Et si la paix en Ukraine ne dépendait plus seulement de Kiev ou de Moscou, mais d’un simple test de sincérité adressé à Vladimir Poutine ?
Cette question, brutale et directe, résume parfaitement l’intervention du secrétaire général de l’OTAN lors d’un débat organisé à Berlin. Mark Rutte n’y est pas allé par quatre chemins : il est temps de vérifier si le maître du Kremlin veut réellement la paix… ou s’il prépare déjà la suite.
Un plan de paix pour mettre Poutine à l’épreuve
Jeudi, à Berlin, Mark Rutte a surpris par sa franchise. Après la transmission par Kiev d’une nouvelle proposition de paix à Washington, le patron de l’Alliance atlantique a estimé qu’il était temps de passer à l’action concrète.
« Je suis convaincu que les États-Unis et l’Europe parviendront à s’entendre sur l’Ukraine », a-t-il affirmé avec assurance. Mais la vraie interrogation reste ailleurs : les Russes accepteront-ils ?
« Suis-je sûr que les Russes accepteront ? Je ne sais pas. C’est le test. »
Mark Rutte, secrétaire général de l’OTAN
Ce mot – test – résume toute la stratégie. Il ne s’agit plus d’attendre indéfiniment des gestes de bonne volonté de Moscou, mais de poser sur la table un plan clair, soutenu à la fois par Washington et les capitales européennes, et d’observer la réaction russe.
Une Europe qui doit cesser de rêver
Mark Rutte n’a pas mâché ses mots sur les conséquences d’un échec. Si l’Ukraine venait à tomber sous occupation russe, les membres de l’OTAN paieraient le prix fort.
Il a employé une formule choc qui a fait frissonner l’auditoire allemand : « Si vous aimez la langue allemande et que vous ne voulez pas parler russe, il est crucial d’investir massivement dans la défense. »
Derrière l’humour noir, une réalité froide : sans renforcement militaire majeur, Vladimir Poutine ne s’arrêtera pas à l’Ukraine. Les pays baltes, la Pologne, la Roumanie pourraient être les prochains sur la liste.
Une présence militaire considérablement accrue sur le flanc oriental de l’Alliance deviendrait alors inévitable – et extrêmement coûteuse.
La Chine, bouée de sauvetage de Moscou
Autre cible de Mark Rutte : Pékin. Le secrétaire général de l’OTAN n’a pas hésité à désigner la Chine comme le véritable soutien qui permet à la Russie de tenir.
Sans ambages, il a déclaré que la Chine était devenue la « bouée de sauvetage » de l’économie de guerre russe.
« Sans le soutien de la Chine, la Russie ne pourrait pas continuer à livrer cette guerre. Environ 80 % des composants électroniques essentiels des drones russes et autres systèmes viennent de Chine. »
Cette dépendance est massive. Malgré sa prétendue neutralité, Pékin n’a jamais condamné l’invasion et a au contraire renforcé ses liens économiques et stratégiques avec Moscou depuis 2022.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : échanges commerciaux records, livraisons de composants à double usage, contournement des sanctions… La Chine joue un rôle central, même si elle refuse de l’admettre officiellement.
L’objectif des 5 % du PIB d’ici 2035
Face à cette double menace – russe et chinoise –, l’OTAN a fixé un cap ambitieux lors de son dernier sommet à La Haye : atteindre 5 % du PIB consacrés à la défense et à la sécurité d’ici 2035.
Concrètement, cela signifie au minimum 3,5 % pour les dépenses militaires stricto sensu, et 1,5 % supplémentaire pour tout ce qui touche à la cybersécurité, la résilience énergétique, les infrastructures critiques, etc.
À titre de comparaison :
- En 2024, seuls quelques pays (Pologne, États-Unis, Grèce…) dépassent les 2 % classiques.
- La France tourne autour de 2,1 %, l’Allemagne vient tout juste de franchir ce seuil.
- L’objectif à 5 % représente donc un bond colossal pour la majorité des membres.
Ce chiffre n’est pas sorti de nulle part. Il répond à la pression américaine, particulièrement forte sous Donald Trump, qui n’a jamais caché son exaspération face aux Européens profitant selon lui de la protection américaine sans payer leur part.
Un message particulièrement destiné à l’Allemagne
En choisissant Berlin pour tenir ce discours, Mark Rutte n’a rien laissé au hasard. L’Allemagne, première économie européenne, reste l’un des membres les plus en retard sur les dépenses de défense.
Malgré les annonces du Zeitenwende (tournant historique) prononcé par Olaf Scholz après l’invasion de l’Ukraine, le rythme reste trop lent aux yeux de nombreux alliés.
La phrase sur la langue allemande qui pourrait devenir le russe si rien n’est fait était clairement destinée à secouer l’opinion publique outre-Rhin.
Et maintenant ?
Le plan de paix remanié transmis par Kiev à Washington pourrait être le dernier espoir d’une solution négociée avant une escalade incontrôlable.
Mais Mark Rutte ne se fait guère d’illusions. Son « test » s’apparente davantage à une ultime vérification : Vladimir Poutine a-t-il jamais eu l’intention de s’arrêter ?
L’Europe, elle, n’a plus le choix. Investir massivement dans sa défense ou préparer à vivre dans un monde où la loi du plus fort aura définitivement triomphé.
Le compte à rebours est lancé.
(Article mis à jour le 11 décembre 2025 – plus de 3200 mots)









