Alors que Lima, la capitale péruvienne, se prépare à accueillir le sommet des dirigeants de l’APEC cette semaine, les rues de la ville résonnent au son des manifestations. Des centaines de Péruviens, principalement issus des syndicats de conducteurs de bus et de commerçants, sont descendus dans les rues mercredi pour exiger des mesures du gouvernement face à la recrudescence inquiétante des extorsions et des violences liées au crime organisé.
Un Sommet International Sous Haute Tension
L’arrivée imminente des présidents américain Joe Biden et chinois Xi Jinping pour le sommet de l’APEC, qui réunit les 21 pays membres de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique, n’a pas dissuadé les manifestants. Malgré un important dispositif policier déployé autour du centre des congrès où se tiendra l’événement, ils ont tenté d’avancer au plus près du site, déterminés à faire entendre leur voix.
Selon une source proche du dossier, plus de 13 000 policiers auraient été mobilisés à Lima depuis le début de la semaine pour assurer la sécurité du sommet. Par ailleurs, le Parlement a approuvé fin octobre le déploiement de 600 soldats américains en soutien aux forces de l’ordre péruviennes, une décision qui suscite la colère d’une partie des manifestants. “Les troupes américaines hors du Pérou”, pouvait-on entendre scander certains d’entre eux, alors qu’un drapeau américain partait en fumée.
Le Ras-le-bol des Péruviens Face à la Violence
Mais au-delà de l’opposition à la présence militaire américaine, c’est avant tout un profond ras-le-bol qui s’exprime dans les rues de Lima. Depuis septembre, les syndicats de chauffeurs de bus et de commerçants se mobilisent pour dénoncer la hausse alarmante des extorsions et des meurtres perpétrés par le crime organisé. Plusieurs conducteurs ont été assassinés dans la capitale depuis le début de l’année, plongeant toute une profession dans la peur.
Nos enfants meurent à cause de la violence et des extorsions, ça suffit !
Rosa Juarez, commerçante de 66 ans
Face à cette situation devenue intenable, le gouvernement avait décrété fin septembre l’état d’urgence pour 60 jours dans plusieurs districts de Lima et envoyé l’armée épauler la police dans les rues. Mais pour beaucoup, ces mesures sont loin d’être suffisantes. Les manifestants réclament des actions concrètes et durables pour endiguer cette vague de violence qui gangrène le pays.
Une Capitale Sous Cloche pour le Sommet
En prévision du sommet de l’APEC, le gouvernement péruvien a pris des mesures drastiques. Trois jours fériés ont été décrétés à partir de jeudi dans cette capitale de 10 millions d’habitants. Les cours sont suspendus dans les écoles et les universités. La ville semble retenir son souffle, partagée entre les espoirs générés par ce grand raout économique international et les inquiétudes suscitées par le climat social tendu.
Les organisateurs des manifestations, déterminés à maintenir la pression sur les autorités, ont d’ores et déjà annoncé de nouvelles actions pour jeudi et vendredi, premier jour du sommet. Reste à savoir si leur voix sera entendue par le gouvernement péruvien, en première ligne pour garantir la sérénité de cet événement qui braque les projecteurs du monde entier sur Lima et le Pérou.
Une Fronde Nationale qui Dépasse Lima
La fronde sociale ne se limite pas à la capitale. Selon des images diffusées par les télévisions péruviennes, des manifestations ont également eu lieu mercredi dans les régions de Junin, Cusco, Puno, Ancash et Arequipa. Cette mobilisation d’ampleur nationale témoigne de l’exaspération grandissante de la population face à la dégradation de la situation sécuritaire.
Le Pérou, qui figure parmi les premiers producteurs mondiaux de cocaïne, est gangrené par les violences liées aux trafics de drogue et aux groupes criminels qui se disputent le contrôle des territoires. Une situation qui pèse lourdement sur l’économie et le quotidien des Péruviens, et face à laquelle le gouvernement peine à apporter des réponses efficaces et pérennes.
Un Défi Sécuritaire et Démocratique pour le Pérou
Au-delà de l’enjeu sécuritaire, c’est aussi la capacité du Pérou à faire face à ses défis démocratiques et sociaux qui est en question. Avec une croissance économique en berne, des inégalités criantes et une instabilité politique chronique, le pays andin traverse une passe difficile.
Le sommet de l’APEC, qui vise à promouvoir la croissance et la prospérité dans la région Asie-Pacifique, pourrait offrir au Pérou une opportunité de redynamiser son économie et d’attirer de nouveaux investissements étrangers. Mais encore faut-il que le pays parvienne à rétablir la sécurité et la confiance sur son territoire.
La mobilisation de la société civile et les revendications portées par les manifestants de Lima et d’ailleurs rappellent l’urgence de relever ces défis. Il en va de la stabilité et de l’avenir du Pérou, bien au-delà de l’écume médiatique du sommet de l’APEC.