Face à l’escalade du programme nucléaire iranien, l’Europe montre les crocs. Lundi soir, un geste fort : le dépôt par la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne (E3) d’une résolution condamnant l’Iran lors du Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Une première depuis novembre dernier.
L’Iran, seul pays non doté de l’arme atomique à enrichir l’uranium à 60%
Si officiellement, Téhéran nie vouloir se doter de la bombe, les faits sont là. Selon l’AIEA, la République islamique est « le seul pays non doté de l’arme atomique à enrichir l’uranium au niveau de 60% et à accumuler des stocks toujours plus importants ». Un niveau qui se rapproche dangereusement des 90% nécessaires à la confection d’une arme nucléaire, et dépasse allègrement le plafond de 3,67% fixé par l’accord international de 2015 (JCPOA).
Une surveillance des activités nucléaires compromise
Mais les inquiétudes ne s’arrêtent pas là. Le directeur général de l’AIEA Rafael Grossi pointe également du doigt « les lacunes dans la surveillance des activités nucléaires » iraniennes, du fait de la forte restriction des inspections depuis 2021. Des déclarations récentes de responsables iraniens sur une possible évolution vers une vocation militaire assumée du programme ont aussi été jugées « inacceptables ».
L’Europe veut accroître la pression sur Téhéran
Via cette résolution, les Européens entendent bien accroître la pression sur le régime des Mollahs. Le texte, d’une portée symbolique à ce stade, aborde l’ensemble des points de contentieux :
- La présence de traces d’uranium inexpliquées sur deux sites non déclarés
- Le retrait de l’accréditation de certains inspecteurs expérimentés de l’AIEA
- La nécessité de rebrancher « sans délai » les caméras de surveillance
Il est essentiel et urgent que Téhéran fournisse des raisons techniquement crédibles.
– Extrait de la résolution européenne
Une position européenne plus ferme après l’échec des négociations
Cette initiative marque un tournant dans la position européenne, après l’échec des négociations de Vienne en 2022 pour relancer l’accord sur le nucléaire iranien. Selon Héloïse Fayet, chercheuse à l’Institut français des relations internationales, les Européens « montrent qu’ils reviennent dans le jeu et ne sont pas dupes des intentions iraniennes ».
Reste à voir quelle sera la réaction de Téhéran. L’amiral Ali Shamkhani, conseiller du guide suprême Ali Khamenei, a déjà prévenu : « Si certains pays européens malavisés adoptent une position hostile, ils feront face à une réponse sérieuse et efficace de notre pays ». Moscou aussi a mis en garde contre une résolution qui ne pourrait « qu’aggraver la situation ». Autant de signaux qui laissent présager de vives tensions à venir autour de ce dossier brûlant.