Au Venezuela, la bataille fait rage entre le pouvoir en place et une opposition déterminée à faire entendre sa voix. Suite au scrutin présidentiel du mois de juillet, dont les résultats sont vivement contestés, les opposants au président Nicolas Maduro appellent à une mobilisation sans précédent dans les rues du pays le 1er décembre prochain. Un nouveau bras de fer qui risque de faire monter encore d’un cran les tensions dans ce pays d’Amérique du Sud, en proie à une profonde crise politique.
Une élection présidentielle sous haute tension
Le mois dernier, les Vénézuéliens étaient appelés aux urnes pour élire leur président. Un scrutin sous haute surveillance, alors que le pays traverse une période de turbulences sans précédent. D’un côté, le président sortant Nicolas Maduro, héritier désigné de Hugo Chavez, bien décidé à se maintenir au pouvoir. De l’autre, une opposition ragaillardie par le mécontentement populaire, qui rêve de tourner la page des années Chavez.
Mais très vite, les premiers résultats donnent Maduro vainqueur. Selon le Conseil national électoral, sous contrôle du pouvoir, le dirigeant socialiste l’emporte avec 56% des voix. Un score aussitôt contesté par l’opposition, qui crie à la fraude massive. Leur candidat, Edmundo Gonzalez Urrutia, assure de son côté avoir recueilli près de 67% des bulletins, sur la base de plus de 80% des procès verbaux des bureaux de vote en sa possession.
L’opposition dénonce un “hold-up” électoral
Très vite, la situation s’envenime. L’opposition dénonce un véritable “hold-up” électoral et appelle la communauté internationale à ne pas reconnaître les résultats. De nombreux pays occidentaux, États-Unis en tête, expriment leurs doutes sur la régularité du scrutin. Mais Maduro, lui, crie victoire et s’apprête déjà à prendre ses fonctions pour un nouveau mandat le 10 janvier prochain.
Face à ce qu’elle considère comme un déni de démocratie, l’opposition décide de passer à l’offensive. Lors d’une grande réunion virtuelle ce samedi, plusieurs de ses leaders, dont Edmundo Gonzalez Urrutia en exil en Espagne, ont appelé à une immense manifestation dans tout le pays le 1er décembre.
Une énorme protestation dans et hors du Venezuela. Nous devons agir maintenant. Ce 1er décembre sera une manifestation unique, sans précédent, avec nos mains (peintes) en rouge, avec courage (…) le monde entier va se concentrer sur la cause d’un pays qui a décidé d’aller jusqu’au bout.
Maria Corina Machado, cheffe de l’opposition
Les opposants rêvent d’un soulèvement populaire
L’objectif affiché de cette “protestationdel primero de diciembre” : obtenir la reconnaissance de la “vraie” victoire de l’opposition et faire plier le régime. Une gageure dans un pays où le pouvoir n’hésite pas à réprimer brutalement toute contestation. Depuis la présidentielle, on dénombre déjà 28 morts, 200 blessés et plus de 2400 arrestations lors d’affrontements entre manifestants et forces de l’ordre.
Mais les opposants semblent déterminés à aller jusqu’au bout. Gonzalez Urrutia, proclamé “président élu” par une partie de la communauté internationale, promet de prêter serment le 10 janvier, comme le prévoit la Constitution. De son côté, Maria Corina Machado, une des figures de proue de la contestation, annonce des actions “plus fermes et plus décisives” d’ici là. Certains rêvent déjà d’un soulèvement populaire façon “printemps vénézuélien”, en référence aux révolutions arabes de 2011.
Maduro joue l’apaisement, l’opposition maintient la pression
De son côté, le président Maduro tente de jouer l’apaisement. Il se dit ouvert au dialogue avec l’opposition et promet une grande “concertation nationale” après sa prestation de serment. Mais pour l’heure, sa main tendue ne convainc pas grand monde chez ses adversaires, qui voient surtout une manœuvre pour gagner du temps.
Alors que chaque camp campe sur ses positions, c’est donc un véritable bras de fer qui s’annonce dans les prochaines semaines au Venezuela. Un pays déjà meurtri par une crise économique et sociale sans précédent, où la pauvreté a explosé ces dernières années. Dans ce contexte explosif, l’appel à la mobilisation du 1er décembre de l’opposition est un pari risqué. S’ils parviennent à faire descendre des millions de Vénézuéliens dans la rue, le régime Maduro pourrait vaciller. Mais en cas d’échec, c’est la contestation qui risque de s’essouffler. L’avenir du Venezuela se joue peut-être dans les prochains jours.