L’artiste urbain français de renom, Ernest Pignon-Ernest, pionnier du collage éphémère, offre à La Havane une oeuvre singulière intitulée “Concert baroque”. Ce collage monumental, réalisé sur les murs du centre historique de la capitale cubaine, rend hommage à l’écrivain cubain Alejo Carpentier, figure majeure de la littérature latino-américaine du XXe siècle. Une rencontre artistique et littéraire aux résonances multiples.
Une oeuvre inspirée du roman “Concert baroque” d’Alejo Carpentier
C’est en s’inspirant du court roman d’Alejo Carpentier, “Concert baroque”, paru en 1974, qu’Ernest Pignon-Ernest a imaginé son oeuvre havanaise. Un choix qui n’est pas anodin pour l’artiste français, qui voue une grande admiration à l’écrivain cubain :
C’est un roman absolument exceptionnel. Il affirme, avec la musique, la dimension universelle de la culture.
Ernest Pignon-Ernest
Dans ce roman, le personnage principal, un riche Mexicain, voyage de La Havane à Venise où il croise de grands noms de la musique comme Vivaldi, Haendel ou encore Scarlatti. Une odyssée musicale et culturelle qui trouve un écho particulier dans le collage d’Ernest Pignon-Ernest.
Un hommage aux grandes figures artistiques
Sur les sept rouleaux de papier journal qui composent l’oeuvre finale, Ernest Pignon-Ernest fait dialoguer les époques et les continents. On y retrouve des personnages historiques comme Vivaldi, Haendel, l’empereur aztèque Montezuma ou encore le compositeur cubain Joseito Fernandez, auteur du célèbre “Guantanamera”.
Un balcon d’artistes qui surplombe la Place d’armes, l’une des plus anciennes places de La Havane. Au centre, la figure d’Alejo Carpentier à sa fenêtre, qui semble observer les passants, accompagné de son ami le poète français Robert Desnos et du poète cubain Nicolas Guillén.
La technique unique d’Ernest Pignon-Ernest
Pour réaliser cette fresque éphémère, l’artiste de 83 ans utilise sa technique signature : des dessins au fusain et à la pierre noire sur des chutes de papier journal, le tout collé à même le mur à l’aide d’une colle spéciale.
Quand il est mouillé par la colle, le papier devient très fin, très fragile et je peux le faire entrer dans la moindre anfractuosité du mur. Il y a une espèce de texture.
Ernest Pignon-Ernest
Une fois la colle sèche, l’oeuvre se fond littéralement dans le mur, jouant avec les aspérités et les perspectives pour créer une illusion troublante de réalité. La marque de fabrique d’Ernest Pignon-Ernest.
Retour à La Havane 40 ans après
Si cette oeuvre a une résonance toute particulière pour Ernest Pignon-Ernest, c’est aussi parce qu’elle marque son retour à La Havane, plus de 40 ans après son premier voyage en 1980. A l’époque, il avait été invité de manière inattendue aux obsèques d’Alejo Carpentier.
Je ne connaissais personne, ni à l’ambassade, ni à rien. Je ne savais pas pourquoi. Donc je suis allé à l’aéroport.
Ernest Pignon-Ernest
Sur place, la veuve de l’écrivain lui apprend qu’Alejo Carpentier avait été si ému par une exposition de l’artiste au Musée d’art moderne de Paris qu’il souhaitait le rencontrer. Une reconnaissance qui avait profondément touché Ernest Pignon-Ernest.
Une oeuvre universelle et intemporelle
Avec “Concert baroque”, Ernest Pignon-Ernest signe une oeuvre majestueuse qui sublime le lieu investi, la Vieille Havane et ses murs chargés d’histoire. En faisant dialoguer les arts et les époques, l’artiste français rend un vibrant hommage à Alejo Carpentier et à son message universel.
Une création éphémère à découvrir le temps de la 15e Biennale d’art de La Havane, qui se tient de novembre 2024 à février 2025. L’occasion rare de voir l’art urbain d’Ernest Pignon-Ernest s’exposer sous le soleil cubain et de (re)découvrir l’oeuvre inclassable d’Alejo Carpentier.