La crise politique qui secoue la France depuis plusieurs semaines prend un nouveau tournant. Alors que les socialistes, par la voix d’Olivier Faure, ont fait part de leur volonté d’engager des discussions avec Emmanuel Macron en vue de former un gouvernement, Jean-Luc Mélenchon leur a adressé un avertissement on ne peut plus clair : si un accord est trouvé avec la macronie, « le Nouveau Front Populaire continuera sans eux ».
LFI ne soutiendra « aucun autre gouvernement que celui du NFP »
Le leader insoumis a tenu à rappeler sa ligne rouge dans un entretien accordé à des médias étrangers ce dimanche :
Nous ne soutiendrons aucun autre gouvernement que celui du Nouveau Front Populaire.
– Jean-Luc Mélenchon
Une mise en garde on ne peut plus explicite à l’attention des socialistes tentés de s’entendre avec Emmanuel Macron sur la base de « concessions réciproques ». Jean-Luc Mélenchon fustige la « méthode brutale » d’Olivier Faure, qu’il accuse de vouloir être Premier ministre « alors que son parti a fait 1,67% à la présidentielle ».
Le spectre d’une rupture de l’alliance de gauche
Si un accord PS-Macron venait à se concrétiser, il signerait de facto l’éclatement de l’alliance de gauche. Un scénario que Jean-Luc Mélenchon semble prêt à assumer :
Si les socialistes forment un gouvernement avec les macronistes voire la droite, alors le Nouveau Front populaire continuera sans eux.
– Jean-Luc Mélenchon
L’ultimatum est posé. Au sein du PS, cette perspective divise. Si certains, à l’instar d’Olivier Faure, y voient l’opportunité de revenir aux affaires, d’autres mettent en garde contre le risque de trahir l’électorat de gauche. Une fracture qui pourrait bien être fatale à une gauche unie qui était parvenue à s’imposer comme première force d’opposition.
Mélenchon promet de « ne pas trahir les électeurs »
De son côté, Jean-Luc Mélenchon campe sur ses positions. Hors de question pour lui de transiger sur le programme porté pendant la campagne :
Nous refusons de trahir nos électeurs pour des postes. Nous appliquons notre programme sans compromission. La démocratie, ce n’est pas le consensus !
Une intransigeance qui porte ses fruits dans les urnes, LFI ayant imposé le NFP comme seule alternative crédible au macronisme. Mais qui pourrait bien se retourner contre lui si ses alliés socialistes venaient à lui faire faux bond.
Le NFP, seule alternative ou mirage ?
En conditionnant la survie de l’alliance de gauche à un soutien exclusif au NFP, Jean-Luc Mélenchon prend le risque de se retrouver isolé. Certes, son programme ambitieux de transformation sociale et écologique séduit une part importante des Français. Mais sans majorité claire à l’Assemblée, comment pourrait-il le mettre en œuvre ?
C’est tout le paradoxe mélenchoniste : persuadé d’incarner la seule alternative légitime, il refuse tout compromis qui le dévoierait. Quitte à laisser le champ libre à ses adversaires ? L’avenir nous le dira.
Les répercussions de la crise sur l’échiquier politique
Ce bras de fer aux allures d’ultimatum intervient dans un contexte politique particulièrement tendu, quelques jours seulement après le renversement du gouvernement Barnier par une motion de censure. Dans son allocution post-censure, Emmanuel Macron n’a pas manqué de dénoncer un « front antirépublicain », visant tout particulièrement la NUPES.
Une accusation qui fait écho aux propos de certains cadres socialistes, prompts à remettre en cause la stratégie mélenchoniste. À l’instar de François Hollande, plusieurs figures du PS plaident désormais pour une forme de « dialogue » avec le président. De quoi nourrir la défiance des Insoumis, qui y voient une trahison programmée.
Les possibles scénarios pour une sortie de crise
Dès lors, quelles options s’offrent aux différents protagonistes pour sortir de l’ornière ? Radicalisé dans son opposition frontale, Jean-Luc Mélenchon semble avoir fait le pari d’un pourrissement de la situation, espérant en tirer profit électoralement. Mais c’est une stratégie risquée, qui pourrait le couper d’une partie de la gauche modérée.
À l’inverse, les socialistes « macron-compatibles » pourraient être tentés de franchir le Rubicon en acceptant de gouverner avec le centre. Mais ils savent qu’ils prendraient alors le risque d’une sécession de leur aile gauche… et d’un débauchage massif de leurs électeurs par LFI.
Quant à Emmanuel Macron, il pourrait voir dans ce jeu de dupes l’occasion de diviser pour mieux régner. En offrant quelques gages aux socialistes, il fragiliserait la NUPES tout en se donnant une marge de manœuvre politique. Mais attention à ne pas donner l’image d’un président « trop à droite », au risque de braquer une opinion attachée au clivage gauche-droite.
Une chose est sûre : la partie d’échecs qui se joue actuellement aura des répercussions durables sur le paysage politique. Mélenchon parviendra-t-il à garder la main sur une gauche contestatrice ? Ou assistera-t-on à une recomposition du bloc social-démocrate, plus enclin au compromis ? Les prochaines semaines seront décisives.