Imaginez un instant : remporter un prix prestigieux au Festival de Cannes pour votre interprétation dans un film qui reflète votre propre vie, tout en étant menacé d’expulsion du pays où ce film a été tourné. C’est la réalité que vit actuellement Abou Sangaré, jeune Guinéen de 23 ans, acteur principal du film “L’Histoire de Souleymane” de Boris Lojkine, qui sort cette semaine dans les salles obscures.
Une histoire poignante qui fait écho à sa propre vie
Dans “L’Histoire de Souleymane”, Abou Sangaré incarne un livreur de repas à vélo sans-papiers à Paris, qui jongle entre les courses effrénées, le mépris ou la bienveillance des clients, tout en se préparant à son entretien crucial pour sa demande d’asile. Un rôle qui fait indéniablement miroir à son propre vécu.
Mené à cent à l’heure, le long-métrage prend aux tripes et décrypte avec beaucoup de finesse les raisons qui ont poussé cet Africain à traverser la Méditerranée.
– Catherine Balle, Le Parisien
De Cannes à l’incertitude
Le 24 mai dernier, sous les projecteurs de la Croisette, Abou Sangaré se voyait décerner le Prix d’interprétation masculine dans la section Un Certain Regard. Une consécration pour ce jeune homme arrivé il y a quelques années en France. Mais l’euphorie fut de courte durée. Aujourd’hui, l’acteur est visé par une obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Une situation ubuesque pour celui qui assure actuellement la promotion du film dont il est le héros, et qui résonne fortement avec son propre parcours de migrant. Face à cette menace d’expulsion, Boris Lojkine et l’équipe du film se mobilisent pour soutenir Abou Sangaré dans ses démarches pour régulariser sa situation.
Le cinéma, miroir de réalités souvent invisibles
“L’Histoire de Souleymane” met en lumière le combat quotidien et les drames vécus par ces travailleurs de l’ombre, souvent sans-papiers, qui font tourner l’économie de la livraison de repas. Un sujet brûlant d’actualité dans une société où la précarité ne cesse de gagner du terrain.
À travers ce film coup de poing et le destin d’Abou Sangaré, c’est toute la question de l’accueil et de l’intégration des migrants qui est posée. Quand la fiction rattrape la réalité, le cinéma joue pleinement son rôle de porte-voix et de prise de conscience. Espérons que l’éclairage médiatique autour de ce long-métrage permette à Abou Sangaré de faire entendre sa voix et de faire valoir ses droits.
