Depuis le retour au pouvoir des Taliban en Afghanistan en août 2021, la liberté de la presse est gravement menacée dans le pays. Un rapport de l’ONU, publié mardi, recense pas moins de 336 atteintes contre des journalistes et employés des médias en l’espace de trois ans. Ces chiffres alarmants témoignent d’un environnement médiatique étouffant, caractérisé par la censure et de fortes restrictions à l’accès à l’information.
Un climat de peur et d’intimidation pour les journalistes afghans
Le rapport conjoint de la Minua, la mission de l’ONU en Afghanistan, et du bureau des droits humains de l’ONU à Genève, met en lumière l’ampleur des violations subies par les professionnels des médias depuis l’arrivée au pouvoir des Taliban. Parmi les 336 cas d’atteintes recensés, on dénombre :
- 256 arrestations et détentions arbitraires
- 130 cas de tortures et de mauvais traitements
- 75 cas de menaces ou d’intimidations
Les journalistes et employés des médias afghans sont confrontés à des défis grandissants dans l’exercice de leur profession. Ils évoluent dans un environnement de censure, où les règles sur ce qui peut ou non être couvert sont floues. Toute critique perçue à l’encontre du régime les expose à des risques d’intimidation ou de détention arbitraire.
L’ONU appelle à la protection des journalistes
Face à cette situation préoccupante, Roza Otunbayeva, cheffe de la Minua, dénonce les conditions de travail extrêmement difficiles des journalistes en Afghanistan. De son côté, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Volker Türk, plaide pour la protection de ces professionnels qui jouent un rôle essentiel en informant le public et en garantissant la transparence et la responsabilité des autorités.
Tous les médias peuvent travailler en Afghanistan à condition de respecter les valeurs islamiques, l’intérêt supérieur du pays, sa culture et ses traditions.
Hayatullah Muhajir Farahi, vice-ministre afghan de l’Information
Malgré ces déclarations officielles, une nouvelle loi de « promotion de la vertu et prévention du vice », visant une application ultra-rigoureuse de la loi islamique, fait redouter le pire aux professionnels des médias. Loin d’être appliquée uniformément, cette loi suscite la crainte de voir un jour les images d’êtres vivants et la voix des femmes disparaître totalement des médias afghans.
Un paysage médiatique dévasté en trois ans
En août 2021, lors du retour des Taliban au pouvoir, l’Afghanistan comptait 8 400 salariés des médias, dont 1 700 femmes. Trois ans plus tard, ils ne sont plus que 5 100, dont seulement 560 femmes, selon des sources de la profession. Cette chute drastique des effectifs s’accompagne de la fermeture de dizaines de médias à travers le pays.
Le classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans Frontières (RSF) reflète cette dégradation alarmante de la situation. En l’espace de trois ans, l’Afghanistan a chuté de la 122ème à la 178ème place sur 180 pays évalués. Un constat sans appel qui souligne l’urgence d’agir pour protéger les journalistes et défendre la liberté d’expression dans le pays.
Le rapport de l’ONU met en évidence les menaces qui pèsent sur le journalisme en Afghanistan. Face à un régime taliban qui musèle la presse, il est crucial que la communauté internationale se mobilise pour soutenir et protéger les professionnels des médias afghans. Car en étouffant la liberté d’informer, c’est le droit du peuple afghan à connaître la vérité sur son propre pays qui est bafoué.