Los Angeles, la cité des anges, se réveille aujourd’hui avec la gueule de bois. Les images apocalyptiques des collines d’Hollywood en feu ont fait le tour du monde. Un bilan humain et matériel très lourd qui soulève une question : cette mégalopole tentaculaire est-elle devenue ingérable face aux risques climatiques ?
Une ville hors-sol, étalée à l’infini
D’après l’architecte Nicolas Michelin, les méga-feux qui ravagent actuellement la ville sont le résultat d’un « urbanisme hors-sol ». Los Angeles s’est développée de manière anarchique, sans tenir compte de la topographie, des vents, de l’ensoleillement. Une ville conçue pour et par l’automobile, étalée à l’infini.
Los Angeles est l’archétype d’une ville hors contexte. On a construit sans tenir compte du site.
Nicolas Michelin, architecte-urbaniste
Cet étalement urbain incontrôlé a eu pour effet de rapprocher dangereusement les habitations les unes des autres, supprimant les barrières naturelles face au feu. De nombreuses maisons ravagées étaient inaccessibles aux pompiers car nichées à flanc de colline.
Le tout-bois en question
Outre l’urbanisme, c’est l’architecture même des maisons californiennes qui est pointée du doigt. La plupart sont construites avec une ossature en bois, un matériau hautement inflammable utilisé dans 93% des nouvelles constructions selon la National Association of Home Builders.
Nicolas Michelin temporise cependant : le problème ne vient pas tant du bois lui-même que de constructions trop proches de zones à risques. Protégé par du plâtre ou des plaques de fibrociment, le bois reste un bon choix, à condition de « construire au bon endroit ».
Densifier intelligemment
Pour l’architecte, il est urgent de repenser l’aménagement du territoire à l’aune des risques climatiques croissants. Densifier le tissu pavillonnaire oui, mais pas n’importe comment. Il faut « construire un peu moins, plus dense, et surtout accepter de ne plus construire à certains endroits ».
Des « villes sur mesure » donc, qui prennent en compte la topographie, le climat, l’histoire des sites. C’est tout le contraire de l’approche qui a prévalu à Los Angeles pendant des décennies et qui aboutit aujourd’hui à une catastrophe prévisible.
Le défi de la résilience
Au-delà de la Californie, c’est tout l’urbanisme mondial qui est confronté au défi de la résilience climatique. Selon l’ONU, le nombre de méga-feux comme ceux de Los Angeles pourrait augmenter de 50% d’ici la fin du siècle. Un constat alarmant.
- Repenser l’aménagement du territoire en fonction des risques
- Construire des villes sur mesure, adaptées à leur environnement
- Densifier intelligemment, en évitant les zones vulnérables
- Opter pour une architecture résiliente
Telles sont quelques-unes des pistes pour construire les villes de demain. Los Angeles, meurtrie mais toujours debout, peut être le point de départ d’une prise de conscience. À condition de tirer les leçons du désastre.
Il faut se rattacher à la nature, accepter à certains endroits de ne plus construire compte tenu de la nouvelle donne climatique.
Nicolas Michelin, architecte-urbaniste
Un défi immense, un changement de paradigme total pour une ville-monde comme Los Angeles. Mais quel autre choix pour éviter que les flammes ne dévorent à nouveau la cité des anges ?