsions ont augmenté, avec notamment 81 criminels renvoyés en Afghanistan et 40 en Irak. Une mesure symbolique pour répondre aux préoccupations d’une partie de l’électorat.
Merz cherche à regagner la confiance des électeurs tentés par l’extrême droite.
Wolfgang Schroeder, politologue
Le gouvernement a également introduit des refoulements systématiques aux frontières et des restrictions au regroupement familial. L’accès à la nationalité allemande est désormais plus long, une décision visant à rassurer une population inquiète face à la montée des discours populistes. Ces mesures, bien que controversées, semblent répondre à un électorat de plus en plus critique envers l’immigration.
- Expulsions renforcées : Priorité aux criminels et aux profils à risque.
- Refoulement aux frontières : Une politique plus stricte pour les demandeurs d’asile.
- Nationalité : Allongement des délais pour obtenir la citoyenneté.
Économie : Entre Espoirs et Réalités
Après deux années de récession, l’Allemagne espérait un rebond économique sous Merz. Le chancelier a sécurisé un fonds de 500 milliards d’euros pour moderniser les infrastructures sur douze ans, un investissement ambitieux pour relancer la croissance. Il a également assoupli les règles sur la dette afin de financer la défense, un secteur stratégique dans un contexte géopolitique tendu.
Malgré ces efforts, les résultats déçoivent. Le PIB allemand a reculé de 0,1 % au deuxième trimestre 2025, après une légère hausse de 0,3 % au premier. Le FMI prévoit une croissance quasi nulle (+0,1 %) pour l’année. Les nouveaux droits de douane américains de 15 % sur les produits européens aggravent la situation, menaçant les exportations allemandes.
Les droits de douane américains causeront des dommages importants à notre économie.
Friedrich Merz
Pour contrer ces vents contraires, Merz mise sur des investissements stratégiques. Mais la dépendance de l’Allemagne aux exportations et les tensions internationales compliquent la relance. Les citoyens, eux, attendent des résultats tangibles, notamment sur le coût de l’énergie, un sujet qui divise la coalition.
| Indicateur | Premier trimestre 2025 | Deuxième trimestre 2025 |
|---|---|---|
| Croissance du PIB | +0,3 % | -0,1 % |
| Prévision FMI 2025 | +0,1 % | |
Une Nouvelle Stature Internationale
Sur la scène mondiale, Merz marque des points. Contrairement à son prédécesseur, il s’implique activement dans les affaires étrangères. Son aisance en anglais et son charisme lui confèrent une présence remarquée. Il a renforcé les liens avec la France, la Grande-Bretagne et la Pologne, tout en maintenant une relation fonctionnelle avec le président américain Donald Trump.
Il semble prendre plaisir à évoluer sur la scène internationale.
Ursula Münch, politologue
Merz ambitionne de faire de l’Allemagne la première puissance militaire conventionnelle en Europe, une rupture pour un pays historiquement pacifiste. Les efforts de défense s’intensifient, notamment sous la pression de Trump. Par ailleurs, un changement notable concerne la politique envers Israël : l’Allemagne a suspendu les exportations d’armes potentiellement utilisables à Gaza, marquant une inflexion dans son soutien traditionnel.
Sur l’Ukraine, en revanche, Merz reste prudent, refusant toujours de livrer des missiles Taurus à longue portée. Cette continuité avec la politique de Scholz déçoit certains alliés, mais reflète les réticences allemandes face à une escalade du conflit.
- Europe : Renforcement des partenariats avec la France, la Pologne et le Royaume-Uni.
- Défense : Investissements pour une armée plus puissante.
- Israël : Suspension des exportations d’armes vers Gaza.
Tensions au Sein de la Coalition
La coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates montre des signes de fragilité. Des désaccords ont éclaté sur des sujets clés, comme la réduction du prix de l’énergie pour les particuliers. Un autre point de friction concerne la nomination de juges à la Cour constitutionnelle. Certains conservateurs ont rejeté une candidate jugée trop progressiste, révélant les tensions idéologiques au sein de l’alliance.
Avec une majorité fragile au Bundestag (seulement douze sièges d’avance), Merz doit naviguer avec prudence. Les débats à venir sur le budget 2026 et les réformes sociales, comme l’allocation citoyenne, risquent d’accentuer ces frictions.
Un Bilan en Demi-Teinte
Cent jours après son arrivée, Friedrich Merz incarne un leadership ambitieux mais contesté. Ses réformes migratoires et ses efforts pour redynamiser l’économie témoignent d’une volonté de changement, mais les résultats tardent à convaincre. Sur la scène internationale, il redonne à l’Allemagne une voix forte, mais les tensions internes menacent sa coalition.
Le chancelier parviendra-t-il à transformer l’essai ? Les prochains mois seront décisifs, avec des défis comme le budget 2026 et la gestion des relations avec les États-Unis. Pour l’heure, Merz reste sur sa ligne de crête, entre audace et fragilité.
Résumé des 100 jours de Merz :
- Politique migratoire durcie pour répondre aux attentes électorales.
- Investissements massifs pour relancer l’économie, malgré une croissance en berne.
- Renforcement de la présence allemande sur la scène internationale.
- Tensions croissantes au sein de la coalition, menaçant la stabilité.
