Chaque 1er Mai, la France vibre au rythme des rassemblements, des défilés et des discours. Mais à Narbonne, en 2025, l’événement prend une tournure particulière. Dans cette sous-préfecture de l’Aude, où l’extrême droite a conquis les trois circonscriptions législatives, un meeting d’envergure réunit deux figures majeures du paysage politique français. Ce rendez-vous, prévu à l’Arena de Narbonne, n’est pas qu’un simple rassemblement : il s’agit d’une démonstration de force, d’un message envoyé à la fois aux militants et aux adversaires. Alors, que se joue-t-il vraiment dans ce meeting du 1er Mai, et pourquoi attire-t-il tous les regards ?
Un meeting sous haute tension à Narbonne
Le 1er Mai 2025, l’Arena de Narbonne accueillera près de 5 000 personnes, venues écouter les leaders du Rassemblement National (RN). Ce choix géographique n’est pas anodin. L’Aude, autrefois bastion de la gauche, s’est progressivement tournée vers l’extrême droite, jusqu’à devenir un symbole de son ancrage territorial. Les trois députés RN élus dans le département en témoignent : le parti a su capter un électorat en quête de réponses face aux crises économiques et sociales.
Ce meeting intervient dans un contexte particulier. Un mois plus tôt, une condamnation judiciaire a secoué le parti. Une peine d’inéligibilité de cinq ans, assortie d’une exécution immédiate, menace la cheffe historique du RN de ne pas pouvoir briguer l’Élysée en 2027. Pourtant, loin de se laisser abattre, les leaders du parti choisissent Narbonne pour afficher leur unité et leur détermination. Mais derrière les discours enflammés, des questions stratégiques se posent : le RN peut-il maintenir sa dynamique malgré les incertitudes judiciaires ?
Le 1er Mai, une date clé pour le RN
Le 1er Mai n’est pas une date choisie au hasard. Traditionnellement associée aux luttes ouvrières, elle a été réappropriée par le RN pour en faire un moment de communion avec ses militants. Sous l’ère de Jean-Marie Le Pen, le parti rendait hommage à Jeanne d’Arc à Paris, une figure devenue symbole de résistance nationale. Depuis, sa fille a transformé cet événement en un rendez-vous plus moderne, mêlant discours patriotiques, banquets républicains et dépôts de gerbe en province.
À Narbonne, cette symbolique reste forte. Le RN veut montrer qu’il n’est pas seulement un parti de contestation, mais une force capable de fédérer autour d’un projet national. Le choix d’une ville moyenne, loin des métropoles, renforce ce message : le parti s’adresse aux Français des territoires, ceux qui se sentent oubliés par les élites parisiennes.
« Le 1er Mai, c’est l’occasion de montrer que nous sommes unis et prêts pour 2027, quoi qu’il arrive. »
Une condamnation qui change la donne
Le 31 mars 2025, un coup de tonnerre a retenti pour le RN. La cheffe du parti a été condamnée à quatre ans de prison, dont deux avec sursis, et surtout à cinq ans d’inéligibilité. Cette décision, liée à une affaire d’assistants d’eurodéputés, pourrait bouleverser les plans du parti pour la présidentielle de 2027. Si la peine est confirmée en appel, prévue pour l’été 2026, la triple candidate à l’Élysée devra céder sa place.
Pour l’instant, elle reste la « candidate naturelle » du parti, comme elle l’a réaffirmé lors d’une déclaration récente. Mais l’ombre d’un plan B plane. En cas d’exécution provisoire de l’inéligibilité, le président du RN, âgé de 30 ans en septembre 2025, pourrait prendre le relais. Cette hypothèse, bien que soigneusement évitée par les cadres du parti, alimente les spéculations.
Un parti face à son destin : entre fidélité à sa leader historique et la nécessité de se réinventer, le RN joue gros à Narbonne.
Jordan Bardella, l’héritier prêt à saisir sa chance ?
À seulement 30 ans, le président du RN incarne une nouvelle génération. Charismatique, il a su s’imposer lors des élections européennes, où il a porté le parti à des scores historiques. À Narbonne, il ne se contente pas d’accompagner sa mentor : il signe aussi son livre, Ce que je cherche, lors d’une séance de dédicaces prévue après le meeting. Un signe de son ambition croissante ?
Sa récente déclaration, où il se dit prêt à être le « candidat » en cas d’empêchement de la cheffe, a fait grincer des dents parmi les fidèles. Si elle a minimisé l’incident en plaisantant sur l’hypothèse d’un « accident de camion », la tension est palpable. Le RN doit naviguer entre deux écueils : soutenir une leader fragilisée par la justice tout en préparant une alternative crédible.
Un parti en quête de dynamique
Le meeting de Narbonne intervient après un semi-échec à Paris, le 6 avril. Alors que 7 000 personnes s’étaient rassemblées place des Invalides, l’espace restait clairsemé, loin de l’image de force espérée. Pour contrer cette impression, le RN met en avant une vague d’adhésions : plus de 100 000 cartes, dont 20 000 depuis la condamnation. Ces chiffres, s’ils sont exacts, témoignent d’une base militante toujours mobilisée.
Pourtant, le parti doit relever plusieurs défis :
- Maintenir l’unité : Les spéculations sur une rivalité entre les deux leaders fragilisent le discours d’unité.
- Préparer 2027 : Avec une décision judiciaire en suspens, le RN doit élaborer une stratégie à deux têtes.
- Convaincre au-delà de sa base : Les sondages placent le RN en tête au premier tour (30-35 %), mais le second tour reste un obstacle, avec seulement 44 % face à un adversaire comme Édouard Philippe.
Une stratégie à double tranchant
Le RN se trouve face à un dilemme. Miser exclusivement sur la cheffe historique, c’est prendre le risque d’un échec si la justice confirme son inéligibilité. Mais évoquer ouvertement un plan B, c’est ouvrir la porte à des tensions internes et à une démobilisation des militants attachés à leur leader. À Narbonne, le parti tente de résoudre cette équation en mettant en scène une complémentarité entre ses deux figures.
Les sondages, bien que flatteurs, rappellent une réalité : malgré leur avance au premier tour, le RN peine à briser le « plafond de verre » au second. Face à un adversaire modéré, le parti reste crédité de scores insuffisants pour l’emporter. Cette faiblesse structurelle oblige le RN à repenser sa communication et ses priorités.
Scénario | Conséquences pour le RN |
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Inéligibilité confirmée | Passage de relais à Bardella, risque de tensions internes. |
Inéligibilité levée | Candidature maintenue, mais image entachée par le procès. |
Peine d’emprisonnement | Choix entre une candidate fragilisée et un novice inexpérimenté. |
Narbonne, un tremplin pour 2027 ?
Le meeting de Narbonne n’est pas seulement une réponse à la crise judiciaire. C’est aussi une étape dans la construction d’une campagne pour 2027. En choisissant l’Aude, le RN ancre son discours dans les territoires ruraux et périurbains, où il réalise ses meilleurs scores. Ce choix stratégique vise à consolider une base électorale fidèle tout en attirant de nouveaux sympathisants.
Le parti mise également sur la jeunesse de son président pour renouveler son image. À 30 ans, il incarne une modernité qui tranche avec l’image parfois datée de l’extrême droite. Mais cette jeunesse est à double tranchant : si elle attire les jeunes électeurs, elle peut aussi susciter des doutes sur son expérience face aux poids lourds de la politique.
Les défis d’un parti en mutation
Le RN n’est plus le parti marginal des années 1980. Avec des scores électoraux en hausse et une présence accrue dans les territoires, il s’est imposé comme un acteur incontournable. Mais cette ascension s’accompagne de nouveaux défis. Comment concilier la fidélité à une leader historique avec la nécessité de se renouveler ? Comment transformer une base militante en une majorité électorale ?
À Narbonne, ces questions trouveront peut-être des débuts de réponse. Le meeting, par sa taille et son retentissement, doit prouver que le RN reste une force capable de mobiliser, même dans l’adversité. Pour les deux leaders, c’est l’occasion de montrer qu’ils peuvent travailler ensemble, malgré les incertitudes.
Le RN à la croisée des chemins : unité ou division ? La réponse se joue à Narbonne.
En attendant, le parti continue de scruter les sondages et de peaufiner sa stratégie. Si le meeting de Narbonne parvient à galvaniser les militants et à projeter une image de force, il pourrait marquer un tournant. Mais dans un paysage politique en constante évolution, rien n’est acquis. Le RN devra prouver, meeting après meeting, qu’il est prêt à relever le défi de 2027, avec ou sans sa cheffe historique.