Le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay) suscite de vives inquiétudes en Italie, en particulier dans le secteur agricole. Le ministre de l’Agriculture Francesco Lollobrigida vient de rejeter sans appel le traité sous sa forme actuelle, estimant qu’il n’est “pas acceptable”.
Des obligations environnementales et sociales exigées
Membre du parti d’extrême droite Fratelli d’Italia dirigé par la Première ministre Giorgia Meloni, Francesco Lollobrigida demande que les agriculteurs du Mercosur soient soumis aux mêmes “obligations” que leurs homologues européens en matière de respect des droits des travailleurs et de l’environnement. Il faut selon lui “vérifier en amont” que ces exigences soient remplies avant d’aller plus loin.
Le ministre met en avant la fragilité du secteur agricole italien, déjà mis à mal par les récentes crises géopolitiques. Il craint que les producteurs de la péninsule ne puissent résister face à des importations à bas coûts en provenance d’Amérique du Sud.
Un gouvernement divisé sur la question
Au sein même de la coalition au pouvoir, les avis divergent sur cet épineux dossier. Si Francesco Lollobrigida campe sur une ligne dure, son collègue des Affaires étrangères Antonio Tajani, issu du parti conservateur Forza Italia, se montre plus conciliant. Début octobre, il jugeait “possible” de parvenir à un accord “utile pour les deux parties”, appelant à “aller de l’avant” malgré la complexité des négociations.
La fronde du monde agricole italien
Du côté des principales organisations agricoles italiennes en revanche, la position est claire : c’est un “non” catégorique à l’accord. La puissante Coldiretti, qui avait écrit à Giorgia Meloni pour lui faire part de la “profonde inquiétude” de la profession, dénonce des “effets dévastateurs” pour le secteur agroalimentaire transalpin si le traité venait à être signé en l’état.
Parmi les griefs soulevés : le fait que les règles en vigueur dans la zone Mercosur concernant l’usage des pesticides et les techniques de production soient “beaucoup moins exigeantes” qu’au sein de l’UE. Coldiretti pointe notamment du doigt le Brésil, qui a “quadruplé sa consommation de pesticides au cours des vingt dernières années”.
Vers un front commun avec la France ?
Face à ces inquiétudes, la principale association agricole italienne suggère une “collaboration étroite avec d’autres États membres de l’UE, comme la France”, afin de faire barrage à l’adoption de l’accord UE-Mercosur sous sa forme actuelle. Paris a en effet exprimé à plusieurs reprises ses réticences, Emmanuel Macron jugeant que le traité n’était “pas compatible” avec les ambitions climatiques de l’Europe.
Si un compromis semble difficile à trouver à ce stade, les négociations se poursuivent en coulisses. L’enjeu est de taille pour Bruxelles, qui cherche à diversifier ses partenaires commerciaux et renforcer ses liens avec l’Amérique latine. Mais comme le montre l’opposition résolue de l’Italie, la route vers la ratification s’annonce encore longue et semée d’embûches.