Alors que la guerre en Ukraine s’enlise depuis bientôt trois ans, les diplomates occidentaux se tournent vers l’histoire contemporaine. Leur quête ? Dénicher des pistes pour sortir de l’impasse et parvenir enfin à des négociations de paix entre Kiev et Moscou. Deux précédents historiques reviennent avec insistance : l’adhésion de la RFA à l’OTAN en 1955 et la neutralité de la Finlande pendant la Guerre froide.
L’invasion russe de l’Ukraine le 24 février 2022 a plongé l’Europe dans un conflit d’une ampleur inédite depuis la Seconde Guerre mondiale. Malgré le soutien militaire et économique massif des Occidentaux à Kiev, aucune issue ne semble se dessiner. Mais l’espoir renaît avec l’élection de Donald Trump à la présidence américaine, qui promet un accord « en 24 heures ».
Le scénario « RFA 1955 » pour l’Ukraine
Anticipant de futures négociations, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a proposé un compromis audacieux. Il appelle l’OTAN à garantir la sécurité des régions encore sous contrôle de Kiev, soit environ 82% du territoire. En contrepartie, il serait prêt à renoncer temporairement aux zones occupées par la Russie.
Ce scénario rappelle furieusement l’adhésion de la RFA à l’Alliance atlantique en 1955, régulièrement citée ces derniers mois par diplomates et experts. Intégrer l’OTAN revenait alors pour la RFA à renoncer à une réunification rapide avec la RDA voisine. Une concession territoriale en échange de garanties de sécurité limitées à la RFA, afin d’éviter une déflagration entre blocs de l’Est et de l’Ouest.
La « finlandisation », une autre voie ?
Mais pour certains observateurs, le parallèle avec l’Ukraine présente des limites. Ils suggèrent plutôt de s’inspirer de l’expérience finlandaise après 1945. Par un traité signé en 1948 avec l’URSS, la Finlande avait accepté une stricte neutralité en échange de son indépendance.
Ce qui est très d’actualité dans l’expérience finlandaise, c’est la façon dont ce pays a construit une armée extrêmement efficace, pour que la Russie comprenne que si elle décidait de l’attaquer, la guerre serait sanglante.
John Lough, spécialiste de la Russie à Chatham House
Un modèle pour l’Ukraine de demain ? Renoncer à l’OTAN mais bâtir une défense nationale puissante, voilà qui pourrait être acceptable par Moscou tout en préservant la souveraineté de Kiev. Reste que selon les experts, aucune analogie historique n’est parfaite.
Des leçons de l’histoire à manier avec précaution
C’est une bonne chose de s’appuyer sur des analogies historiques pour réfléchir aux solutions possibles, mais elles sont souvent trompeuses.
Tuomas Forsberg, professeur en relations internationales à l’Université d’Helsinki
Car au-delà des similitudes, les différences sont profondes. En 1955, la RFA n’était pas envahie et occupée comme l’est aujourd’hui l’Ukraine. Et Staline n’avait pas pour but de soumettre toute la nation finlandaise, contrairement à Poutine avec l’Ukraine selon nombre d’analystes.
Pourtant, à défaut de fournir une solution clé en main, ces précédents historiques offrent un cadre de réflexion précieux. Ils rappellent que des compromis douloureux sont parfois nécessaires pour préserver la paix et l’essentiel. Une leçon d’humilité et de réalisme, à méditer en ces temps troublés.