ActualitésSanté

L’OMS Lève 3,8 Milliards Pour Un Financement Durable Et Flexible

L'OMS a annoncé une levée de fonds record de 3,8 milliards de dollars pour financer durablement ses activités. Mais cette réforme sera-t-elle suffisante pour répondre aux défis sanitaires mondiaux ? Analyse des enjeux...

En marge du sommet du G20, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) vient d’annoncer une nouvelle qui pourrait bien changer la donne pour son avenir financier. Grâce à son nouveau mécanisme de financement, l’organisation a réussi à lever pas moins de 3,8 milliards de dollars. L’objectif ? S’assurer un accès à des fonds “durables, prévisibles et souples” pour mener à bien ses missions de santé publique à l’échelle mondiale. Mais cette réforme sera-t-elle suffisante pour répondre aux immenses défis sanitaires auxquels fait face l’humanité ?

Un enjeu crucial pour l’indépendance de l’OMS

Depuis sa création en 1948, le modèle de financement de l’OMS a considérablement évolué, et pas forcément dans le bon sens. À l’origine, l’organisation était entièrement financée par les contributions fixes de ses États membres, calculées en fonction de la taille de leur économie. Un système qui garantissait à l’OMS des ressources prévisibles et utilisables avec souplesse.

Mais au fil des décennies, la part des contributions volontaires n’a cessé de croître, jusqu’à représenter 87% du budget en 2022-2023. Un déséquilibre qui rend l’OMS de plus en plus dépendante de fonds fléchés vers des projets spécifiques, au détriment de sa liberté d’action. Sans compter les risques d’ingérence politique, comme l’a montré la menace de retrait brandie par Donald Trump durant son mandat.

Des disparités dans le financement des maladies

Ce système de contributions volontaires a aussi créé des déséquilibres entre les différentes priorités sanitaires. Comme l’explique Daniel Thornton, directeur de la mobilisation des ressources à l’OMS, les maladies transmissibles sont généralement mieux financées que les maladies non transmissibles, même si ces dernières représentent une charge de morbidité bien plus lourde.

En cause, l’argument de sécurité nationale qui pousse les pays à investir davantage dans la prévention des épidémies, perçues comme une menace directe. Un raisonnement à courte vue quand on sait que les maladies chroniques comme le diabète, les cancers ou les troubles mentaux pèsent bien plus lourd en termes de vies humaines et de coûts pour les systèmes de santé.

Vers un financement plus durable et équitable

Pour tenter de rééquilibrer la balance, l’OMS a donc lancé une vaste réforme de son modèle de financement. Première étape : la création en 2022 de la Fondation OMS pour diversifier les sources de revenus et attirer des donateurs privés. Autre engagement capital : la promesse des États membres de porter progressivement la part des contributions statutaires à 50% du budget de base d’ici 2030.

L’OMS expérimente aussi un nouveau “cycle d’investissement” sur 4 ans, visant à obtenir des promesses de dons en amont plutôt qu’au fil de l’eau. L’objectif est d’assurer une plus grande prévisibilité des ressources pour les activités jugées essentielles.

3,8 milliards de dollars levés, mais encore 3,3 milliards à trouver

Des premiers résultats encourageants ont été annoncés lors du G20 par l’OMS, qui affirme avoir sécurisé 3,8 milliards de dollars sur les 7,1 milliards nécessaires pour la période 2025-2028. Un montant record obtenu grâce à l’engagement de nouveaux donateurs, comme l’Australie, l’Indonésie, l’Espagne, mais aussi de nombreux pays africains et asiatiques.

Mais pour boucler son budget, l’organisation doit encore convaincre de nombreux autres pays et fondations privées de mettre la main à la poche. Un défi de taille dans un contexte économique tendu, et alors que certains États comme les États-Unis, son premier contributeur, pourraient être tentés de réduire leur soutien.

Un test grandeur nature pour le nouveau modèle de l’OMS

Au-delà des montants levés, c’est bien la pérennité du nouveau mécanisme de financement qui sera scrutée dans les années à venir. L’OMS parviendra-t-elle à sécuriser dans la durée des ressources à la hauteur de ses ambitions, tout en préservant son indépendance ? La réforme favorisera-t-elle un rééquilibrage des financements entre maladies transmissibles et non transmissibles ?

Autant de questions auxquelles il faudra répondre pour garantir à l’OMS les moyens de ses missions au service de la santé mondiale. Car au-delà de la question financière, c’est bien la légitimité et la capacité d’action de l’organisation qui sont en jeu. Après la crise du Covid-19 qui a mis en lumière ses forces et ses faiblesses, l’OMS joue sans doute l’une des parties les plus importantes de son histoire.

Une réussite de sa réforme serait un signal fort pour redonner confiance dans le multilatéralisme et la coopération internationale en santé. Un échec, à l’inverse, risquerait d’affaiblir durablement l’autorité de l’OMS face à des défis sanitaires de plus en plus complexes et globalisés. Les premiers jalons sont posés, mais le chemin est encore long et semé d’embûches. L’avenir de notre santé à tous en dépend.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.