Dans la cité phocéenne, le vent tourne pour le protoxyde d’azote. Ce gaz hilarant, consommé de façon détournée par de nombreux jeunes en quête de sensations, est dans le viseur des autorités. Pour endiguer ce fléau, la mairie de Marseille a dégainé un nouvel arrêté qui interdit purement et simplement la vente de ce produit dans les épiceries de nuit. Une décision radicale qui vise à assécher l’un des principaux points d’approvisionnement.
Le protoxyde d’azote, une drogue en vogue aux effets dévastateurs
Utilisé en cuisine pour les siphons à chantilly ou en milieu médical comme anesthésiant, le protoxyde d’azote fait fureur chez les jeunes pour ses effets psychoactifs brefs mais intenses quand il est inhalé. Euphorie, fous rires, sensation de flotter… Des sensations grisantes qui cachent en réalité des risques majeurs pour la santé : asphyxie, brûlures, perte de connaissance, et à forte dose, de graves atteintes neurologiques et cardiaques.
Les dégâts sur les consommateurs sont réels, notamment auprès du jeune public.
Yannick Ohanessian, adjoint au maire de Marseille en charge de la sécurité
Les épiceries de nuit, complices malgré elles
Jusqu’à présent, ce gaz était en vente libre dans de nombreux commerces, et notamment dans les épiceries de nuit qui constituent des points de ravitaillement stratégiques pour les jeunes en mal de sensations. Un accès facile qui a grandement contribué à la popularité grandissante de cette drogue, au grand dam des autorités.
Début décembre, la mairie avait déjà tenté de réguler le phénomène avec un premier arrêté interdisant la vente aux mineurs et la consommation sur la voie publique. Mais face à l’ampleur du problème, elle a décidé de passer à la vitesse supérieure en bannissant totalement la vente dans ces commerces, y compris pour les majeurs.
Une mesure choc, mais sera-t-elle suffisante ?
Si cette décision est saluée par beaucoup comme un pas dans la bonne direction, d’autres s’interrogent sur son efficacité réelle. En effet, le protoxyde d’azote reste en vente libre dans d’autres commerces, et rien n’empêche les jeunes de s’approvisionner ailleurs, voire de recourir au marché noir.
De plus, interdire ne suffit pas toujours à enrayer un phénomène de mode, surtout chez les jeunes en quête de transgressions. Certains redoutent même un effet pervers, celui de rendre cette drogue encore plus attractive car interdite.
C’est bien de réglementer, mais il faut surtout informer et prévenir. Sinon, on risque juste de déplacer le problème.
Un éducateur spécialisé marseillais
Beaucoup appellent donc à coupler cette mesure répressive avec un véritable travail d’éducation et de prévention auprès des jeunes pour les sensibiliser aux dangers de cette drogue en apparence anodine. Car si couper l’approvisionnement est nécessaire, cela ne suffira pas à éteindre la curiosité et la soif de sensations des adolescents.
Vers une prise de conscience nationale
L’initiative marseillaise pourrait en tout cas faire des émules dans d’autres villes confrontées au même fléau. Car le problème est loin d’être cantonné à la cité phocéenne. Partout en France, la consommation detournée de protoxyde d’azote explose chez les jeunes, faisant des ravages sanitaires et suscitant l’inquiétude des autorités.
Certains appellent même à durcir la législation au niveau national, pour encadrer plus strictement la vente et l’usage de ce produit. Une pétition en ce sens a été lancée et a déjà recueilli des milliers de signatures. Preuve que la société prend peu à peu conscience de l’ampleur du phénomène et de la nécessité d’agir.
En attendant, Marseille a décidé de prendre les devants, en envoyant un signal fort. Reste à savoir si cette mesure coup de poing suffira à enrayer cette déferlante de gaz hilarant, ou s’il faudra d’autres actions plus profondes pour changer durablement les comportements. L’avenir nous le dira, mais une chose est sûre : la lutte ne fait que commencer.