Tensions sur le front du commerce international. L’Union européenne vient de saisir l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour exiger une compensation financière des États-Unis dans le conflit qui les oppose sur la question épineuse des droits de douane américains frappant les importations d’olives espagnoles.
Cette action intervient après que Washington a contesté le niveau de rétorsion de 35 millions de dollars par an proposé par Bruxelles pour compenser le préjudice subi, selon une source proche des discussions à Genève. L’Europe entend ainsi obtenir réparation pour le manquement persistant des États-Unis à se conformer à une décision antérieure de l’OMC condamnant les droits antidumping et compensateurs visant spécifiquement les olives mûres espagnoles.
L’origine d’un différend vieux de six ans
Ce bras de fer commercial remonte à 2018, sous la présidence de Donald Trump, lorsque son administration avait imposé des taxes supplémentaires sur les olives en provenance d’Espagne. Washington les considérait alors comme indûment subventionnées et vendues à des prix déloyaux sur le marché américain, portant préjudice aux producteurs locaux.
Une décision jugée inacceptable par la Commission européenne, gardienne de la politique commerciale des Vingt-Sept. Bruxelles avait riposté en portant plainte devant l’organe de règlement des différends de l’OMC. Un panel d’experts indépendants fut constitué pour examiner le dossier et trancher la question épineuse des subventions agricoles.
Un arbitrage en faveur de l’Europe
En 2021, les juges avaient donné raison aux Européens, estimant illégaux les droits compensateurs perçus par les États-Unis. Ils exigeaient de Washington de mettre ses mesures en conformité avec les règles du commerce international, sous peine de s’exposer à des sanctions.
Les États-Unis ont assuré par la suite avoir procédé aux changements demandés par l’OMC.
Mais Bruxelles n’était pas de cet avis. Jugeant insuffisants les efforts américains, l’UE a demandé la mise en place d’un nouveau groupe spécial chargé de vérifier la bonne application du verdict. En février dernier, les experts ont conclu que les États-Unis n’avaient toujours pas mis en œuvre la décision, ouvrant ainsi la voie à des représailles.
Course contre la montre avant d’éventuelles sanctions
Selon les règles de l’OMC, lorsqu’un pays est reconnu en faute, il doit rapidement corriger le tir. À défaut, la partie plaignante est autorisée à imposer des sanctions sous forme de surtaxes douanières sur les importations du pays incriminé. Techniquement, il s’agit de suspendre des concessions ou d’autres obligations dans le cadre des accords commerciaux.
C’est précisément l’objet de la démarche entreprise ce lundi par l’UE, qui entend faire pression sur Washington. Un arbitre devra maintenant déterminer le montant adéquat des contre-mesures que Bruxelles sera autorisée à prendre si les États-Unis s’obstinent à ne pas respecter le jugement.
Cette nouvelle escalade survient dans un contexte de fortes tensions commerciales entre les deux rives de l’Atlantique, sur fond de guerre des subventions dans l’aéronautique et de contentieux anciens dans le secteur de l’acier. Si le dossier des olives espagnoles peut paraître anecdotique, il est révélateur des vives frictions qui opposent régulièrement l’UE et son allié américain sur les questions de concurrence et de protectionnisme.
À l’heure où l’Europe cherche à renforcer son autonomie stratégique et à faire entendre sa voix sur la scène mondiale, ce différend commercial est un nouveau test pour la crédibilité et la fermeté de Bruxelles face à Washington. Réussira-t-elle à faire plier l’Oncle Sam ou devra-t-elle revoir ses ambitions à la baisse ? Réponse dans les prochains mois, à l’issue de la procédure d’arbitrage à l’OMC, cet organe régulateur des échanges mondiaux dont l’autorité ne cesse pourtant d’être bousculée ces dernières années.