Alors que le pouvoir vénézuélien affirme avoir accordé la libération de 225 personnes arrêtées lors des troubles post-électoraux de juillet dernier, l’incertitude plane toujours sur l’ampleur réelle de ces mesures. Selon l’ONG Foro Penal, qui défend les prisonniers politiques dans le pays, seules 131 libérations avaient été recensées ce dimanche matin.
Ces remises en liberté interviennent après la réélection contestée de Nicolas Maduro à la présidence du Venezuela. L’opposition dénonce une fraude massive orchestrée par le Conseil national électoral, considéré comme acquis au pouvoir en place. Les manifestations de protestation qui ont éclaté dans la foulée du scrutin ont été sévèrement réprimées, faisant 28 morts et près de 200 blessés selon les chiffres officiels.
Plus de 1700 prisonniers politiques toujours détenus
Au total, ce sont quelque 2400 personnes, dont 164 adolescents, qui ont été interpellées dans le sillage de cette crise post-électorale d’après le procureur général Tarek William Saab. Si 69 mineurs sont encore derrière les barreaux à l’heure actuelle, l’ONG Foro Penal estime pour sa part que plus de 1700 prisonniers politiques croupissent toujours dans les geôles vénézuéliennes.
Une liberté sous contrôle judiciaire
Parmi les détenus ayant bénéficié de ces mesures de libération, peu semblent avoir recouvré une totale liberté de mouvement. “Nous comprenons que, pour la plupart, il n’y a pas de liberté totale (contrôle judiciaire) et que les procédures judiciaires se poursuivent”, souligne Alfredo Romero, le directeur de Foro Penal. Des précisions qui viennent tempérer l’annonce en grande pompe du parquet.
L’attente interminable des familles
Devant plusieurs établissements pénitentiaires du pays, des scènes poignantes se déroulent. De nombreuses familles patientent, parfois en vain, dans l’espoir d’assister à la libération d’un proche. C’est notamment le cas aux abords des prisons de haute sécurité de Tocuyito et Tocoron, dans le centre-nord du Venezuela.
“Hier (samedi), ils ont dit qu’ils allaient libérer beaucoup plus de détenus aujourd’hui (dimanche) (…) entre 80 et 90 personnes de chaque prison. Mais des gardiens sont sortis et ont dit qu’ils n’ont reçu aucun papier de libération (…) ils se moquent de nous”
– Sol Ocariz, sœur d’un détenu de la prison de Tocuyito
Des témoignages qui illustrent le décalage persistant entre les annonces des autorités et la réalité vécue par les proches des prisonniers. Le Comité pour la liberté des prisonniers politiques a ainsi dénoncé des “retards” dans l’exécution des levées d’écrou, malgré la possession par l’administration pénitentiaire des documents nécessaires.
Un processus de libération partiel et opaque
Si l’amorce d’un processus de libération des prisonniers politiques semble engagée au Venezuela, celui-ci s’avère pour l’heure bien en-deçà des attentes et des promesses affichées. Entre des chiffres officiels remis en question, un périmètre d’application restreint et un manque criant de transparence, le chemin vers l’apaisement et la réconciliation nationale apparaît encore long et semé d’embûches.
Dans ce contexte, les regards restent braqués sur le pouvoir vénézuélien, sommé de joindre les actes à la parole en matière de respect des droits humains et des libertés fondamentales. Un impératif démocratique dont dépendra en grande partie la légitimité et la stabilité du second mandat de Nicolas Maduro, déjà largement contesté sur la scène internationale.