ActualitésSanté

L’UE sous le feu des critiques pour sa législation sur les substances chimiques

La législation européenne sur les substances chimiques dangereuses, Reach, est sous le feu des critiques. Manque de transparence, sanctions insuffisantes envers les industriels... Les ONG environnementales tirent la sonnette d'alarme. La Commission promet une révision en 2025, mais suffira-t-elle à régler les problèmes ?

Alors que l’Union Européenne se targue d’avoir l’une des législations les plus strictes au monde en matière de substances chimiques dangereuses, le règlement Reach fait l’objet de vives critiques. Manque de transparence, sanctions insuffisantes envers les industriels contrevenants, lenteurs administratives… Les ONG environnementales tirent la sonnette d’alarme sur les failles du système.

Un rapport accablant sur l’application de Reach

Lundi, l’ONG ClientEarth a publié un rapport au vitriol dénonçant les manquements dans l’application du règlement européen Reach, qui encadre depuis 2006 la fabrication et l’utilisation des substances chimiques en Europe. Selon l’ONG, pour les substances les plus dangereuses, « les inspections sont rares » chez les industriels et « les non-conformités rarement sanctionnées ».

Le rapport pointe aussi du doigt le manque de transparence de certains États membres comme l’Allemagne et l’Espagne, qui n’ont pas transmis leurs données sur le respect de Reach par leurs entreprises. « Les autorités européennes n’exercent aucun contrôle sur l’application des lois au niveau national », accuse ClientEarth.

Des procédures d’autorisation interminables

Outre le manque de sanctions, c’est la lenteur des procédures qui est montrée du doigt. La médiatrice européenne Emily O’Reilly a récemment épinglé la Commission pour les délais excessifs dans le traitement des demandes d’autorisation des industriels pour utiliser des substances dangereuses.

Il faut en moyenne 14,5 mois à la Commission pour préparer les projets de décision, et dans certains cas cela prend plusieurs années.

Emily O’Reilly, médiatrice européenne

Pendant ce temps, les entreprises peuvent continuer à utiliser ces substances dans l’UE. En France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) regrette aussi la « complexité » et les « lenteurs » de Reach. Selon une toxicologue de l’agence, les données transmises par les industriels sont parfois « limitées, obsolètes, voire absentes ».

Vers une révision a minima en 2025 ?

Face à ces critiques, la Commission européenne promet une révision de Reach en 2025. Initialement prévue pour 2022, elle a déjà été repoussée plusieurs fois, officiellement pour préserver la compétitivité des entreprises européennes.

Les premiers éléments dévoilés par Bruxelles ne sont guère rassurants. Le commissaire Séjourné veut « réduire considérablement » les autorisations individuelles pour les entreprises et privilégier des « restrictions plus larges ». De quoi inquiéter les ONG, qui craignent un affaiblissement des règles au nom de la simplification.

Malgré ses défauts, Reach reste « ambitieux et indispensable » pour protéger la santé et l’environnement, souligne l’Anses. Le règlement a permis d’interdire des substances controversées comme le bisphénol A dans les biberons. Mais pour les défenseurs de l’environnement, une réforme a minima ne suffira pas. Il est urgent de muscler les contrôles et les sanctions, et de rendre le système plus transparent.

L’enjeu est de taille : selon des estimations, l’exposition aux perturbateurs endocriniens, une catégorie de substances chimiques dangereuses, coûterait 163 milliards d’euros par an à l’Europe en dépenses de santé. C’est le prix de l’inaction face à cette menace invisible.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.