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L’UE Lance un Projet de Décolonisation des Noms de Rues

Bientôt des changements dans les noms de rues en Europe ? L'UE finance des projets pour "décoloniser" l'espace urbain en renommant les voies portant des références à l'époque coloniale. Une initiative qui suscite le débat sur la politique mémorielle et l'héritage...

Un vent de changement souffle sur les villes européennes. La Commission européenne vient de valider le financement de deux nouveaux projets visant à “décoloniser l’espace urbain” dans plusieurs pays du continent, dont la France. Cette initiative, qui s’étendra de 2024 à 2026, suscite déjà de vifs débats sur la politique mémorielle et l’héritage colonial.

300 000€ pour renommer les rues au passé colonial

Le premier projet, baptisé “Explorer les paysages urbains de l’UE pour déconstruire les récits coloniaux” (EUrban DECO), entend démontrer l’influence persistante de “l’idéologie coloniale” dans l’environnement urbain européen. Son objectif est ambitieux : établir de nouvelles cartes de sept villes, mettant en lumière les “références clés liées à l’héritage colonial” afin de les renommer “du point de vue des peuples colonisés”.

Le second projet, dont le nom n’a pas encore été dévoilé, suivra une démarche similaire. Au total, la Commission européenne a débloqué plus de 300 000 euros pour financer ces initiatives de “décolonisation” des rues européennes.

Un sujet qui divise l’opinion

Sans surprise, ces projets font déjà polémique. Pour certains, il s’agit d’une démarche nécessaire pour prendre en compte les souffrances du passé et bâtir une société plus inclusive. D’autres y voient une tentative de réécriture de l’Histoire, voire une forme de “repentance” imposée.

Effacer les noms de rues liés à notre passé colonial, c’est nier une partie de notre Histoire. On ne peut pas juger le passé avec les critères d’aujourd’hui.

– Un élu français opposé au projet

L’espace urbain, nouveau champ de bataille mémoriel ?

Au-delà des clivages, ces initiatives illustrent l’importance croissante accordée à l’espace public dans les débats mémoriels. Les noms de rues, places et monuments sont de plus en plus perçus comme des symboles politiques, reflétant les rapports de force et les visions dominantes d’une époque.

En s’attaquant à cette “toponymie coloniale”, l’Union Européenne entend promouvoir une relecture critique du passé et une réappropriation de l’espace urbain par les populations issues de la diversité. Reste à savoir si cette démarche rassemblera au-delà des cercles militants, ou si elle risque au contraire de raviver les tensions identitaires.

Un processus complexe et potentiellement conflictuel

Car renommer une rue n’est pas un acte anodin. Outre l’aspect pratique (changement des plaques, des adresses…), cela implique de se mettre d’accord sur les nouvelles dénominations. Or, les figures “décoloniales” ne font pas toujours consensus, y compris au sein des populations concernées.

De plus, certaines personnalités de l’époque coloniale restent populaires localement, malgré une réputation controversée au niveau national ou international. Débaptiser une avenue Lyautey ou Bugeaud pourrait susciter l’incompréhension, voire l’hostilité d’une partie des riverains.

Vers une approche apaisée et pédagogique ?

Pour éviter ces écueils, les porteurs de projet devront faire preuve de doigté et de pédagogie. Plutôt qu’une démarche punitive ou moralisatrice, il s’agira d’engager un dialogue serein sur la mémoire et ses enjeux contemporains.

  • Consulter largement les habitants et les associations
  • Contextualiser les choix de renommage
  • Prévoir un accompagnement éducatif et culturel

C’est à ce prix que la “décolonisation” des rues européennes pourra contribuer à apaiser les mémoires et à bâtir un récit collectif plus inclusif. Un chantier aussi nécessaire que délicat, qui nous rappelle que l’espace public est un palimpseste sans cesse réécrit au gré des évolutions sociales et politiques.

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