Les rues de Séoul ont été le théâtre de scènes inhabituelle ce mercredi, alors que des milliers de citoyens en colère ont manifesté contre un seul homme : le président Yoon Suk Yeol. Son coup de force avorté pour tenter d’imposer la loi martiale, une première dans ce pays, a choqué les Sud-Coréens, fiers de leur jeune démocratie durement acquise.
Les syndicats et l’opposition appellent à la mobilisation
Tout au long de la journée, la capitale a été traversée par des groupes de manifestants déterminés, scandant des slogans hostiles au président, sous l’œil vigilant des forces de l’ordre. Les principaux syndicats du pays ont appelé à une grève générale pour protester contre cette tentative de coup de force, tandis que l’opposition exigeait la démission immédiate de Yoon Suk Yeol, l’accusant de rébellion contre les institutions démocratiques.
Le Parlement rejette fermement la loi martiale
Dans la nuit de mardi à mercredi, 190 députés réunis en urgence au siège du Parlement ont voté à l’unanimité une motion rejetant la loi martiale annoncée quelques heures plus tôt par le président lors d’une allocution télévisée. Un camouflet cinglant pour l’ancien procureur général conservateur, dont la popularité n’a cessé de s’effriter depuis son élection en 2022.
C’était un auto-coup, destiné à se protéger lui-même et sa femme.
Un manifestant à Séoul
La première dame au cœur des critiques
Beaucoup voient dans cette tentative désespérée une manœuvre de diversion face aux multiples scandales qui entourent la première dame depuis le début du mandat de son époux. Des soupçons de trafic d’influence, de favoritisme et même de malversations financières pèsent sur celle qui était pourtant présentée comme un atout pour le président lors de sa campagne.
Une foule déterminée à défendre la démocratie
Sur la grande place centrale de Séoul, la foule compacte et déterminée ne montre aucun signe de fatigue malgré une nuit presque blanche. Agitant des drapeaux multicolores, les manifestants entonnent l’hymne national, symbole de leur attachement indéfectible aux valeurs démocratiques. Des scènes qui rappellent celles de 2016, quand des millions de Sud-Coréens étaient descendus dans la rue pour obtenir la destitution de la présidente Park Geun-hye, finalement démise pour abus de pouvoir et corruption.
Il fallait que je sois là ce soir, le président est fou.
Choi Moon Jung, une manifestante de 55 ans
L’opposition dénonce « un coup par trahison »
Les responsables de l’opposition n’ont pas mâché leurs mots pour condamner ce qu’ils considèrent comme une tentative de putsch. Cho Kuk, une figure de proue du parti démocrate, accuse Yoon Suk Yeol d’avoir « tenté un coup par trahison, rébellion militaire et violation de la Constitution ». Une motion de destitution a d’ailleurs été déposée contre le président. Si elle est adoptée par une majorité des deux tiers à l’Assemblée nationale, Yoon Suk Yeol pourrait être démis de ses fonctions après un passage devant la Cour constitutionnelle.
La jeunesse mobilisée pour sa « leçon d’histoire »
Dans les rangs des manifestants, beaucoup de jeunes expriment leur sidération face à ce qu’ils perçoivent comme une menace sans précédent contre leur démocratie, acquise de haute lutte après des décennies de dictature militaire. Pour eux, il s’agit d’un moment historique, une « leçon d’histoire » dont ils veulent être acteurs.
Notre démocratie sera piétinée si nous laissons M. Yoon au pouvoir un instant de plus.
Park Su-hyung, 39 ans
Alors que la nuit tombe sur Séoul, les manifestants ne semblent pas prêts à quitter les rues. Distribuant des bougies et des boissons chaudes, ils se préparent à une longue veillée pour réclamer le départ du président. Une détermination qui en dit long sur l’attachement viscéral des Sud-Coréens à leur liberté si chèrement conquise.
Face à cette vague de contestation sans précédent, l’avenir politique de Yoon Suk Yeol apparaît plus que jamais compromis. Reste à savoir si ce président affaibli et contesté saura entendre la colère de son peuple ou s’il s’obstinera dans une fuite en avant potentiellement dévastatrice pour la démocratie sud-coréenne. Les prochains jours s’annoncent décisifs pour ce pays qui a tant lutté pour sa liberté.