C’est une île à genoux que le président Emmanuel Macron a découvert en arrivant à Mayotte ce jeudi. Cinq jours après le passage ravageur du cyclone Chido, l’archipel français de l’océan Indien panse ses plaies et compte ses morts. Un bilan provisoire qui ne cesse de s’alourdir : au moins 31 décès et quelque 1400 blessés, alors que 70% des Mahorais ont été sérieusement impactés. « Il est vraisemblable qu’il y ait beaucoup plus de victimes », a d’ailleurs reconnu le chef de l’État lors de sa visite.
Une population en détresse interpelle Macron
Dès son arrivée sur l’île, Emmanuel Macron a été confronté au désarroi et à la colère des habitants. « Donnez des aides », « des solutions qui aboutissent », l’a supplié en larmes Assane Halo, une employée de l’aéroport. « Nos maisons sont détruites. Nos enfants sont traumatisés », a-t-elle déploré, implorant le président de ne pas repartir trop vite.
Un peu plus tard, une mère de trois enfants lui a confié, amère, que la mobilisation de l’État tant vantée ne se voyait pas sur le terrain. « On est complètement démunis, on ne sait pas pleurer, on ne sait pas sourire », a-t-elle lâché avant de fondre en larmes dans les bras du président. Une scène poignante parmi tant d’autres.
L’urgence absolue : eau, nourriture, électricité
Face à cette détresse, Emmanuel Macron a tenté de rassurer en annonçant des mesures d’urgence. La priorité : rétablir l’eau, l’électricité et distribuer vivres et produits de première nécessité dans toutes les communes de Mayotte d’ici dimanche soir. « 50% de l’électricité sera rétablie demain, à peu près pareil pour l’eau », a-t-il promis, tout en reconnaissant que pour les zones les plus reculées, il faudrait sans doute plusieurs semaines.
Autre défi crucial : assurer la sécurité alors que des scènes de pillages ont été signalées un peu partout et qu’un couvre-feu a dû être instauré. Le président a annoncé le déploiement de 1200 forces de l’ordre supplémentaires dès dimanche pour tenter d’endiguer les débordements.
Une minute de silence et des drapeaux en berne lundi
En hommage aux victimes, une journée de deuil national a été décrétée pour lundi prochain, avec mise en berne des drapeaux et minute de silence dans toute la France à midi. Un geste symbolique alors que le recensement des morts s’avère très compliqué, de nombreuses zones étant toujours inaccessibles.
On est face à des charniers à ciel ouvert. Il n’y a pas de sauveteurs. Personne n’est venu récupérer les corps ensevelis.
Estelle Youssouffa, députée de Mayotte
Reconstruire Mayotte, un défi titanesque
Au-delà des mesures d’urgence, Emmanuel Macron a promis de rebâtir Mayotte grâce à une « loi spéciale ». L’objectif : mettre fin aux bidonvilles et à l’habitat indigne où s’entassent un tiers des Mahorais, dont la plupart ont vu leur logement partir en fumée avec le cyclone.
On a été capables de rebâtir notre cathédrale en cinq ans. Ce serait quand même un drame qu’on n’arrive pas à rebâtir Mayotte.
Emmanuel Macron
Depuis Paris, le Premier ministre François Bayrou s’est voulu volontariste, évoquant un possible délai de deux ans pour cette reconstruction. « J’espère qu’on y arrivera. C’est une tâche surhumaine, immense », a-t-il souligné. Un pari osé quand on sait l’ampleur des dégâts et le retard de développement accumulé par Mayotte, département le plus pauvre de France.
L’épineuse question de l’immigration clandestine
Emmanuel Macron a aussi mis l’accent sur le renforcement de la lutte contre l’immigration clandestine, fléau qui selon lui accentue les multiples crises secouant l’archipel. Il souhaite faire passer le nombre de reconduites aux frontières de 22 000 en 2023 à 35 000 voire 40 000 par an.
Une annonce qui risque de faire grincer des dents alors que de nombreux Mahorais pointaient déjà du doigt, avant la catastrophe, le manque de moyens chronique des services publics et le sentiment d’abandon de la part de l’État. La route sera longue pour panser les plaies de Mayotte et lui offrir un avenir meilleur.