Une semaine après la chute brutale du régime de Bachar al-Assad en Syrie, l’émissaire de l’ONU Geir Pedersen s’est rendu à Damas dimanche pour discuter de l’avenir du pays. Lors de sa visite, il a martelé deux priorités essentielles pour la Syrie en cette période charnière : la mise en place d’une justice « crédible » et le renforcement de l’aide humanitaire.
Éviter les actes de vengeance par une justice fiable
Avec la fin soudaine du pouvoir d’Assad, qui dirigeait la Syrie d’une main de fer depuis deux décennies, M. Pedersen a souligné l’importance cruciale d’instaurer un système judiciaire solide et impartial. Le but : prévenir tout déchaînement de violence vengeresse.
« Nous avons besoin de voir qu’il y a une justice et des responsabilités établies pour les crimes commis. Et nous devons nous assurer que cela passe par un système judiciaire crédible, et qu’il n’y ait pas de vengeance », a-t-il déclaré.
Un défi de taille après des années de guerre civile meurtrière, qui a vu de nombreuses exactions commises par le régime comme par certains groupes rebelles. Rétablir la confiance des Syriens envers la justice sera un enjeu majeur de la transition.
Mobiliser l’aide internationale
Le deuxième axe mis en avant par l’émissaire onusien est le besoin urgent d’accroître l’assistance humanitaire. Après plus d’une décennie de conflit dévastateur, la population syrienne est exsangue. Des millions de personnes dépendent de l’aide pour survivre.
M. Pedersen a appelé la communauté internationale à se mobiliser rapidement pour fournir un soutien renforcé :
« Nous savons tous que la Syrie a traversé une énorme crise humanitaire. Nous devons veiller à ce que la Syrie reçoive une aide humanitaire immédiate accrue pour la population en Syrie, et pour tous les réfugiés qui souhaitent rentrer. C’est extrêmement important. »
Près de 6 millions de Syriens ont fui le pays depuis 2011. Leur retour éventuel nécessitera des garanties de sécurité et des conditions de vie décentes.
Une transition inclusive à construire
Au-delà de la justice et de l’aide d’urgence, l’arrivée au pouvoir de la coalition rebelles menée par le groupe islamiste HTS ouvre une phase d’incertitude. L’émissaire de l’ONU a souligné l’importance de mettre en place un « processus politique qui englobe tous les Syriens ». Un défi alors que le nouveau pouvoir en place suscite la méfiance de nombreux pays occidentaux.
Lors de discussions à Amman en Jordanie samedi, des diplomates américains, arabes, européens et turcs ont convenu que la transition devait être pilotée par les Syriens eux-mêmes et aboutir à « un gouvernement inclusif, non sectaire et représentatif ». Mais le chemin s’annonce semé d’embûches.
L’épineuse question des sanctions
HTS, classé « terroriste » par plusieurs pays occidentaux dont les États-Unis, fait l’objet de sanctions de l’UE. Un statut qui complique la reprise économique et la reconstruction, comme l’a souligné M. Pedersen :
« Nous espérons que les sanctions seront rapidement levées, afin que nous puissions assister à une véritable mobilisation autour de la reconstruction de la Syrie. »
Mais une levée rapide des sanctions apparaît peu probable sans garanties sur l’évolution politique du pays. La transition syrienne s’annonce comme un immense défi, entre impératifs de justice, d’aide et de stabilité. L’émissaire de l’ONU aura fort à faire pour accompagner ce processus et mobiliser le soutien international indispensable.