Imaginez un pays où les coupures d’électricité rythment le quotidien, où la chaleur écrasante de l’été pousse les habitants à bout, et où une décision venue de l’autre côté du globe pourrait plonger des millions de foyers dans le noir. Bienvenue en Irak, un géant pétrolier paradoxalement dépendant du gaz de son voisin iranien pour éclairer ses villes. Mais aujourd’hui, sous la pression des sanctions américaines, cette dépendance vacille, et Bagdad se démène pour trouver des solutions. Entre terminaux flottants et nouveaux partenariats dans le Golfe, l’Irak joue une partie serrée pour son avenir énergétique.
Une Dépendance Énergétique sous Tension
Depuis des années, l’Irak repose sur l’Iran pour un tiers de ses besoins en énergie. Gaz et électricité traversent la frontière pour alimenter un pays riche en pétrole, mais miné par des décennies de guerres et des infrastructures en ruines. Cette relation, bien que vitale, est devenue un casse-tête diplomatique. Les États-Unis, alliés stratégiques de Bagdad, ont décidé de serrer la vis à Téhéran avec des sanctions qui compliquent tout.
D’après une source proche du dossier, Washington a récemment refusé de renouveler une dérogation permettant à l’Irak d’acheter de l’électricité iranienne. Si le gaz n’est pas encore officiellement visé, le message est clair : il faut couper les cordons avec Téhéran, et vite. Une injonction qui place l’Irak dans une position délicate, coincé entre son parrain iranien et son puissant partenaire américain.
Un Plan d’Urgence pour l’Été
Face à cette menace imminente, Bagdad ne reste pas les bras croisés. Dès cet été, le pays veut diversifier ses sources d’approvisionnement. Parmi les projets phares, l’installation de **terminaux méthaniers flottants** dans le sud, une solution rapide et ambitieuse. Ces unités, capables de traiter des centaines de millions de pieds cubes de gaz par jour, pourraient devenir le salut d’un réseau électrique au bord de l’asphyxie.
« Nous devons envisager le pire : en cas d’interruption, des alternatives sont prêtes. »
– Un responsable du ministère de l’Électricité
Concrètement, deux terminaux sont prévus dans la région de Khor al-Zubair, reliés au réseau par un pipeline de 45 kilomètres. Si tout se passe bien, ils pourraient être opérationnels dès juin. Avec une troisième unité en vue, la capacité grimperait encore, assez pour compenser une éventuelle rupture avec l’Iran.
Le Golfe à la Rescousse ?
Pour alimenter ces terminaux, l’Irak lorgne sur ses voisins du Golfe. Le Qatar, géant du gaz naturel, est en pole position. Des discussions avancées promettent des tarifs préférentiels, une aubaine pour un pays en quête d’indépendance énergétique. Oman est aussi dans le viseur, offrant une autre option pour diversifier les importations.
- Qatar : Leader régional, prêt à soutenir l’Irak avec des livraisons massives.
- Oman : Une alternative crédible pour sécuriser l’approvisionnement.
- Objectif : Remplacer les 15 à 25 millions de mètres cubes quotidiens iraniens.
Mais le Golfe n’est pas la seule piste. Des négociations avec le Turkménistan sont en cours pour acheminer du gaz via des pipelines traversant… l’Iran ! Une ironie diplomatique qui illustre la complexité du puzzle énergétique irakien.
Le Poids de l’Énergie sur le Quotidien
En Irak, l’électricité n’est pas un luxe, c’est une question de survie. Avec des températures dépassant les 50 °C en été, les **délestages quotidiens** exacerbent les tensions sociales. Couper le gaz iranien sans alternative, c’est risquer des coupures massives et, potentiellement, des soulèvements populaires.
Besoin énergétique | Production actuelle | Objectif été 2025 |
55 000 MW | 16 000 MW | 27 000 MW |
Pour un responsable du secteur, « réduire le gaz, c’est priver les citoyens d’un approvisionnement vital ». Un défi d’autant plus pressant que l’accord avec Téhéran, renouvelé en 2024 pour cinq ans, patine : seuls 15 millions de mètres cubes arrivent chaque jour, loin des 50 millions promis.
Vers l’Autosuffisance : Un Rêve à Long Terme
À plus long terme, l’Irak rêve d’autonomie. Le gouvernement veut mettre fin au **torchage de gaz**, cette pratique qui brûle des ressources précieuses sur les champs pétroliers. D’ici 2028, ce gaz pourrait alimenter les centrales et réduire la dépendance extérieure. Une ambition noble, mais qui demande du temps et des investissements colossaux.
En attendant, les regards se tournent vers cet été. Les terminaux flottants tiendront-ils leurs promesses ? Les deals avec le Qatar et Oman suffiront-ils à éviter une crise majeure ? Dans un pays où l’électricité est un baromètre de la stabilité, chaque mégawatt compte.
En résumé : L’Irak mise sur des solutions d’urgence et des partenariats stratégiques pour échapper à la tutelle énergétique iranienne. Mais entre sanctions, infrastructures fragiles et calendrier serré, le pari reste risqué.
Ce bras de fer énergétique dépasse les simples chiffres. Il révèle les fragilités d’un pays pris entre des influences contraires, où chaque décision peut faire basculer l’équilibre. Pour les 46 millions d’Irakiens, l’été 2025 sera un test grandeur nature.