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Mehdi Nemmouche Enterre Son Appel : Perpétuité Définitive

Le bourreau des journalistes français en Syrie vient de rendre sa condamnation à perpétuité définitive. Mehdi Nemmouche ne fera pas appel. Mais derrière ce désistement, que cache vraiment l’ancien geôlier de l’État islamique ? L’histoire est loin d’être terminée…

Imaginez dix mois dans le noir complet, les yeux bandés, les mains attachées dans le dos, à entendre hurler vos voisins syriens qu’on exécute à petit feu. Et puis, parmi les voix qui vous insultent et vous frappent, une qui se détache : celle d’un francophone qui parle trop, qui jubile, qui semble prendre un plaisir pervers à votre souffrance. C’est cette voix que Didier François, Nicolas Hénin, Édouard Elias et Pierre Torres ont reconnue des années plus tard, dans le box des accusés.

Jeudi, on a appris que Mehdi Nemmouche, ce geôlier de l’État islamique, renonçait définitivement à faire appel de sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité. La peine prononcée en mars dernier est désormais gravée dans le marbre.

Un revirement inattendu après le verdict

Le 21 mars 2025, la cour d’assises spéciale de Paris rendait son verdict après cinq semaines d’un procès particulièrement lourd. Mehdi Nemmouche, 40 ans, écopait de la perpétuité avec vingt-deux ans de période de sûreté. Quelques jours plus tard, son avocat annonçait vouloir faire appel. Et puis plus rien.

C’est finalement un désistement pur et simple. L’information, confirmée par une source judiciaire, met un point final à cette procédure en France pour les faits de séquestration et de torture en Syrie. Le jihadiste, déjà condamné à vie pour l’attentat du Musée juif de Bruxelles en 2014, ne verra pas son dossier réexaminé.

« Satisfaction que M. Nemmouche se soit désisté de son appel »

Nicolas Hénin, ancien otage, sur Bluesky

Qui est vraiment Mehdi Nemmouche ?

Né en 1985 à Roubaix, délinquant multirécidiviste dès l’adolescence, il cumule les séjours en prison avant de se radicaliser. En 2013, il part en Syrie. Là-bas, il intègre rapidement les rangs de l’État islamique et gravit les échelons jusqu’à devenir l’un des geôliers les plus craints de la prison d’Alep, puis de celles de Raqqa.

Pendant le procès, il a toujours nié avoir croisé les quatre journalistes français. Il jurait être venu « combattre Bachar al-Assad », pas pour torturer des Occidentaux. Une version que personne n’a crue, tant les témoignages étaient précis et concordants.

Les témoignages qui ont tout fait basculer

Didier François, grand reporter à Europe 1, se souvient parfaitement de « l’accent du Nord », des blagues douteuses, des chansons françaises entonnées pour narguer les prisonniers. Nicolas Hénin parle d’un homme « pervers et sadique », qui semblait prendre un plaisir particulier à humilier les otages occidentaux.

Pierre Torres et Édouard Elias complètent le tableau : coups, simulacres d’exécution, privation d’eau, menaces constantes. Tous décrivent le même individu, parlant sans cesse, vantard, obsédé par le fait que les vies des journalistes français valaient plus que celles des milliers de Syriens massacrés dans les cellules voisines.

Ils savaient que nous avions de la valeur marchande. Nous étions leur assurance-vie, leur monnaie d’échange potentielle. Les Syriens, eux, on les tuait sans état d’âme.

— Témoignage recueilli lors du procès

Un verdict élargi à toutes les victimes occidentales

Dans son délibéré, la cour n’a pas seulement reconnu la souffrance des quatre Français. Elle a étendu la qualité de victimes à l’ensemble des vingt-cinq journalistes et humanitaires occidentaux enlevés en Syrie entre 2013 et 2014. Certains ont été décapités dans des vidéos de propagande qui ont horrifié le monde.

Ce choix judiciaire est lourd de sens : il refuse de hiérarchiser les souffrances et place tous ces otages dans le même statut de victimes du même système concentrationnaire mis en place par l’État islamique.

Et maintenant ?

Si la page Nemmouche semble tournée en France, un second procès se profile. Kaïs Al Abdallah, 42 ans, présenté comme l’ancien numéro 2 de l’EI à Raqqa, a été condamné en première instance à vingt ans de réclusion. Lui n’a pas renoncé à faire appel. Son audience devrait se tenir dans les prochains mois.

Ce dossier montre à quel point la justice française continue, dix ans après les faits, de traquer les responsables des pires exactions commises en Syrie. Chaque témoignage, chaque identification, chaque condamnation est une pierre apportée à l’édifice mémoriel pour que ces crimes ne tombent jamais dans l’oubli.

Pour les anciens otages, ce désistement de Nemmouche n’efface rien de la violence subie. Mais il referme une porte. Celle des audiences interminables, des confrontations avec leur bourreau, des souvenirs ravivés à chaque audience.

Il reste désormais à espérer que la perpétuité réelle – et non compressible avant vingt-deux ans – sera bien appliquée. Car pour les victimes, la seule vraie justice, c’est que cet homme ne sorte jamais.

En renonçant à son appel, Mehdi Nemmouche accepte – peut-être pour la première fois – la réalité de ses actes. Ou du moins, il choisit de ne plus les contester devant les hommes. Reste que l’Histoire, elle, a déjà tranché.

Et quelque part, dans l’ombre des cellules syriennes qu’ils n’oublieront jamais, quatre journalistes français tournent une page. Pas celle de la souffrance, non. Celle de la lutte pour que justice soit rendue.

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