Dans un mouvement diplomatique audacieux, l’Irlande a officiellement reconnu l’État de Palestine ce mardi, rejoignant ainsi l’Espagne et la Norvège qui avaient franchi le pas la semaine dernière. Cette décision, lourde de sens, a immédiatement provoqué l’ire d’Israël qui accuse ces pays européens de se rendre « complices des appels au génocide du peuple juif ». Mais qu’est-ce qui a motivé ce choix et quelles en seront les conséquences sur l’échiquier géopolitique du Moyen-Orient ?
Un acte « nécessaire » pour la paix selon l’Europe
Pour le premier ministre irlandais Simon Harris, reconnaître l’État palestinien est un geste crucial pour « maintenir l’espoir en vie » et « parvenir à la paix » entre Israéliens et Palestiniens. L’Espagne abonde dans ce sens, estimant qu’il s’agit d’une « question de justice historique » pour les Palestiniens, tout en affirmant que cette décision ne vise nullement à nuire à Israël :
Cette décision n’est prise contre personne, et encore moins contre Israël, un peuple ami (…) avec qui nous voulons avoir la meilleure relation possible.
– Pedro Sánchez, Premier ministre espagnol
De son côté, la Norvège, l’Espagne et l’Irlande mettent en avant le rôle diplomatique clé qu’ils ont joué dans le processus de paix des années 1990 au Proche-Orient. Une manière de légitimer leur initiative et de lui donner une portée symbolique forte.
Israël dénonce une « récompense au terrorisme »
Mais c’est une toute autre musique que l’on entend du côté d’Israël. Pour le ministre des Affaires étrangères Eli Cohen, les pays européens concernés décernent ni plus ni moins qu’une « récompense au Hamas », qu’il tient pour responsable du déclenchement du dernier conflit à Gaza. Il est allé jusqu’à interdire au consulat d’Espagne à Jérusalem de fournir ses services aux Palestiniens.
Le gouvernement israélien s’insurge également contre les propos de Yolanda Díaz, numéro trois du gouvernement espagnol, qui a appelé à libérer la Palestine « du fleuve à la mer ». Un slogan interprété comme un appel à la destruction d’Israël.
L’Europe divisée sur la question palestinienne
Au-delà de l’Irlande, de l’Espagne et de la Norvège, d’autres pays européens comme la Slovénie envisagent de franchir le pas de la reconnaissance. Mais la question suscite de profondes divergences au sein de l’UE :
- La France juge que ce n’est pas le bon moment
- L’Allemagne n’envisage une telle reconnaissance qu’à l’issue de négociations de paix
- La Suède est pour l’instant le seul pays de l’UE à avoir reconnu la Palestine, en 2014
Au final, sur les 193 États membres de l’ONU, 145 reconnaissent à ce jour l’État de Palestine selon un décompte de l’Autorité palestinienne. Mais la plupart des pays d’Europe occidentale, d’Amérique du Nord ainsi que des puissances comme le Japon ou l’Australie manquent encore à l’appel.
Quel impact sur le processus de paix ?
Si l’initiative irlando-hispano-norvégienne a une haute portée symbolique, son impact réel sur le terrain et sur la relance du processus de paix apparaît pour l’heure limité. Les tensions restent vives, comme en témoigne la guerre des mots entre responsables européens et israéliens.
Mais dans ce conflit enlisé depuis des décennies, tout geste compte. En reconnaissant la Palestine, Dublin, Madrid et Oslo espèrent faire bouger les lignes et créer une nouvelle dynamique. Reste à savoir si d’autres capitales européennes leur emboîteront le pas et si cela suffira à ressusciter un processus de paix moribond. Les prochains mois seront décisifs pour en juger.