Dans un nouveau développement des tensions entre Israël et le Hezbollah libanais, une frappe israélienne sur un immeuble du centre de Beyrouth a entraîné dimanche la mort de Mohammad Afif, haut responsable média de l’organisation chiite pro-iranienne. Selon une source sécuritaire s’exprimant sous couvert d’anonymat, le raid mené sur le quartier de Ras al-Nabaa a également fait trois blessés.
Mohammad Afif occupait depuis de nombreuses années le poste clé de chargé des relations avec les médias au sein du Hezbollah. Il entretenait des contacts réguliers avec les journalistes locaux et étrangers, leur fournissant souvent des informations en “off”. Depuis l’assassinat fin septembre du secrétaire général du mouvement Hassan Nasrallah dans une précédente frappe israélienne, M. Afif avait pris une place encore plus importante, tenant plusieurs conférences de presse dans le fief du Hezbollah de la banlieue sud de Beyrouth.
Sa mort intervient dans un contexte de vives tensions entre Israël et le Hezbollah, après le lancement le 23 septembre d’une vaste campagne de bombardements israéliens au Liban visant le mouvement pro-iranien, suivie le 30 septembre d’une offensive terrestre dans le sud du pays. Plusieurs hauts dirigeants du Hezbollah ont été tués ces dernières semaines, dont Hassan Nasrallah et Hachem Safieddine qui était pressenti pour lui succéder.
Escalade meurtrière entre Israël et le Hezbollah
Cette nouvelle frappe marque une escalade dans la confrontation qui oppose Israël au Hezbollah libanais. Selon des sources proches du dossier, l’État hébreu reproche à l’organisation chiite son soutien actif au régime syrien dans la guerre civile qui déchire le pays depuis 2011, ainsi que son alliance étroite avec l’Iran, ennemi juré d’Israël. Le Hezbollah est considéré comme une organisation terroriste par Israël et les États-Unis.
De son côté, le mouvement libanais dénonce régulièrement les raids israéliens en Syrie et au Liban, qu’il présente comme une agression. Il avait d’ailleurs revendiqué fin septembre une attaque de drone contre la résidence du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, lors d’une conférence de presse tenue par Mohammad Afif quelques jours seulement avant sa mort.
Craintes d’une confrontation ouverte
La disparition de ce haut responsable du Hezbollah, après celle de plusieurs autres dirigeants ces dernières semaines, fait craindre un embrasement de la situation au Proche-Orient. Beaucoup redoutent qu’Israël et le Hezbollah, qui se sont déjà affrontés par le passé, ne s’engagent dans une confrontation ouverte aux conséquences potentiellement dévastatrices pour la région.
Contactée par l’AFP, l’armée israélienne s’est refusée à tout commentaire sur les informations faisant état de la mort de Mohammad Afif. Mais ce silence ne suffit pas à masquer la détermination de l’État hébreu à poursuivre ses opérations contre ce qu’il considère comme une grave menace à sa sécurité, quitte à faire monter les tensions d’un nouveau cran.
Le Liban pris en étau
Cette nouvelle frappe intervient alors que le Liban traverse une profonde crise, miné par des tensions politiques et confessionnelles, une grave récession économique et l’instabilité sécuritaire liée au conflit syrien. Le pays du cèdre se retrouve de facto pris en étau dans l’affrontement entre Israël et le Hezbollah.
Nombre d’observateurs craignent que le fragile équilibre libanais ne soit fortement ébranlé par une escalade entre les deux ennemis. Le gouvernement libanais, qui intègre des représentants du Hezbollah, se retrouve dans une position délicate, condamnant les raids israéliens mais peinant à contenir son encombrant allié. Une incapacité qui fait le jeu d’Israël et de ceux qui voient le Hezbollah comme un “État dans l’État”.
La communauté internationale appelée à la retenue
Face à ces développements inquiétants, la communauté internationale appelle toutes les parties à la plus grande retenue. Les États-Unis, la France et l’ONU ont multiplié les déclarations en ce sens, exhortant Israël et le Hezbollah à éviter toute action qui risquerait de mettre le feu aux poudres.
« Toutes les parties doivent s’abstenir de toute action qui pourrait aggraver la situation et plonger le Liban dans le chaos. Il est crucial que la souveraineté et l’intégrité du Liban soient préservées »
Un porte-parole du département d’État américain
Mais ces appels semblent pour l’heure peu entendus sur le terrain, où la logique de l’escalade semble l’emporter. La mort de Mohammad Afif risque en effet d’attiser le désir de revanche du Hezbollah, qui pourrait être tenté de riposter avec force aux opérations israéliennes. Un engrenage dangereux qui menace de précipiter la région dans une nouvelle spirale de violences.
Un avenir incertain pour le Proche-Orient
La disparition de ce haut responsable du Hezbollah s’ajoute à la longue liste des développements qui assombrissent l’horizon du Proche-Orient. Entre guerre civile en Syrie, tensions persistantes entre Israël et ses voisins, et instabilité chronique en Irak et au Yémen, la région apparaît plus que jamais comme une poudrière.
Dans ce contexte, beaucoup craignent qu’un embrasement entre Israël et le Hezbollah ne vienne s’ajouter aux multiples foyers de crise qui embrasent déjà le Proche-Orient. Un scénario catastrophe qui plongerait la région dans un nouveau cycle de violences et de destructions, aux conséquences imprévisibles.
« Si une confrontation ouverte devait éclater entre Israël et le Hezbollah, elle ne resterait pas confinée au Liban mais s’étendrait probablement à la Syrie et à l’ensemble du Proche-Orient. Les risques d’une déflagration régionale seraient considérables. »
Un analyste proche du dossier
Face à ces périls, la voie de la désescalade et de la négociation semble bien étroite. Elle apparaît pourtant comme la seule à même d’éviter que la mort de Mohammad Afif, après celle de nombreux autres acteurs du conflit, ne marque un nouveau tournant tragique pour une région déjà à vif. Un immense défi pour la communauté internationale, plus que jamais appelée à jouer les médiateurs pour tenter d’éviter le pire.