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Macron et Xi : Pandas, Ping-Pong et Diplomatie Intime en Chine

Après les discussions tendues sur l’Ukraine et le commerce, Macron et Xi se retrouvent dans un cadre verdoyant, entre pandas et parties de ping-pong… Mais derrière ces images chaleureuses, quels signaux la Chine envoie-t-elle vraiment à l’Europe ? La réponse risque de surprendre.

Imaginez deux chefs d’État qui, la veille, se sont affrontés sur la guerre en Ukraine et les déséquilibres commerciaux, se retrouver le lendemain au milieu des montagnes, à parler ingénierie hydraulique vieille de 2 300 ans et à admirer des pandas. C’est exactement ce qu’a vécu Emmanuel Macron lors de la dernière journée de sa visite officielle en Chine.

Un dernier jour sous le signe de l’intimité diplomatique

Loin des dorures du Palais du Peuple de Pékin, c’est dans un décor de carte postale que Xi Jinping a choisi d’accueillir le couple présidentiel français. Direction le Sichuan, ses montagnes verdoyantes et le site historique du barrage de Dujiangyan, classé au patrimoine mondial de l’Unesco.

Le président chinois, accompagné de son épouse Peng Liyuan, a joué les guides touristiques pour Emmanuel et Brigitte Macron. Un geste rare, presque personnel, qui fait écho à l’invitation de Macron l’an dernier dans les Pyrénées, sur les traces de son enfance.

Dujiangyan : quand l’ingéniosité ancienne impressionne les modernes

Le barrage de Dujiangyan n’est pas un simple ouvrage. Construit au IIIe siècle avant notre ère, ce système d’irrigation continue d’alimenter la plaine du Sichuan sans jamais avoir eu besoin de barrage classique. Une prouesse qui a fasciné les deux présidents.

« C’est un système d’ingénierie écologique qui incarne l’harmonie entre l’homme et la nature »

Xi Jinping lors de la visite

Xi Jinping n’a pas manqué de souligner la portée philosophique de l’ouvrage : cette sagesse ancienne peut inspirer la gouvernance moderne, qu’il s’agisse de maîtrise de l’eau ou de gestion d’un État. Emmanuel Macron, col de chemise ouvert, a répondu avec enthousiasme.

« Impressionnant de voir que la nature a été ainsi maîtrisée par l’homme », a-t-il déclaré, visiblement séduit par la démonstration. Un moment de complicité rare entre deux dirigeants que tout semble opposer sur la scène internationale.

Pandas : l’arme douce de la diplomatie chinoise

Impossible de parler de Chengdu sans évoquer ses stars : les pandas géants. Brigitte Macron s’est rendue au Centre de conservation où elle a retrouvé Yuan Meng, le premier panda né en France en 2017, dont elle est la marraine.

Deux autres pandas, prêtés à la France en 2012, viennent tout juste de rentrer en Chine après dix ans passés au zoo de Beauval. Un retour qui marque la fin d’un cycle, mais aussi la perpétuation d’une tradition diplomatique bien rodée.

Car la « diplomatie du panda » n’est pas un vain mot. Depuis les années 1970, la Chine utilise ces animaux adorables comme ambassadeurs auprès des pays amis. Les bébés nés à l’étranger reviennent systématiquement à Chengdu pour intégrer les programmes de reproduction.

Ping-pong présidentiel avec les frères Lebrun

De son côté, Emmanuel Macron a profité de la présence en Chine des frères Alexis et Félix Lebrun, en lice pour la Coupe du monde de tennis de table par équipes mixtes, pour un échange de balles très attendu.

Après avoir déjà joué avec Alexis Lebrun à l’Élysée en novembre 2024, le président français semble avoir trouvé dans le ping-pong un terrain d’entente inattendu. Une manière légère de conclure une visite commencée sur des sujets bien plus lourds.

Le saviez-vous ? Le ping-pong a déjà joué un rôle historique dans les relations sino-américaines. En 1971, la « diplomatie du ping-pong » avait permis les premiers contacts officieux entre la Chine et les États-Unis, ouvrant la voie à la visite de Nixon en 1972.

Derrière les sourires, les dossiers brûlants restent sur la table

Il serait tentant de ne voir dans cette journée qu’une parenthèse enchantée. Pourtant, les discussions de la veille à Pékin ont été autrement plus rudes.

Emmanuel Macron a une nouvelle fois pressé Xi Jinping d’user de son influence sur Vladimir Poutine pour faire cesser la guerre en Ukraine. Il a également pointé du doigt les déséquilibres commerciaux massifs entre l’Europe et la Chine.

Sur l’Ukraine, la réponse chinoise reste inchangée : Pékin se dit prêt à soutenir « tous les efforts de paix », sans jamais condamner l’invasion russe. Un positionnement qui continue d’irriter les capitales européennes.

Un petit pas sur le commerce, un grand pas espéré

En revanche, un timide signal positif a été envoyé sur le front économique. Une lettre d’intention a été signée pour accroître les investissements réciproques et créer un environnement commercial plus équitable.

« Nous sommes prêts à accroître les investissements réciproques »

Xi Jinping

Macron a rappelé que l’Europe avait largement ouvert son marché et partagé ses technologies lors du décollage économique chinois. Il attend désormais une réciprocité, notamment dans l’accès aux marchés et le transfert de technologies.

Reste à savoir si ces déclarations d’intention se traduiront par des actes concrets. Les précédents incitent à la prudence.

Une relation complexe entre confiance et méfiance

Cette visite illustre parfaitement l’ambivalence des relations franco-chinoises. D’un côté, des gestes d’amitié et de confiance rares : invitation dans des lieux personnels, moments partagés en couple, échanges culturels.

De l’autre, des divergences profondes sur les valeurs, la vision du monde et les intérêts économiques. La Chine reste un partenaire incontournable, mais aussi un concurrent systémique pour l’Europe.

En choisissant de conclure sa visite sur ces notes légères, Emmanuel Macron envoie un message clair : malgré les tensions, le dialogue doit rester ouvert. Quitte à passer par des pandas et des balles de ping-pong pour adoucir l’atmosphère.

Une chose est sûre : cette journée au Sichuan restera dans les annales comme l’un des moments les plus chaleureux – et les plus symboliques – de la diplomatie entre Paris et Pékin.

Entre barrage millénaire et pandas géants, Macron et Xi ont offert une image rare de complicité. Mais derrière les sourires, les sujets qui fâchent n’ont pas disparu pour autant.

La visite s’achève. Les avions décollent. Mais les dossiers, eux, restent grands ouverts. Et c’est peut-être là le principal enseignement de ce déplacement : avec la Chine, rien n’est jamais totalement réglé, mais rien n’est jamais totalement fermé non plus.

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