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Madagascar : Crise et Appel à Manifester Contre Rajoelina

À Madagascar, la colère gronde : manifestations contre les coupures d’eau et d’électricité s’intensifient. La jeunesse exige le départ de Rajoelina. Que va-t-il se passer ?

Dans les rues d’Antananarivo, la capitale de Madagascar, l’air est chargé de tension. Depuis le 25 septembre, des manifestations secouent l’île, portées par une population excédée par les coupures d’eau et d’électricité qui paralysent le quotidien. Ce qui a débuté comme une révolte contre des conditions de vie précaires s’est transformé en un mouvement plus large, réclamant désormais le départ du président Andry Rajoelina. Alors que les forces de l’ordre quadrillent le centre-ville et que les consultations pour nommer un nouveau Premier ministre se poursuivent, l’île de l’océan Indien est à un tournant décisif. Comment en est-on arrivé là, et quelles sont les forces en jeu dans cette crise ?

Une Crise aux Racines Profondes

Madagascar, malgré ses richesses naturelles, reste l’un des pays les plus pauvres au monde. En 2022, près de 75 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté, selon des données fiables. Les coupures fréquentes d’eau et d’électricité, devenues monnaie courante, ont exacerbé le sentiment d’abandon chez les habitants. Ce mécontentement, qui couvait depuis des années, a explosé fin septembre, donnant naissance à un mouvement de contestation sans précédent.

Le mouvement, initialement axé sur des revendications pratiques, s’est rapidement politisé. Les manifestants, emmenés par la jeunesse autoproclamée Gen Z, ne se contentent plus de demander des améliorations matérielles. Ils pointent du doigt un système qu’ils jugent défaillant et exigent des changements structurels, voire le départ du président en place.

La Jeunesse au Cœur de la Contestation

Le mouvement Gen Z, composé de jeunes Malgaches déterminés à bousculer l’ordre établi, est devenu le fer de lance de la protestation. Dans une vidéo diffusée récemment, des porte-parole du groupe ont exprimé leur volonté de changer l’histoire de Madagascar. Entourés de leurs camarades, ils ont déclaré :

Nous ne sommes que des jeunes prêts à changer l’histoire de Madagascar.

Leur discours, empreint de détermination, résonne avec une génération qui refuse de vivre dans les mêmes conditions que ses aînés. À Antananarivo, les appels à manifester se concentrent sur le quartier d’Ambohijatovo, où les forces de l’ordre maintiennent une surveillance accrue. Les pickups remplis de militaires sillonnent la ville, et l’avenue de l’Indépendance, habituellement animée, affiche des commerces fermés, signe de la gravité de la situation.

Une Contestation qui S’Étend à la Province

Si la capitale reste l’épicentre des manifestations, le mouvement gagne du terrain à travers le pays. À Antsiranana, dans le nord, des milliers de personnes ont défilé pour exprimer leur ras-le-bol. Des rassemblements ont également eu lieu à Mahajanga, Toliara, et, pour la première fois, à Sambava, une région clé pour la production de vanille. Cette mobilisation nationale montre l’ampleur du mécontentement et la capacité du mouvement à fédérer au-delà des frontières de la capitale.

Dans ces villes, les revendications restent similaires : un accès fiable à l’eau et à l’électricité, mais aussi une gouvernance plus transparente et équitable. La crise actuelle met en lumière les failles d’un système où les richesses naturelles, comme la vanille ou les minerais, ne profitent pas à la population.

La Réponse du Pouvoir : Consultations et Répression

Face à l’ampleur des manifestations, le président Andry Rajoelina a tenté de calmer les esprits en annonçant le renvoi de son gouvernement. Cette décision, prise en début de semaine, visait à apaiser les tensions, mais elle n’a pas suffi à désamorcer la colère populaire. Les consultations pour nommer un nouveau Premier ministre se poursuivent, avec des rencontres impliquant des autorités religieuses, des diplomates, ainsi que des représentants d’organisations internationales comme le Fonds monétaire international et les Nations unies.

Dans un message publié sur les réseaux sociaux, Rajoelina a écrit :

Nous avons prié pour notre nation ensemble.

Cette tentative de montrer une volonté d’apaisement contraste avec la forte présence des forces de l’ordre dans les rues. La répression des manifestations, combinée à des violences lors de pillages sans lien direct avec les protestataires, a eu des conséquences tragiques. Selon certaines sources, au moins 22 personnes auraient perdu la vie et des centaines d’autres ont été blessées, bien que ces chiffres soient contestés par les autorités malgaches.

Un Contexte Politique Explosif

Andry Rajoelina, âgé de 51 ans, n’en est pas à sa première crise. Ancien maire d’Antananarivo et magnat des médias, il a accédé au pouvoir en 2009 à la faveur d’un soulèvement populaire soutenu par l’armée. Après une période de transition jusqu’en 2014, il est revenu sur le devant de la scène en se faisant élire en 2018, puis réélire en 2023 lors d’un scrutin boycotté par l’opposition. Cette trajectoire tumultueuse alimente la méfiance d’une partie de la population à son égard.

L’opposition, habituellement divisée, s’est unie dans une rare prise de position commune pour demander son départ. De leur côté, plusieurs syndicats, y compris celui de la société nationale de distribution d’eau et d’électricité, ont appelé à une grève générale, ajoutant une pression supplémentaire sur le gouvernement.

Les Défis Structurels de Madagascar

La crise actuelle ne peut être pleinement comprise sans prendre en compte les défis structurels auxquels Madagascar est confronté. Malgré ses ressources naturelles abondantes, le pays reste englué dans une pauvreté extrême. Les infrastructures défaillantes, les inégalités criantes et une gouvernance souvent critiquée ont créé un terreau fertile pour le mécontentement populaire.

Indicateur Donnée
Taux de pauvreté (2022) 75 %
Indépendance 1960
Population Environ 28 millions

Ce tableau illustre la réalité brutale à laquelle font face les Malgaches. Dans un pays où trois quarts de la population vivent sous le seuil de pauvreté, les services de base comme l’eau et l’électricité deviennent des enjeux politiques majeurs.

Vers Où Va Madagascar ?

Alors que les manifestations se poursuivent, l’avenir de Madagascar reste incertain. La nomination d’un nouveau Premier ministre pourrait apaiser temporairement les tensions, mais elle ne résoudra pas les problèmes structurels qui alimentent la colère populaire. La jeunesse, en particulier, semble déterminée à maintenir la pression, portée par un désir de changement profond.

Le mouvement Gen Z incarne cette aspiration à un renouveau. Leur capacité à mobiliser à travers le pays, des grandes villes comme Antsiranana aux régions rurales comme Sambava, montre que la contestation dépasse les clivages traditionnels. Cependant, la répression et les violences risquent de compliquer la situation, rendant le dialogue entre le pouvoir et les manifestants plus difficile.

En attendant, la vie quotidienne à Antananarivo oscille entre paralysie et semblant de normalité. Si les écoles et certains marchés restent ouverts, l’ambiance reste lourde, marquée par la présence des forces de l’ordre et la fermeture des commerces dans les zones sensibles.

Un Appel au Changement

La crise actuelle à Madagascar est bien plus qu’une simple révolte contre des coupures de services publics. Elle reflète une fracture profonde entre une population en quête de dignité et un système politique qui peine à répondre à ses attentes. Les revendications portées par la Gen Z et soutenues par une opposition unie et des syndicats montrent que le mouvement a pris une ampleur nationale.

Pour sortir de l’impasse, il faudra plus que des consultations ou des changements cosmétiques au sein du gouvernement. Les Malgaches demandent une gouvernance qui place leurs besoins au centre, dans un pays où les richesses naturelles devraient être une source de prospérité, et non un symbole d’inégalités. La balle est désormais dans le camp d’Andry Rajoelina, mais la jeunesse malgache, elle, ne semble pas prête à lâcher prise.

  • Revendications principales : Accès à l’eau et à l’électricité, départ d’Andry Rajoelina.
  • Villes touchées : Antananarivo, Antsiranana, Mahajanga, Toliara, Sambava.
  • Acteurs clés : Gen Z, syndicats, opposition politique.

La situation à Madagascar reste volatile, et les prochains jours seront cruciaux pour déterminer si le pays s’engage dans une voie de dialogue ou s’enfonce dans une crise plus profonde. Une chose est sûre : la voix de la jeunesse, portée par le mouvement Gen Z, continuera de résonner dans les rues de l’île.

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