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Marseille : La Lutte Contre Airbnb S’Intensifie

À Marseille, la mairie impose des règles strictes aux propriétaires Airbnb. Une mesure pour sauver le logement local ou un frein au tourisme ? La bataille judiciaire révèle des tensions…

Dans les ruelles ensoleillées de Marseille, où le chant des cigales se mêle au brouhaha des marchés, une bataille silencieuse fait rage. La mairie, déterminée à préserver l’accès au logement pour les habitants, s’attaque aux locations saisonnières de type Airbnb. Ce conflit, qui oppose les propriétaires aux autorités locales, soulève une question brûlante : comment concilier tourisme florissant et droit au logement dans une ville où chaque mètre carré compte ?

Marseille face à la crise du logement

La cité phocéenne, avec son Vieux-Port emblématique et ses quartiers vibrants, attire des millions de touristes chaque année. Mais ce succès a un revers : la prolifération des locations touristiques a fait grimper les loyers, rendant le logement inabordable pour beaucoup. Crise du logement : ce terme revient sans cesse dans les discussions des Marseillais, qui peinent à trouver des appartements à des prix raisonnables. La mairie, sous l’impulsion de son maire, a décidé de prendre des mesures drastiques pour rééquilibrer le marché.

Depuis plusieurs années, les plateformes comme Airbnb ont transformé le paysage immobilier. Des appartements autrefois occupés par des familles sont désormais réservés aux visiteurs de passage, souvent à des tarifs bien plus élevés que les loyers classiques. Cette dynamique a exacerbé les tensions sur le marché locatif, poussant la municipalité à agir pour protéger les habitants.

Une réglementation controversée

En février 2025, un nouveau règlement a vu le jour dans la métropole Aix-Marseille-Provence. Désormais, tout propriétaire souhaitant transformer un bien en location saisonnière doit compenser en mettant un logement équivalent sur le marché locatif classique, dans le même secteur et de même surface. Cette mesure, qualifiée de compensation locative, vise à maintenir un équilibre entre tourisme et accès au logement. Mais elle n’a pas été accueillie à bras ouverts par tous.

« Cette mesure est une réponse directe à la pénurie de logements. Elle garantit que l’essor du tourisme ne se fasse pas au détriment des habitants. »

Un représentant de la mairie

Les propriétaires, regroupés au sein d’un syndicat de professionnels de la location meublée, ont immédiatement contesté cette règle devant le tribunal administratif. Leur argument ? Cette obligation constitue une entrave à leur liberté d’entreprendre et risque de freiner l’économie touristique. Mais le tribunal a tranché en faveur de la mairie, estimant que la mesure était justifiée par l’urgence de la situation immobilière.

Un marché locatif sous tension

Pourquoi une telle mesure ? Marseille, comme d’autres grandes villes touristiques, souffre d’une pénurie de logements. Selon des études récentes, près de 15 % des logements dans certains quartiers centraux sont dédiés à la location touristique. Ce phénomène réduit l’offre disponible pour les résidents permanents, faisant grimper les prix. Dans des secteurs comme le Panier ou Noailles, trouver un appartement à louer à l’année devient une mission quasi impossible.

Les chiffres clés de la crise

  • 15 % : Part des logements dédiés à la location saisonnière dans certains quartiers.
  • 30 % : Augmentation moyenne des loyers depuis 2015 dans les zones touristiques.
  • 12 000 : Nombre estimé de logements Airbnb à Marseille en 2024.

Face à ces chiffres, la mairie argue que la compensation locative est une nécessité pour préserver l’accès au logement. En obligeant les propriétaires à maintenir une offre équivalente sur le marché classique, la ville espère limiter l’impact du tourisme sur les résidents.

Le bras de fer judiciaire

Le syndicat des propriétaires a tenté de faire suspendre cette réglementation, arguant qu’elle portait une atteinte grave à leurs intérêts. Mais le tribunal administratif a rejeté leur demande, soulignant que la mesure s’inscrivait dans une politique globale du logement. Le verdict est clair : la mairie a le droit d’imposer des règles pour protéger ses habitants, même si cela contrarie les intérêts des loueurs saisonniers.

Ce n’est pas la première fois que la ville s’attaque aux pratiques d’Airbnb. Ces dernières années, des opérations coup de poing ont visé les boîtes à clés, ces dispositifs permettant aux touristes de récupérer les clés des logements sans contact. Dans certains quartiers, ces boîtes ont été retirées à la disqueuse, sous les yeux médusés des propriétaires. Une image forte, qui illustre la détermination des autorités.

Les propriétaires dans la tourmente

Pour les propriétaires, la situation est complexe. Beaucoup ont investi dans des biens pour profiter de la manne touristique, qui représente une source de revenus conséquente. Louer un appartement à des touristes rapporte souvent deux à trois fois plus qu’un bail classique. Mais avec les nouvelles règles, ils doivent désormais assumer le coût d’un second logement à mettre sur le marché locatif, ce qui réduit leur marge de profit.

« On nous demande de compenser, mais c’est comme si on nous forçait à subventionner le marché locatif. Ce n’est pas viable pour tout le monde. »

Un propriétaire marseillais

Certains propriétaires envisagent de contourner la réglementation en louant sous le manteau ou en optant pour des plateformes moins régulées. Mais la mairie promet des contrôles renforcés, avec des amendes salées pour les contrevenants. Cette fermeté reflète une volonté claire : faire de Marseille une ville où le tourisme ne prime pas sur le droit au logement.

Un modèle à suivre ou un précédent dangereux ?

Marseille n’est pas la seule ville à s’attaquer aux locations saisonnières. À Barcelone, par exemple, les autorités ont annoncé une interdiction totale des locations Airbnb d’ici 2028. À Lisbonne et Amsterdam, des quotas stricts limitent le nombre de nuits autorisées pour la location touristique. Ces exemples montrent une tendance mondiale : les grandes villes cherchent à reprendre le contrôle de leur marché immobilier face à l’essor des plateformes numériques.

Ville Mesure Impact
Marseille Compensation locative obligatoire Maintien de l’offre locative classique
Barcelone Interdiction des locations Airbnb d’ici 2028 Réduction drastique des logements touristiques
Amsterdam Quota de 30 nuits par an Limitation du tourisme locatif

Pour certains, Marseille pourrait devenir un modèle pour d’autres villes françaises confrontées à des problèmes similaires. Mais pour d’autres, cette réglementation risque de décourager les investisseurs et de freiner l’économie touristique, qui représente une part importante des revenus de la ville.

Vers un tourisme plus responsable ?

Le débat autour d’Airbnb à Marseille dépasse la simple question immobilière. Il touche à la vision même de la ville : doit-elle rester une destination touristique ouverte à tous, ou privilégier le bien-être de ses habitants ? La mairie semble avoir choisi son camp, en mettant l’accent sur un tourisme responsable. En plus de la compensation locative, des mesures comme la réduction de la durée maximale de location des résidences principales visent à limiter l’impact du tourisme de masse.

Ces initiatives ne sont pas sans rappeler les mouvements citoyens dans d’autres villes, où des slogans comme Tourists Go Home! ont fleuri sur les murs. À Marseille, la contestation est moins visible, mais le mécontentement des habitants face à la flambée des loyers est bien réel. La mairie espère que ses mesures apaiseront ces tensions, tout en maintenant l’attractivité touristique de la ville.

Quel avenir pour les locations saisonnières ?

La décision du tribunal administratif marque un tournant pour les propriétaires marseillais. Mais elle soulève aussi des questions sur l’avenir des locations saisonnières. Certains experts estiment que les plateformes comme Airbnb devront s’adapter en proposant des modèles plus collaboratifs, comme des partenariats avec les municipalités pour financer des logements sociaux. D’autres prédisent une migration vers des plateformes moins régulées, ce qui pourrait compliquer les efforts des autorités.

Solutions envisagées

  • Partenariats public-privé : Collaborations entre plateformes et mairies pour financer le logement.
  • Quotas de location : Limitation du nombre de nuits autorisées par an.
  • Taxes spécifiques : Imposition accrue sur les revenus des locations touristiques.

Pour l’instant, la mairie de Marseille semble avoir remporté une bataille importante. Mais le combat est loin d’être terminé. Les propriétaires, bien que déboutés, pourraient faire appel ou chercher d’autres moyens de contourner les règles. De leur côté, les habitants espèrent que ces mesures ramèneront un peu de sérénité sur le marché locatif.

Un équilibre difficile à trouver

Le cas de Marseille illustre un défi majeur pour les villes touristiques : trouver un équilibre entre accueil des visiteurs et protection des résidents. La réglementation immobilière mise en place par la mairie est un pari audacieux, qui pourrait inspirer d’autres métropoles. Mais elle n’est pas sans risques. Si les touristes se détournent de Marseille au profit de destinations moins régulées, l’économie locale pourrait en souffrir.

En attendant, les Marseillais observent avec attention l’évolution de ce bras de fer. Pour beaucoup, il ne s’agit pas seulement d’une question de logements, mais d’une lutte pour préserver l’âme d’une ville où la mixité sociale et culturelle a toujours été une force. Reste à savoir si la mairie parviendra à tenir ses promesses, ou si le tourisme continuera de dicter ses lois.

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