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Madagascar en Crise : La Jeunesse Défie le Pouvoir

À Madagascar, des milliers de jeunes défient le pouvoir dans les rues, réclamant la démission d’Andry Rajoelina. Une grève générale est lancée, mais jusqu’où ira ce soulèvement ?

Dans les rues d’Antananarivo, capitale de Madagascar, l’air est saturé de gaz lacrymogène. Depuis une semaine, un cri retentit : celui d’une jeunesse malgache qui, dans plusieurs villes du pays, se mobilise pour exiger le départ du président Andry Rajoelina. Ce mouvement, porté par la Gen Z, ne se contente plus de protester : il appelle désormais à une grève générale, défiant un pouvoir accusé de corruption et d’inaction face à la pauvreté endémique. Comment ce soulèvement, d’une ampleur rare, pourrait-il redessiner l’avenir de l’île ?

Une révolte portée par la jeunesse

À Antsiranana, dans le nord du pays, des milliers de personnes ont défilé, leurs voix unies dans un seul mot d’ordre : “Rajoelina, dégage !”. À Toliara, au sud, des centaines de manifestants se sont joints au mouvement, malgré une répression brutale. Selon un bilan des Nations unies, les affrontements ont déjà causé 22 morts et des centaines de blessés. Ces chiffres, loin d’éteindre la colère, ont galvanisé la jeunesse, qui utilise les réseaux sociaux pour organiser et amplifier ses revendications.

Le mouvement, qui s’inspire du drapeau pirate du manga One Piece, symbole de révolte dans d’autres pays comme l’Indonésie, est porté par une génération née autour des années 2000. Cette Gen Z malgache, organisée et connectée, ne se bat pas seulement contre un président, mais contre un système qu’elle juge corrompu et défaillant.

Les racines d’une colère profonde

À l’origine de cette vague de contestation, un ras-le-bol généralisé face aux conditions de vie. Madagascar, malgré ses richesses naturelles, reste l’un des pays les plus pauvres du monde. Selon la Banque mondiale, en 2022, près de 75 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté. Les coupures incessantes d’eau et d’électricité, attribuées à une mauvaise gestion de la société nationale Jirama, ont été le déclencheur des premières manifestations le 25 septembre.

“Il est au pouvoir depuis 16 ans, mais rien n’a changé. Les conditions de vie des Malgaches empirent de jour en jour. Notre avenir s’assombrit.”

Un manifestant anonyme à Antananarivo

La grogne ne se limite pas aux infrastructures. La jeunesse dénonce aussi la corruption, avec Madagascar classé 140e sur 180 dans l’indice de perception de la corruption de Transparency International. Les manifestants pointent du doigt des figures comme Mamy Ravatomanga, homme d’affaires et soutien financier clé du président, réclamant un procès pour ses agissements.

Une répression qui attise la révolte

Dans la capitale, les forces de l’ordre ont bouclé le centre-ville, utilisant des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants. Pourtant, loin de calmer les esprits, cette répression a renforcé la détermination des protestataires. Le renvoi du gouvernement par Rajoelina, annoncé en début de semaine, a été jugé insuffisant par les leaders du mouvement, qui exigent désormais sa démission pure et simple.

Les revendications se sont élargies. Outre le départ du président, la Gen Z demande la dissolution du Sénat, de la Haute cour constitutionnelle et de la commission électorale, jugées complices du pouvoir en place. Ces institutions, selon les manifestants, ont contribué à maintenir un système politique verrouillé, notamment lors des élections contestées de 2023.

Chiffres clés de la crise :

  • 22 morts et des centaines de blessés depuis le début des manifestations.
  • 75 % de la population vit sous le seuil de pauvreté (Banque mondiale, 2022).
  • Madagascar, 140e sur 180 dans l’indice de corruption de Transparency International.

L’opposition et la société civile s’unissent

Longtemps en retrait, l’opposition s’est jointe à la contestation. Des figures comme Siteny Randrianasoloniaiko et l’ancien président Marc Ravalomanana, évincé en 2009 après une révolte populaire, ont signé un communiqué de la plateforme Firaisankina, appelant à un changement radical. Parallèlement, cinq grandes organisations de la société civile ont sollicité l’intervention de l’Église pour mener une médiation.

Le pape Léon XIV, dans un message poignant, a exprimé sa tristesse face à la situation et appelé à promouvoir la justice et le bien commun. Ce soutien moral, bien que symbolique, renforce la légitimité des revendications populaires.

“Nous demandons la démission du président. Le renvoi de son gouvernement ne suffit pas.”

Un porte-parole anonyme du mouvement à l’université d’Antananarivo

Un mouvement structuré et connecté

Ce qui distingue ce soulèvement, c’est son organisation. La Gen Z utilise les réseaux sociaux pour coordonner les manifestations et diffuser ses messages. Le drapeau pirate de One Piece, adopté comme symbole, incarne leur esprit de rébellion. Ce choix n’est pas anodin : il s’inspire de mouvements similaires à l’international, où la jeunesse s’empare de symboles culturels pour fédérer.

Le mouvement a également su rallier des secteurs clés. Le principal syndicat des inspecteurs du travail et les employés de la Jirama, entreprise publique d’eau et d’électricité, ont annoncé leur participation à la grève générale. Cet élargissement du mouvement pourrait paralyser des pans entiers de l’économie, augmentant la pression sur le gouvernement.

Un président sous pression

Andry Rajoelina, 51 ans, est une figure centrale de la politique malgache. Ancien maire d’Antananarivo et magnat des médias, il a accédé au pouvoir une première fois en 2009, à la faveur d’un soulèvement populaire soutenu par l’armée. Après un retrait temporaire sous la pression internationale, il est revenu en force, remportant les élections de 2018 et 2023, bien que cette dernière victoire ait été entachée de controverses.

Son bilan est sévèrement critiqué. Malgré les richesses naturelles de l’île, la population continue de s’enfoncer dans la précarité. Les promesses de développement économique et d’amélioration des services publics n’ont pas été tenues, alimentant la défiance envers le président.

Période Événement clé
2009-2014 Rajoelina au pouvoir après un soulèvement populaire.
2018 Élection contestée, Rajoelina revient au pouvoir.
2023 Réélection controversée de Rajoelina.
2025 Manifestations massives et grève générale.

Vers un tournant historique ?

La crise actuelle pourrait marquer un tournant pour Madagascar. Si la grève générale gagne en ampleur, elle pourrait paralyser le pays et forcer des négociations. Cependant, le pouvoir, fort de son contrôle sur les institutions, ne montre pour l’instant aucun signe de capitulation. La jeunesse, elle, ne semble pas prête à reculer.

Ce mouvement, porté par une génération connectée et déterminée, pose une question cruciale : la Gen Z parviendra-t-elle à transformer sa colère en véritable changement politique ? Alors que les manifestations se poursuivent et que la grève générale s’intensifie, Madagascar se trouve à la croisée des chemins.

Les revendications principales :

  • Démission du président Andry Rajoelina.
  • Dissolution du Sénat, de la Haute cour constitutionnelle et de la commission électorale.
  • Procès contre Mamy Ravatomanga, soutien financier du président.
  • Amélioration des conditions de vie et fin des coupures d’eau et d’électricité.

Le soulèvement malgache, loin d’être un simple sursaut de colère, s’inscrit dans une dynamique mondiale où la jeunesse prend les devants pour exiger un avenir meilleur. À Madagascar, où les défis sont immenses, ce mouvement pourrait redéfinir les contours d’une nation en quête de justice et d’équité.

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