Dans la province du Yagha, au nord-est du Burkina Faso, les habitants des communes de Sebba et Solhan vivent dans la peur constante. Sous la menace permanente des groupes jihadistes qui sévissent dans la région, ils ont décidé de faire entendre leur voix. Ce mardi, une manifestation a été organisée devant le haut-commissariat de Sebba pour réclamer un renforcement de la sécurité et un meilleur approvisionnement des localités assiégées.
Des communes sous blocus, dépendantes des convois militaires
Depuis plusieurs mois, Sebba et Solhan sont coupées du monde, encerclées par les groupes armés affiliés à Al-Qaïda et à l’État islamique. Les populations ne survivent que grâce aux convois de ravitaillement escortés par l’armée, qui parviennent à rallier ces communes au péril de leur vie. Les derniers vivres et produits de première nécessité sont arrivés il y a six mois, et les stocks s’amenuisent dangereusement.
Les attaques incessantes des jihadistes sur les axes routiers compromettent gravement la sécurité alimentaire et les conditions de vie des habitants. Selon une source proche du dossier, la situation est particulièrement préoccupante à Solhan, théâtre d’un effroyable massacre en juin 2021 qui avait coûté la vie à 132 personnes.
L’éducation et la santé touchées de plein fouet
Au-delà des pénuries de nourriture et de biens essentiels, c’est tout le système éducatif et sanitaire qui est paralysé par l’insécurité. Comme le souligne Ali Diallo, un lycéen ayant participé à la manifestation, les établissements scolaires de Sebba et Solhan n’ont pas rouvert leurs portes depuis la rentrée, il y a deux mois. Une génération sacrifiée, privée d’instruction et d’avenir.
Dans les centres de santé, le manque de médicaments et de personnels soignants qualifiés se fait cruellement sentir. Une association locale de femmes alerte sur le nombre croissant de décès de patients, faute de moyens pour les soigner. L’accès à l’eau potable est également un défi quotidien pour les habitants.
Un appel à l’aide désespéré face à la menace jihadiste
À travers cette manifestation, les populations de Sebba et Solhan lancent un cri d’alarme aux autorités burkinabè. Elles réclament un renforcement significatif du dispositif sécuritaire pour les protéger des attaques sanglantes et des représailles des groupes armés. L’arrivée d’un nouveau convoi de ravitaillement au mois de novembre est également une priorité absolue pour éviter une catastrophe humanitaire.
Mais au-delà de ces mesures d’urgence, c’est une véritable stratégie de lutte contre le terrorisme qui doit être mise en place au Burkina Faso. Depuis 2015, les violences jihadistes ont fait plus de 26 000 morts et des centaines de milliers de déplacés à travers le pays. Malgré l’intervention militaire française de l’opération Barkhane et les efforts des forces armées nationales, la situation sécuritaire ne cesse de se dégrader.
Le coup d’État de septembre 2022, qui a porté au pouvoir le capitaine Ibrahim Traoré, avait suscité un immense espoir au sein de la population. Mais un an plus tard, plus de 13 500 personnes ont encore perdu la vie dans des attentats et des massacres. Les manifestants de Sebba attendent des actes forts du nouveau régime pour endiguer l’expansion de la mouvance jihadiste et ramener la paix dans les régions martyrisées du nord et de l’est.
Car derrière les revendications sécuritaires et les besoins de ravitaillement, c’est le désir de vivre dignement et de retrouver une existence normale qui s’exprime. Les habitants de Sebba et Solhan, comme tous les Burkinabè, aspirent à un quotidien libéré de la peur et de la violence. Un quotidien où les enfants peuvent aller à l’école, où les malades sont soignés, où l’eau coule aux fontaines. Des droits fondamentaux bafoués par les groupes jihadistes, et que l’État se doit de garantir à tous ses citoyens.
Cette manifestation est un appel solennel lancé au gouvernement et à la communauté internationale. Le Burkina Faso a plus que jamais besoin d’une mobilisation générale pour venir à bout de la pieuvre jihadiste qui gangrène le pays. Chaque jour qui passe aggrave le bilan humain et fragilise davantage le tissu social et économique national. Le temps presse, les vies de milliers de Burkinabè sont en jeu.