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L’Iran Garde Un Souvenir Amer Du Défunt Président Jimmy Carter

Jimmy Carter restera dans les mémoires iraniennes comme celui qui a tourné le dos à leur révolution naissante. Retour sur une relation tumultueuse entre les deux pays, de l'amitié à l'hostilité...

En Iran, la disparition de l’ancien président américain Jimmy Carter à l’âge de 100 ans ravive les souvenirs d’une époque charnière. Celui qui fut le dernier président américain à fouler le sol iranien avant la Révolution islamique de 1979 reste dans les mémoires comme un personnage ambigu, à la fois ami et ennemi de l’Iran.

De l’amitié à l’hostilité

Lors de sa visite à Téhéran en décembre 1977, Jimmy Carter ne tarissait pas d’éloges sur le régime du Shah Mohammad Reza Pahlavi, allié stratégique des États-Unis dans la région. Il voyait en l’Iran « un îlot de stabilité dans l’une des régions les plus agitées du monde ». Mais l’histoire en a décidé autrement.

À peine deux ans plus tard, la Révolution balayait la dynastie Pahlavi, mettant fin à 2500 ans de monarchie en Iran. Les révolutionnaires en voulaient particulièrement à l’Amérique, accusée de soutenir un régime corrompu et brutal. En novembre 1979, des étudiants iraniens prenaient d’assaut l’ambassade américaine à Téhéran, retenant en otage 52 diplomates et civils pendant 444 jours.

La « crise des otages », tournant des relations irano-américaines

Cet épisode, connu sous le nom de « crise des otages », a profondément marqué les esprits des deux côtés. Pour les Iraniens, il s’agit d’un acte fondateur de la jeune République islamique. L’ancienne ambassade américaine, rebaptisée « nid d’espions », est devenue un musée exhibant ce que beaucoup considèrent comme les preuves des ingérences américaines dans le pays.

Carter a eu un rôle négatif pour l’Iran et n’était pas bon pour nous. Au lieu de soutenir notre révolution naissante, il a ouvert un centre d’espionnage dans notre pays.

Hassan Taherifar, commerçant iranien

Du côté américain, cette crise a marqué une rupture définitive avec le nouvel Iran révolutionnaire. Jimmy Carter a envisagé une intervention militaire pour libérer les otages, avant d’y renoncer au vu des risques pour les captifs. Cet échec a contribué à sa défaite face à Ronald Reagan lors de l’élection présidentielle de 1980.

Jimmy Carter, l' »architecte des sanctions » contre l’Iran

Depuis, Jimmy Carter est perçu par beaucoup d’Iraniens comme celui qui a ouvert la voie aux sanctions économiques imposées par Washington. D’après la télévision d’État iranienne, il serait « l’architecte des sanctions » qui n’ont cessé de s’alourdir au fil des décennies, isolant toujours plus le pays.

Pourtant, l’ancien président démocrate avait aussi tenté d’amorcer un dialogue avec l’Iran. En 2015, il avait notamment soutenu l’accord sur le nucléaire iranien, censé permettre une levée partielle des sanctions en échange d’un contrôle strict du programme nucléaire de Téhéran. Mais le retrait unilatéral des États-Unis de cet accord sous Donald Trump en 2018 a douché les espoirs d’une normalisation.

Une amertume tenace envers les États-Unis

Aujourd’hui, alors que Jimmy Carter s’éteint, la rancoeur reste vive chez de nombreux Iraniens. Devant l’ancienne ambassade américaine à Téhéran, certains expriment même leur joie à l’annonce du décès : « Il va pourrir en enfer », lance un quinquagénaire en souriant.

D’autres regrettent que Jimmy Carter ait préféré prendre le parti des révolutionnaires plutôt que de soutenir jusqu’au bout le Shah, pourtant honni d’une grande partie de la population. Un sentiment mêlé d’amertume et de ressentiment qui montre à quel point cette période troublée a laissé des traces profondes dans les relations entre les deux pays.

Quarante ans après la révolution, et malgré quelques timides tentatives de rapprochement, le fossé entre l’Iran et les États-Unis semble toujours aussi profond. La mort de Jimmy Carter referme symboliquement un chapitre de cette histoire tourmentée, sans pour autant laisser entrevoir de réconciliation à l’horizon.

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