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Manifestation à Abidjan Contre le 4e Mandat d’Ouattara

À Abidjan, des milliers de manifestants dénoncent le 4e mandat d’Ouattara et exigent le retour de Gbagbo et Thiam sur la liste électorale. Que va-t-il se passer ?

Dans les rues animées d’Abidjan, une marée humaine s’est rassemblée ce samedi matin, unie par un même cri : refuser un quatrième mandat pour le président sortant et réclamer justice pour les leaders de l’opposition exclus de la course électorale. Cette mobilisation, empreinte de détermination et de ferveur, illustre les tensions croissantes à l’approche de l’élection présidentielle du 25 octobre 2025. Mais que signifie cette manifestation pour l’avenir politique de la Côte d’Ivoire ?

Une Mobilisation Historique à Yopougon

Le quartier populaire de Yopougon, fief traditionnel de l’opposition, s’est transformé en un théâtre de contestation pacifique. Des milliers de personnes, agitant des drapeaux ivoiriens et ceux des partis d’opposition, ont marché sur une grande artère pour exprimer leur mécontentement. Organisée par le Front commun, une alliance entre le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), cette manifestation a rassemblé des citoyens de tous horizons, jeunes et moins jeunes, unis par un objectif commun.

Les slogans étaient clairs : « Pas de quatrième mandat ! » et « Réinscrivez Gbagbo et Thiam ! » résonnaient dans les rues, portés par une foule déterminée à faire entendre sa voix. Cette mobilisation n’était pas seulement une protestation, mais un véritable message adressé au pouvoir en place, à moins de trois mois d’un scrutin crucial.

Pourquoi Cette Manifestation ?

Au cœur de cette mobilisation, deux revendications majeures : l’opposition au quatrième mandat d’Alassane Ouattara et la demande de réinscription de figures clés de l’opposition sur la liste électorale. Le président sortant, au pouvoir depuis 2011, a annoncé fin juillet sa candidature pour un nouveau mandat, une décision qui a ravivé les tensions dans un pays où le climat politique reste fragile.

La Constitution ivoirienne limite pourtant le nombre de mandats présidentiels à deux. Cependant, une décision controversée du Conseil constitutionnel en 2020 a estimé que l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2016 avait remis le compteur des mandats à zéro, permettant ainsi à Ouattara de se représenter. Cette interprétation, dénoncée par l’opposition comme une manœuvre politique, est au centre des crispations actuelles.

C’est un avertissement, il faut que le pouvoir nous comprenne. Nous ne voulons pas d’un quatrième mandat anticonstitutionnel.

Sébastien Dano Djedje, président exécutif du PPA-CI

En parallèle, plusieurs leaders de l’opposition, dont Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam, sont exclus de la course électorale en raison de décisions judiciaires. Gbagbo, ancien président, est frappé par une condamnation pénale, tandis que Thiam, ancien patron de Credit Suisse, fait face à des controverses sur sa nationalité. Ces exclusions, perçues par l’opposition comme des stratégies pour écarter des adversaires politiques, alimentent la colère des manifestants.

Qui Sont les Leaders Exclus ?

La manifestation d’Abidjan met en lumière les parcours de plusieurs figures de l’opposition, dont l’exclusion de la présidentielle soulève des questions sur l’équité du processus électoral. Voici un aperçu des principaux acteurs concernés :

  • Laurent Gbagbo : Ancien président de la Côte d’Ivoire (2000-2011), il est une figure emblématique du PPA-CI. Condamné pour des faits liés à la crise post-électorale de 2010-2011, il reste un symbole fort pour ses partisans.
  • Tidjane Thiam : Ancien dirigeant d’entreprise de renommée mondiale, il est à la tête du PDCI. Son exclusion, liée à des questions de nationalité, est vue comme une tentative de neutraliser un adversaire redoutable.
  • Guillaume Soro : Ancien Premier ministre et chef rebelle, actuellement en exil, il est également exclu pour des condamnations pénales.
  • Charles Blé Goudé : Proche de Gbagbo, cet ancien leader des Jeunes Patriotes est lui aussi écarté pour des raisons judiciaires.

Ces exclusions, jugées arbitraires par l’opposition, renforcent le sentiment d’injustice parmi les manifestants. Pour beaucoup, elles traduisent une volonté du pouvoir de limiter la concurrence électorale, rendant le scrutin de 2025 particulièrement sensible.

Un Climat Politique Tendu

À l’approche de l’élection, la tension monte en Côte d’Ivoire. Ces dernières semaines, plusieurs membres du PDCI et du PPA-CI ont été interpellés, des arrestations que l’opposition qualifie d’enlèvements et de harcèlement. Les autorités, de leur côté, rejettent ces accusations, affirmant qu’il n’y a aucune arrestation arbitraire dans le pays.

Ce climat de suspicion n’est pas nouveau. La Côte d’Ivoire a une histoire marquée par des crises électorales, notamment en 2010, lorsque la contestation des résultats avait plongé le pays dans une guerre civile ayant fait plus de 3 000 morts. Les événements actuels ravivent les craintes d’une nouvelle période d’instabilité.

C’est une mobilisation historique qui montre que le peuple de Côte d’Ivoire est debout face à l’intransigeance.

Noël Akossi Bendjo, vice-président du PDCI

La manifestation de Yopougon, bien que pacifique, envoie un signal fort : le peuple ivoirien est prêt à se mobiliser pour défendre ses convictions. Mais la question demeure : le pouvoir écoutera-t-il cet appel, ou les tensions continueront-elles de s’aggraver ?

Les Enjeux de l’Élection de 2025

L’élection présidentielle d’octobre 2025 s’annonce comme un tournant pour la Côte d’Ivoire. Avec un président sortant déterminé à briguer un nouveau mandat et une opposition galvanisée, les mois à venir risquent d’être marqués par des débats intenses et des mobilisations populaires. Voici les principaux enjeux à surveiller :

Enjeu Description
Légitimité du scrutin L’exclusion de leaders de l’opposition soulève des questions sur l’équité du processus électoral.
Respect de la Constitution Le débat sur la réinitialisation des mandats reste un point de discorde majeur.
Stabilité politique Les tensions actuelles pourraient dégénérer si le dialogue entre pouvoir et opposition n’est pas rétabli.

Pour l’opposition, la réinscription des leaders exclus sur la liste électorale est une condition sine qua non pour garantir un scrutin transparent. Sans cela, le risque d’une contestation des résultats, voire d’une crise plus grave, reste élevé.

Quel Avenir pour la Côte d’Ivoire ?

La manifestation d’Abidjan n’est qu’un épisode dans un feuilleton politique qui s’annonce long et complexe. Alors que le pays se prépare pour une élection décisive, plusieurs scénarios sont possibles. Une issue pacifique dépendra de la capacité des acteurs politiques à dialoguer et à trouver un terrain d’entente.

Pour les citoyens ivoiriens, cette mobilisation est un rappel de leur pouvoir collectif. En descendant dans les rues, ils ont montré qu’ils ne resteront pas silencieux face à ce qu’ils perçoivent comme une injustice. Mais la route vers octobre 2025 est encore longue, et les défis nombreux.

Dans un pays où les blessures du passé sont encore vives, chaque pas vers la paix et la démocratie compte. La manifestation de Yopougon, par sa discipline et sa détermination, pourrait marquer un tournant. Reste à savoir si elle sera entendue, ou si elle ne sera qu’un prélude à de nouvelles tensions.

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